# 22 Des thérapies en mouvement (février 2019)(Re)bonds est un magazine mensuel créé par Fanny Lancelin, journaliste installée dans le Cher. Son but : à travers, des portraits d'habitant.es du Berry, raconter des parcours alternatifs, des modes de vie où le respect des êtres vivants et de leur environnement tient une place centrale.http://www.rebonds.net/22destherapiesenmouvement2023-05-11T18:57:39+02:00(Re)bonds.netJoomla! - Open Source Content ManagementLes origines de l'art-thérapie2017-03-21T13:37:42+01:002017-03-21T13:37:42+01:00http://www.rebonds.net/22destherapiesenmouvement/486-lesoriginesdelarttherapieSuper User<p><strong>Répandue en France dans sa forme actuelle surtout depuis les années 1980, l'art-thérapie est traversée par différents courants. Où puisent-ils leurs sources ? Qui sont les praticiens qui se sont un jour intéressés à l'art comme outil de soins ? Ont-ils tous poursuivi le même but ?</strong></p>
<p>Il n'était pas question d'art ni de thérapie, mais à une époque lointaine, les hommes se servaient déjà de rituels de guérison : on en retrouve des traces dans la peinture préhistorique, mais aussi dans le théâtre grec antique, dans l'étude des rêves des chamans amérindiens ou encore dans les mandalas tibétains…</p>
<p>La société occidentale a progressivement occulté ces traditions, notamment durant le Siècle des Lumières, période d'affirmation du rationnel, de l'observation et de l'interprétation scientifiques, au détriment d'une certaine forme d'intériorité.</p>
<p><strong><span style="font-size: 14pt; color: #ff615d;">Le principe de diversion</span></strong><br /><em></em></p>
<p><em>« Le XIXe siècle asilaire »</em>, comme le nomme le psychiatre Jean-Pierre Klein <span style="font-size: 8pt;">(1)</span>, fait entrer l'art dans les <em>« maisons de santé »</em>. Le théâtre ou la musique, par exemple, sont prescrits comme <em>« dérivatif(s) pour le malade qui peut ainsi sortir de son apathie et de son repli au monde intérieur délirant et douloureux »</em>. C'est le <em>« principe de diversion »</em>.<br />Soit les patients participent – le vieux marquis de Sade montait des pièces mêlant comédiens professionnels, infirmiers et asilés – soit ils sont spectateurs de bals ou d'opéras.<em> « L'art en lui-même importe moins que la volonté par tous les moyens d'arracher la personne à la folie qui l'envahit,</em> écrit Jean-Pierre Klein.<em> Le piano y est proposé au même titre que le billard, la broderie ou les dominos. »</em></p>
<p><span></span><span style="color: #ff615d;"><strong><span style="font-size: 14pt;">L'ergothérapie</span></strong></span></p>
<p>C'est dans cet esprit de « diversion » que naît au XIXe siècle « l'occupational therapy » aux Etats-Unis, traduite en français par « thérapie de réadaptation », « ergothérapie ». <a href="http://www.rebonds.net/images/ART_THÉRAPIE/dessin_np_1.jpg" type="image/jpeg" class="jcepopup" data-mediabox-title="Dessin : Nathalie Patard." data-mediabox="1"><img src="http://www.rebonds.net/images/ART_THÉRAPIE/dessin_np_1.jpg" alt="dessin np 1" width="447" height="462" style="margin-left: 15px; border: 2px double #e2e2e2; float: right;" /></a><br />Il s'agit de soigner et de restaurer les capacités physiques et psychiques par le travail, l'activité, « l'occupationnel ». Les activités artistiques et artisanales sont souvent utilisées.</p>
<p>Parmi les praticiens à avoir développé ces thérapies en France, les psychiatres Philippe Pinel (1745-1826) et Jean-Etienne Esquirol (1772-1840).</p>
<p><span style="color: #ff615d;"><strong><span style="font-size: 14pt;">Le mouvement de l'expression</span></strong></span></p>
<p>Au XXe siècle, s'épanouit le mouvement de l'expression, porté notamment par le psychologue américain Carl Rogers (1902-1987), connu aussi pour son « approche centrée sur le patient » (Person Centered Approach) dénommée en France « méthode non-directive ». Il y affirme trois attitudes qui doivent fonder la relation patient / thérapeute : l'empathie, l'adaptation et le regard positif inconditionnel. La personne est acceptée telle quelle est, ici et maintenant. Dans ses ateliers d'expression, il s'agit d'accueillir ce qui vient sans porter de jugement et sans que le travail sur la production soit encouragée.<br />En France, un des héritiers de Carl Rogers est le psychosociologue Max Pagès (1926-2018).</p>
<p>S'ils ont récusé le terme d'art-thérapie pour définir leur démarche, ils ont contribué aux nombreux courants qui la traverse.<br />Pour Jean-Pierre Klein, la différence tient au fait que <em>« l'expression soulage mais la création, et la création suivie, transforme »</em>.</p>
<p><strong><span style="font-size: 14pt; color: #ff615d;">Le décryptage des oeuvres</span></strong></p>
<p>Un autre courant place l'art au coeur d'un processus de « conscientisation » grâce au décryptage des œuvres. Les productions des malades sont analysées pour y déceler des pathologies.<br />Ainsi, le neurologue Jean-Martin Charcot (1825-1893) utilise une grille psychiatrique pour déceler, dans des dessins ou des peintures, les signes de maladies de leurs auteurs.<br />A l'instar de Sigmund Freud, les psychanalystes utilisent la « pathographie », c'est-à-dire le décryptage d'une œuvre et sa mise en relation avec la biographie de l'auteur pour une analyse psychanalytique.<br />Dans « la psychopathologie de l'expression », c'est l'oeuvre elle-même qui est considérée comme un des symptômes. Un système complexe de codification est mis en place avec, par exemple, une typologie de formes, de couleurs, de polices qui caractériseraient telle maladie. Claude Wiart (1929-2004) est considéré comme le fondateur de cette codification <span style="font-size: 8pt;">(2)</span>.</p>
<p>Ces courants posent plusieurs problèmes : d'une part, à l'époque, la base du décryptage était l'académisme, donc tout « manquement » à cet académisme était considéré comme symptomatique d'une maladie ; d'autre part, ils ne prenaient pas en compte les projections personnelles de l'artiste, ni la relation entre le patient et le thérapeute, pourtant fondamentale.</p>
<p>Pour Jean-Pierre Klein, la différence entre l'art-thérapie et <em>« le décryptage psychologique de l'expression artistique »</em> se situe dans la temporalité : le décryptage s'intéresse au passé, à ce qui a été fait, il est rétrospectif et renvoie à la personne telle qu'elle a été ; l'art-thérapie <em>« s'intéresse au mouvement »</em>, à ce que va devenir l'oeuvre. Dans un processus de création, l'évolution de l'oeuvre et de son auteur sont imprévisibles ; le thérapeute ne peut s'arrêter à un instant donné.</p>
<p><strong><span style="font-size: 14pt; color: #ff615d;">L'art des « fous » et l'art brut</span></strong></p>
<p><a href="http://www.rebonds.net/images/ART_THÉRAPIE/dessin_np_2.jpg" type="image/jpeg" class="jcepopup" data-mediabox-title="Dessin : Nathalie Patard." data-mediabox="1"><img src="http://www.rebonds.net/images/ART_THÉRAPIE/dessin_np_2.jpg" alt="dessin np 2" width="515" height="403" style="margin-left: 15px; border: 2px double #e2e2e2; float: right;" /></a>Parmi les origines qui ont fondé l'art-thérapie, citons également l'art « des fous » puis l'art brut. Des artistes s'intéressent aux créations produites par des personnes internées en hôpital psychiatrique. C'est l'époque de <em>« la mythification du fou »</em> et de l'assimilation <em>« folie-génie » </em><span style="font-size: 8pt;">(1)</span>. Des collections sont constituées. Des livres sont publiés sur le sujet comme celui de Hanz Prinzhorn <span style="font-size: 8pt;">(3)</span>.<em></em><br />Viennent ensuite André Breton et les surréalistes, qui s'intéressent à l'expression de l'inconscient à travers la création artistique. Pour Jean-Pierre Klein,<em> « l'influence du surréalisme (et au-delà sur l'art-thérapie) se fait mieux percevoir dans l'oeuvre et l'engagement du psychiatre Lucien Bonnafé (4), qui parle de « désaliénisme ». »</em> <em>« Désaliéner, c'est protester contre les aspects répressifs de la psychiatrie, mais c'est aussi reconnaître la parole du fou comme parole humaine riche de sens. »</em> L'art-thérapie permet de mieux se saisir de cette parole.</p>
<p>Le peintre Jean Dubuffet s'est intéressé aux travaux de Prinzhorn et de Walter Morgenthaler <span style="font-size: 8pt;">(5)</span>, qui avait réuni dans sa clinique près de Bern, les œuvres d'Adolf Wölfli <span style="font-size: 8pt;">(6)</span>. C'est Jean Dubuffet qui a réuni sous le vocable « art brut » les créations artistiques issues de personnes éloignées des canons culturels du fait d'un internement, d'un emprisonnement, d'une marginalité sociale. Les matériaux utilisés sont sobres. L'auteur est indifférent au marché de l'art,<em> « le créateur étant le seul destinataire de son oeuvre »</em><span style="font-size: 8pt;"> (1)</span>.</p>
<p>S'il peut avoir des retombées bénéfiques sur l'état psychologique de l'artiste, l'art brut n'a pas cette fonction première. Il ne peut donc être considéré comme art-thérapie. En revanche, ses influences sont indéniables, notamment quant au regard porté sur les créateurs considérés comme « fous ».</p>
<p><strong><span style="font-size: 14pt; color: #ff615d;">La psychiatrie infanto-juvénile<br /></span></strong></p>
<p>Autre origine de l'art-thérapie actuelle : la psychiatrie de l'enfant. Une spécialité récente qui regroupe des pratiques très diverses, mais qui obligent à réinventer sans cesse les formes de la rencontre entre le thérapeute et le patient, les méthodes, les matières… <em>« Le langage verbal introspectif s'avère souvent secondaire, voire impossible,</em> souligne Jean-Pierre Klein, <em>et l'on doit faire appel à la fiction (contes) ou aux langages non verbaux (plastiques, sonores, corporels, etc.). »</em><br />Ainsi, la psychothérapie de l'enfant fait souvent appel à la métaphorisation, notamment par le dessin. Dans une psychothérapie « classique », le thérapeute analysera les représentations en direct ou symbolisées ; il pourra échanger avec l'enfant sur l'interprétation de ces représentations.<br />En art-thérapie, le praticien encouragera l'enfant à développer sa fiction, lui permettra de la faire évoluer : par exemple, en le laissant faire grandir ses personnages ou disparaître les monstres… Cet accompagnement ne vise pas à obtenir des résultats rapides, comme la disparition d'un symptôme. Il s'agit plutôt d'un <em>« parcours symbolique faisant résolution des difficultés de la personne à travers des difficultés rencontrées dans la création, ce qui est le propre de l'art-thérapie »</em> <span style="font-size: 8pt;">(1)</span>.</p>
<p><strong><span style="font-size: 14pt; color: #ff615d;">La contribution d'Arno Stern<br /></span></strong></p>
<p>Arno Stern <span style="font-size: 8pt;">(7)</span> n'est pas psychiatre mais pédagogue, fondateur de l'institut de recherche en sémiologie de l'expression (l'étude des signes linguistiques verbaux et non verbaux). Il a marqué l'art-thérapie, notamment en peinture, en imaginant le Closlieu, espace idéal pour un atelier d'expression libre, et des outils tels que la table-palette (<em>lire aussi la rubrique (Ré)acteurs</em>) et le jeu de peindre.<br />Ses préceptes ont été étendus et s'adressent aussi, désormais, aux adultes.</p>
<p><strong><span style="font-size: 14pt; color: #ff615d;">Aujourd'hui<br /></span></strong></p>
<p>L'art-thérapie comprend différents mouvements qui cohabitent. Toutefois, ils tendent vers un objectif commun : permettre au participant de créer des mises en formes imaginaires de lui-même (dessin, peinture, mise en scène théâtrale, danse, marionnettes…), <em>« des déclinaisons de son identité à travers des formes artistiques dans un parcours de créations qui provoquent peu à peu (s)a transformation »</em>.</p>
<p><br /><span style="font-size: 8pt;">(1) Jean-Pierre Klein, « L'art-thérapie », PUF, 2012.<br />(2) Claude Wiart est le fondateur de la Société française de psychopathologie de l'expression et d'art-thérapie : <a href="https://www.sfpe-art-therapie.fr/Petite-histoire-pour-la-grande-histoire_a32.html">https://www.sfpe-art-therapie.fr/Petite-histoire-pour-la-grande-histoire_a32.html</a><br />(3) Hanz Prinzhorn, (1886-1933), « Les œuvres plastiques des malades mentaux. Contribution à la psychologie et à la psychopathologie de la mise en forme ».<br />(4) Lucien Bonnafé, (1912-2003).<br />(5) Walter Morgenthaler, (1882-1965).<br />(6) Adolf Wölfli, (1864-1930) : <a href="https://www.artbrut.ch/fr_CH/auteur/woelfli-adolf">https://www.artbrut.ch/fr_CH/auteur/woelfli-adolf</a><br />(7) Arno Stern (1924) : <a href="https://www.arnostern.com/fr/">https://www.arnostern.com/fr/</a></span></p>
<p> </p>
<div class="panel panel-primary">
<div class="panel-heading">
<h3 class="panel-title">Lire aussi</h3>
</div>
<ul>
<li>Chantal Higy-Lang et Charles Gellman, « La Gestalt-thérapie », éditions Eyrolles, 2018.</li>
<li>Alain Dikann, « L'art-thérapie pour les nuls », éditions First, 2015.</li>
<li>Anne-Marie Dubois et Corinne Montchanin, « Art-thérapie et enfance – contextes, principes et dispositifs », éditions Elsevier-Masson, 2015.</li>
<li>Jean-Pierre Klein, « Initiation à l'art-thérapie, découvrez-vous artiste de votre vie », éditions Marabout, 2014.</li>
<li>Jean-Marie Barthélémy, « De la pathographie à l'approche phénoméno-structurale en psychopathologie et psychologie de l'expression » : <a href="https://www.sfpe-art-therapie.fr/docs/27.pdf">https://www.sfpe-art-therapie.fr/docs/27.pdf</a></li>
</ul>
</div><p><strong>Répandue en France dans sa forme actuelle surtout depuis les années 1980, l'art-thérapie est traversée par différents courants. Où puisent-ils leurs sources ? Qui sont les praticiens qui se sont un jour intéressés à l'art comme outil de soins ? Ont-ils tous poursuivi le même but ?</strong></p>
<p>Il n'était pas question d'art ni de thérapie, mais à une époque lointaine, les hommes se servaient déjà de rituels de guérison : on en retrouve des traces dans la peinture préhistorique, mais aussi dans le théâtre grec antique, dans l'étude des rêves des chamans amérindiens ou encore dans les mandalas tibétains…</p>
<p>La société occidentale a progressivement occulté ces traditions, notamment durant le Siècle des Lumières, période d'affirmation du rationnel, de l'observation et de l'interprétation scientifiques, au détriment d'une certaine forme d'intériorité.</p>
<p><strong><span style="font-size: 14pt; color: #ff615d;">Le principe de diversion</span></strong><br /><em></em></p>
<p><em>« Le XIXe siècle asilaire »</em>, comme le nomme le psychiatre Jean-Pierre Klein <span style="font-size: 8pt;">(1)</span>, fait entrer l'art dans les <em>« maisons de santé »</em>. Le théâtre ou la musique, par exemple, sont prescrits comme <em>« dérivatif(s) pour le malade qui peut ainsi sortir de son apathie et de son repli au monde intérieur délirant et douloureux »</em>. C'est le <em>« principe de diversion »</em>.<br />Soit les patients participent – le vieux marquis de Sade montait des pièces mêlant comédiens professionnels, infirmiers et asilés – soit ils sont spectateurs de bals ou d'opéras.<em> « L'art en lui-même importe moins que la volonté par tous les moyens d'arracher la personne à la folie qui l'envahit,</em> écrit Jean-Pierre Klein.<em> Le piano y est proposé au même titre que le billard, la broderie ou les dominos. »</em></p>
<p><span></span><span style="color: #ff615d;"><strong><span style="font-size: 14pt;">L'ergothérapie</span></strong></span></p>
<p>C'est dans cet esprit de « diversion » que naît au XIXe siècle « l'occupational therapy » aux Etats-Unis, traduite en français par « thérapie de réadaptation », « ergothérapie ». <a href="http://www.rebonds.net/images/ART_THÉRAPIE/dessin_np_1.jpg" type="image/jpeg" class="jcepopup" data-mediabox-title="Dessin : Nathalie Patard." data-mediabox="1"><img src="http://www.rebonds.net/images/ART_THÉRAPIE/dessin_np_1.jpg" alt="dessin np 1" width="447" height="462" style="margin-left: 15px; border: 2px double #e2e2e2; float: right;" /></a><br />Il s'agit de soigner et de restaurer les capacités physiques et psychiques par le travail, l'activité, « l'occupationnel ». Les activités artistiques et artisanales sont souvent utilisées.</p>
<p>Parmi les praticiens à avoir développé ces thérapies en France, les psychiatres Philippe Pinel (1745-1826) et Jean-Etienne Esquirol (1772-1840).</p>
<p><span style="color: #ff615d;"><strong><span style="font-size: 14pt;">Le mouvement de l'expression</span></strong></span></p>
<p>Au XXe siècle, s'épanouit le mouvement de l'expression, porté notamment par le psychologue américain Carl Rogers (1902-1987), connu aussi pour son « approche centrée sur le patient » (Person Centered Approach) dénommée en France « méthode non-directive ». Il y affirme trois attitudes qui doivent fonder la relation patient / thérapeute : l'empathie, l'adaptation et le regard positif inconditionnel. La personne est acceptée telle quelle est, ici et maintenant. Dans ses ateliers d'expression, il s'agit d'accueillir ce qui vient sans porter de jugement et sans que le travail sur la production soit encouragée.<br />En France, un des héritiers de Carl Rogers est le psychosociologue Max Pagès (1926-2018).</p>
<p>S'ils ont récusé le terme d'art-thérapie pour définir leur démarche, ils ont contribué aux nombreux courants qui la traverse.<br />Pour Jean-Pierre Klein, la différence tient au fait que <em>« l'expression soulage mais la création, et la création suivie, transforme »</em>.</p>
<p><strong><span style="font-size: 14pt; color: #ff615d;">Le décryptage des oeuvres</span></strong></p>
<p>Un autre courant place l'art au coeur d'un processus de « conscientisation » grâce au décryptage des œuvres. Les productions des malades sont analysées pour y déceler des pathologies.<br />Ainsi, le neurologue Jean-Martin Charcot (1825-1893) utilise une grille psychiatrique pour déceler, dans des dessins ou des peintures, les signes de maladies de leurs auteurs.<br />A l'instar de Sigmund Freud, les psychanalystes utilisent la « pathographie », c'est-à-dire le décryptage d'une œuvre et sa mise en relation avec la biographie de l'auteur pour une analyse psychanalytique.<br />Dans « la psychopathologie de l'expression », c'est l'oeuvre elle-même qui est considérée comme un des symptômes. Un système complexe de codification est mis en place avec, par exemple, une typologie de formes, de couleurs, de polices qui caractériseraient telle maladie. Claude Wiart (1929-2004) est considéré comme le fondateur de cette codification <span style="font-size: 8pt;">(2)</span>.</p>
<p>Ces courants posent plusieurs problèmes : d'une part, à l'époque, la base du décryptage était l'académisme, donc tout « manquement » à cet académisme était considéré comme symptomatique d'une maladie ; d'autre part, ils ne prenaient pas en compte les projections personnelles de l'artiste, ni la relation entre le patient et le thérapeute, pourtant fondamentale.</p>
<p>Pour Jean-Pierre Klein, la différence entre l'art-thérapie et <em>« le décryptage psychologique de l'expression artistique »</em> se situe dans la temporalité : le décryptage s'intéresse au passé, à ce qui a été fait, il est rétrospectif et renvoie à la personne telle qu'elle a été ; l'art-thérapie <em>« s'intéresse au mouvement »</em>, à ce que va devenir l'oeuvre. Dans un processus de création, l'évolution de l'oeuvre et de son auteur sont imprévisibles ; le thérapeute ne peut s'arrêter à un instant donné.</p>
<p><strong><span style="font-size: 14pt; color: #ff615d;">L'art des « fous » et l'art brut</span></strong></p>
<p><a href="http://www.rebonds.net/images/ART_THÉRAPIE/dessin_np_2.jpg" type="image/jpeg" class="jcepopup" data-mediabox-title="Dessin : Nathalie Patard." data-mediabox="1"><img src="http://www.rebonds.net/images/ART_THÉRAPIE/dessin_np_2.jpg" alt="dessin np 2" width="515" height="403" style="margin-left: 15px; border: 2px double #e2e2e2; float: right;" /></a>Parmi les origines qui ont fondé l'art-thérapie, citons également l'art « des fous » puis l'art brut. Des artistes s'intéressent aux créations produites par des personnes internées en hôpital psychiatrique. C'est l'époque de <em>« la mythification du fou »</em> et de l'assimilation <em>« folie-génie » </em><span style="font-size: 8pt;">(1)</span>. Des collections sont constituées. Des livres sont publiés sur le sujet comme celui de Hanz Prinzhorn <span style="font-size: 8pt;">(3)</span>.<em></em><br />Viennent ensuite André Breton et les surréalistes, qui s'intéressent à l'expression de l'inconscient à travers la création artistique. Pour Jean-Pierre Klein,<em> « l'influence du surréalisme (et au-delà sur l'art-thérapie) se fait mieux percevoir dans l'oeuvre et l'engagement du psychiatre Lucien Bonnafé (4), qui parle de « désaliénisme ». »</em> <em>« Désaliéner, c'est protester contre les aspects répressifs de la psychiatrie, mais c'est aussi reconnaître la parole du fou comme parole humaine riche de sens. »</em> L'art-thérapie permet de mieux se saisir de cette parole.</p>
<p>Le peintre Jean Dubuffet s'est intéressé aux travaux de Prinzhorn et de Walter Morgenthaler <span style="font-size: 8pt;">(5)</span>, qui avait réuni dans sa clinique près de Bern, les œuvres d'Adolf Wölfli <span style="font-size: 8pt;">(6)</span>. C'est Jean Dubuffet qui a réuni sous le vocable « art brut » les créations artistiques issues de personnes éloignées des canons culturels du fait d'un internement, d'un emprisonnement, d'une marginalité sociale. Les matériaux utilisés sont sobres. L'auteur est indifférent au marché de l'art,<em> « le créateur étant le seul destinataire de son oeuvre »</em><span style="font-size: 8pt;"> (1)</span>.</p>
<p>S'il peut avoir des retombées bénéfiques sur l'état psychologique de l'artiste, l'art brut n'a pas cette fonction première. Il ne peut donc être considéré comme art-thérapie. En revanche, ses influences sont indéniables, notamment quant au regard porté sur les créateurs considérés comme « fous ».</p>
<p><strong><span style="font-size: 14pt; color: #ff615d;">La psychiatrie infanto-juvénile<br /></span></strong></p>
<p>Autre origine de l'art-thérapie actuelle : la psychiatrie de l'enfant. Une spécialité récente qui regroupe des pratiques très diverses, mais qui obligent à réinventer sans cesse les formes de la rencontre entre le thérapeute et le patient, les méthodes, les matières… <em>« Le langage verbal introspectif s'avère souvent secondaire, voire impossible,</em> souligne Jean-Pierre Klein, <em>et l'on doit faire appel à la fiction (contes) ou aux langages non verbaux (plastiques, sonores, corporels, etc.). »</em><br />Ainsi, la psychothérapie de l'enfant fait souvent appel à la métaphorisation, notamment par le dessin. Dans une psychothérapie « classique », le thérapeute analysera les représentations en direct ou symbolisées ; il pourra échanger avec l'enfant sur l'interprétation de ces représentations.<br />En art-thérapie, le praticien encouragera l'enfant à développer sa fiction, lui permettra de la faire évoluer : par exemple, en le laissant faire grandir ses personnages ou disparaître les monstres… Cet accompagnement ne vise pas à obtenir des résultats rapides, comme la disparition d'un symptôme. Il s'agit plutôt d'un <em>« parcours symbolique faisant résolution des difficultés de la personne à travers des difficultés rencontrées dans la création, ce qui est le propre de l'art-thérapie »</em> <span style="font-size: 8pt;">(1)</span>.</p>
<p><strong><span style="font-size: 14pt; color: #ff615d;">La contribution d'Arno Stern<br /></span></strong></p>
<p>Arno Stern <span style="font-size: 8pt;">(7)</span> n'est pas psychiatre mais pédagogue, fondateur de l'institut de recherche en sémiologie de l'expression (l'étude des signes linguistiques verbaux et non verbaux). Il a marqué l'art-thérapie, notamment en peinture, en imaginant le Closlieu, espace idéal pour un atelier d'expression libre, et des outils tels que la table-palette (<em>lire aussi la rubrique (Ré)acteurs</em>) et le jeu de peindre.<br />Ses préceptes ont été étendus et s'adressent aussi, désormais, aux adultes.</p>
<p><strong><span style="font-size: 14pt; color: #ff615d;">Aujourd'hui<br /></span></strong></p>
<p>L'art-thérapie comprend différents mouvements qui cohabitent. Toutefois, ils tendent vers un objectif commun : permettre au participant de créer des mises en formes imaginaires de lui-même (dessin, peinture, mise en scène théâtrale, danse, marionnettes…), <em>« des déclinaisons de son identité à travers des formes artistiques dans un parcours de créations qui provoquent peu à peu (s)a transformation »</em>.</p>
<p><br /><span style="font-size: 8pt;">(1) Jean-Pierre Klein, « L'art-thérapie », PUF, 2012.<br />(2) Claude Wiart est le fondateur de la Société française de psychopathologie de l'expression et d'art-thérapie : <a href="https://www.sfpe-art-therapie.fr/Petite-histoire-pour-la-grande-histoire_a32.html">https://www.sfpe-art-therapie.fr/Petite-histoire-pour-la-grande-histoire_a32.html</a><br />(3) Hanz Prinzhorn, (1886-1933), « Les œuvres plastiques des malades mentaux. Contribution à la psychologie et à la psychopathologie de la mise en forme ».<br />(4) Lucien Bonnafé, (1912-2003).<br />(5) Walter Morgenthaler, (1882-1965).<br />(6) Adolf Wölfli, (1864-1930) : <a href="https://www.artbrut.ch/fr_CH/auteur/woelfli-adolf">https://www.artbrut.ch/fr_CH/auteur/woelfli-adolf</a><br />(7) Arno Stern (1924) : <a href="https://www.arnostern.com/fr/">https://www.arnostern.com/fr/</a></span></p>
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<div class="panel panel-primary">
<div class="panel-heading">
<h3 class="panel-title">Lire aussi</h3>
</div>
<ul>
<li>Chantal Higy-Lang et Charles Gellman, « La Gestalt-thérapie », éditions Eyrolles, 2018.</li>
<li>Alain Dikann, « L'art-thérapie pour les nuls », éditions First, 2015.</li>
<li>Anne-Marie Dubois et Corinne Montchanin, « Art-thérapie et enfance – contextes, principes et dispositifs », éditions Elsevier-Masson, 2015.</li>
<li>Jean-Pierre Klein, « Initiation à l'art-thérapie, découvrez-vous artiste de votre vie », éditions Marabout, 2014.</li>
<li>Jean-Marie Barthélémy, « De la pathographie à l'approche phénoméno-structurale en psychopathologie et psychologie de l'expression » : <a href="https://www.sfpe-art-therapie.fr/docs/27.pdf">https://www.sfpe-art-therapie.fr/docs/27.pdf</a></li>
</ul>
</div>La médiation animale2017-03-21T13:37:42+01:002017-03-21T13:37:42+01:00http://www.rebonds.net/22destherapiesenmouvement/487-lamediationanimaleSuper User<p><strong>C'est une autre forme de thérapie qui permet aux personnes en souffrance de se sentir mieux, de s'évader, d'augmenter leurs capacités : la médiation animale se développe au sein d'établissements spécialisés mais aussi d'associations, qui proposent des activités avec des chiens, des chats, des chevaux. C'est le cas d'Handi Equus dans le Cher.</strong></p>
<p><strong> </strong></p>
<p>Un visage au teint de lait encadré par des boucles blondes, un regard droit derrière de petites lunettes rondes et un sourire éclatant… C'est l'une des plus belles images qui me vient à l'esprit lorsque je pense à ma nièce Auriane. Agée de 15 ans, elle est atteinte du syndrome de Rett, une maladie génétique entrainant un polyhandicap sévère <span style="font-size: 8pt;">(1)</span> : Auriane ne parle pas, ne marche pas seule, ne peut réaliser aucun acte de la vie quotidienne sans aide. Parfois, elle s'échappe dans un univers inaccessible, ce que j'appelle en moi-même sa « bulle » parce que j'espère cet univers doux et léger, protecteur, indolore… Pour celui ou celle qui ne la cotoie pas au jour le jour, il peut alors être difficile de reconnecter son regard, son attention à notre monde.<br />Mais dans ce souvenir, qui est une photographie envoyée par ma sœur, elle semble non seulement connectée au monde – son regard va droit à l'objectif – mais aussi à elle même. Elle n'est pas seule : son corps se prolonge dans celui d'un poney. Depuis plusieurs années, elle pratique l'équithérapie un trimestre par an, à raison d'une fois par semaine.<br />Fort heureusement, ce n'est pas la seule occasion qu'il nous ait été donnée de voir Auriane sourire ainsi ! Mais parmi les activités proposées par le centre spécialisé qui l'accueille le jour, la médiation par l'animal lui plaît particulièrement et a marqué durablement la famille.<br />Pour ma part, c'est ainsi que j'ai découvert cette forme d'activité et de thérapie. Quelques années plus tard, j'ai réalisé un reportage sur une association entrant dans les maisons de retraite avec des chiens et des chats. Les effets des échanges entre les personnes et les animaux – notamment les personnes atteintes de démence et les chiens – m'avaient stupéfaite.</p>
<p><span style="color: #ff615d; font-size: 14pt;"><strong>Handi Equus<br /></strong></span></p>
<p>A 500 kilomètres d'Auriane, Humbligny, dans le Cher. En ce samedi après-midi de février, le vent souffle, glacial, sur le centre équestre de la Métairie des Vignes. De jeunes cavalières peinent à quitter la chaleur du club house. Sophie Gérard et Christelle Sanchez m'y accueillent autour d'un café. Toutes deux font partie de l'association Handi Equus, qui propose une activité assistée par l'animal, en l'occurence ici le poney et le cheval.<a href="http://www.rebonds.net/images/ART_THÉRAPIE/médiation_animale_2.JPG" class="jcepopup" data-mediabox-title="Estelle et Sophie aident Amélie à s'installer sur Gold." data-mediabox="1"><img src="http://www.rebonds.net/images/ART_THÉRAPIE/médiation_animale_2.JPG" alt="médiation animale 2" width="336" height="443" style="margin-left: 15px; border: 2px double #e2e2e2; float: right;" /></a><em></em><br /><em>« L'association a été créée en mai 2009 au sein du centre équestre par Evelyne Cartron, psychomotricienne et cavalière,</em> raconte Sophie Gérard. <em>Elle amenait ici les enfants de l'IME (Institut Médico Educatif) où elle travaillait. Des amies cavalières, comme nous, l'ont rejoint bénévolement. Nous n'avons pas reçu de formation spécifique mais nous sommes guidées par elle et par les parents. »</em></p>
<p><span style="color: #ff615d; font-size: 14pt;"><strong>Thérapie et / ou activité assistée.s par l'animal</strong></span></p>
<p>La médiation par l'animal prend deux formes distinctes : la thérapie assistée par l'animal, portée par un professionnel médical, paramédical ou social ; l'activité assistée par l'animal, qui peut être le fait d'une équipe de bénévoles spécialisés dans un domaine comme, par exemple, l'équitation.</p>
<p>Dans le premier cas, un diagnostic est posé, des objectifs d'évolution sont définis, un médiateur est choisi, des grilles d'observation et d'évaluation permettent d'affiner la thérapie. Dans le second cas, il s'agit d'offrir une activité adaptée à des personnes avec des difficultés physiques, mentales, sociales…<br />Dans les deux cas, les bienfaits du contact avec l'animal sont indéniables : il favorise l'apaisement et diminue le stress, il permet de supporter des émotions fortes, il déclenche l'envie de jouer et de rire… Il augmente le sentiment de responsabilité et, dans les établissements, il facilite les échanges entre les personnes, résidentes, malades, les familles, les personnels soignants…</p>
<p><span style="color: #ff615d; font-size: 14pt;"><strong>L'animal, « catalyseur social »<br /></strong></span></p>
<p>Comment s'est-on rendu compte de ces effets ? Par des intuitions, des observations, des expérimentations…<br />Ainsi, celles de l'homme d'affaires et quaker William Tuke qui, choqué des traitements violents imposés aux malades mentaux en Angleterre, fonda l'Institute York Retreat en 1796 et y introduisit des animaux pour apaiser les patients.<br />Ou encore celles du psychologue pour enfants Boris Levinson qui, à la fin des années 1950, publia les premiers écrits consacrés entièrement aux effets bénéfiques des animaux sur l’homme. Il fut le premier à parler de « catalyseur social » à propos de l'animal, qui joue le rôle de facilitateur des interactions entre les individus. Il s'aperçut par hasard que la présence de son chien ouvrait des portes entre ses patients et lui, ses jeunes patients se sentant apaisés, en confiance. De plus, avant l'âge de 6 ans, l'enfant considère l'animal comme son égal : il est persuadé qu'il agit et raisonne comme lui, ce qui constitue un espace intéressant de projection pour un thérapeute.<br />Citons également le français Ange Condoret, vétérinaire qui, en 1976, mena une expérience avec des enfants souffrant de problèmes de langage. En 1978, il établit une méthode appelée Intervention Animale Modulée Précoce (IAMP) : le but était de favoriser la communication non verbale chez des enfants de maternelle qui avaient des troubles de la communication, en les mettant en contact avec différents animaux.</p>
<p><span style="color: #ff615d; font-size: 14pt;"><strong>Des bénéficiaires variés<br /></strong></span></p>
<p>Considérée d'abord avec circonspection par le milieu médical et scientifique (il est encore difficile d'expliquer pourquoi les animaux ont certains comportements ou effets sur des personnes malades), la médiation animale est progressivement entrée dans les établissements de soins, les hôpitaux, mais aussi des écoles ou des centres pénitentiaires. Ainsi, les bénéficiaires peuvent être des enfants, des personnes âgées, des personnes handicapées physiques et / ou mentales, des personnes en conflit avec leurs familles, des prisonniers…<a href="http://www.rebonds.net/images/ART_THÉRAPIE/médiation_animale_1.JPG" class="jcepopup" data-mediabox-title="Sophie lancent des défis à Amélie : ici, fermer les yeux et garder l'équilibre." data-mediabox="1"><img src="http://www.rebonds.net/images/ART_THÉRAPIE/médiation_animale_1.JPG" alt="médiation animale 1" width="418" height="365" style="margin-left: 15px; border: 2px double #e2e2e2; float: right;" /></a></p>
<p>A Humbligny, ce sont essentiellement des personnes porteuses de handicaps qui sont accueillies par Handi Equus. Elles peuvent faire partie d'établissements spécialisés ou venir individuellement.<br /><em>« Au départ, nous nous entretenons avec les parents pour connaître les besoins de l'enfant et définir le niveau d'accompagnement,</em> explique Sophie Gérard. <em>Ensuite, nous proposons un poney qui semble correspondre à l'enfant. Lors de la séance, nous commençons par le pansage et enfin, l'enfant monte... ou pas. Mais souvent, il veut monter directement ! »</em> La séance dure une heure.<br />Si le handicap le nécessite, un double portage est proposé : un adulte monte derrière l'enfant, afin de le mettre en confiance ou de lui permettre de se tenir.</p>
<p><span style="font-size: 14pt; color: #ff615d;"><strong>Des animaux qui semblent « savoir »...</strong></span></p>
<p>Cet après-midi là, Lucille et Amélie se retrouvent dans le manège couvert. Chaudement habillées, casquées, gantées, les petites filles préparent leurs montures, respectivement Sami et Gold, avant de grimper sur leurs dos. Sophie Gérard et Christelle Sanchez les accompagnent. Les parents peuvent assister à la séance. <em>« Ils voient parfois leurs enfants avec un autre regard,</em> souligne Sophie Gérard. <em>Les enfants s'épanouissent et du coup, les adultes aussi. »</em> Elle se souvient d'un garçon autiste qui s'est réellement ouvert au contact de l'animal ou encore d'un jeune trisomique avec qui elle s'est beaucoup amusée.</p>
<p>Amélie est de celles que l'activité fait rire. Agée de 10 ans et demi, elle est atteinte de la myopathie de Duchenne, une maladie génétique provoquant une dégénérescence progressive des muscles. <em>« Elle vient ici depuis trois ans,</em> explique sa maman, Estelle <span style="font-size: 8pt;">(2)</span>. <em>On a connu l'activité par le bouche-à-oreille. Au départ, le but était qu'Amélie puisse pratiquer un sport. Elle n'a jamais eu peur et on sent que l'animal réagit d'une certaine manière. »</em><br />Christelle Sanchez confirme : <em>« Un des poneys est un peu fougueux avec les autres. Mais dès que les enfants atteints de handicaps l'approche, il est calme, il n'y a pas de problème. »</em> Les poneys ne sont pas particulièrement formés et pourtant, ils semblent « savoir »…<a href="http://www.rebonds.net/images/ART_THÉRAPIE/médiation_animale_3.JPG" class="jcepopup" data-mediabox-title="A la fin de la séance, les fillettes récompensent leurs poneys." data-mediabox="1"><img src="http://www.rebonds.net/images/ART_THÉRAPIE/médiation_animale_3.JPG" alt="médiation animale 3" width="512" height="321" style="margin-left: 15px; border: 2px double #e2e2e2; float: right;" /></a></p>
<p><span style="font-size: 14pt;"><strong><span style="color: #ff615d;">Quels effets sur les capacités physiques et psychiques ?</span></strong></span></p>
<p>Dans le manège, Sophie et Christelle enchaînent les jeux et exercices pour stimuler l'attention et le plaisir des deux fillettes. Comme toute médiation animale, la pratique de l'équitation peut avoir un effet sur les capacités motrices (comme la coordination des membres, la posture, l'adresse, par exemple), mais aussi sensorielles, cognitives (comme le repérage dans l'espace-temps, la compréhension, l'assimilation) et psycho-affectives (l'estime de soi, la communication, l'attention, la concentration, l'émotion)…<br />Une fois redescendues de leurs montures, Lucille et Amélie doivent aider à ranger le matériel et accompagner les poneys jusqu'à leur lieu de repos. Un temps de soins, de responsabilisation et d'au revoir.</p>
<p>En les quittant, je m'interroge sur ce lien que l'Homme n'a cessé de créer, tout au long de son histoire, avec l'Animal. Un lien constitué tour à tour de domination, d'exploitation, de coopération, d'affection… A quel point l'Homme considère-t-il l'Animal comme un « outil » ? Au point de le placer au coeur d'une thérapie ? Tous les professionnels qui s'expriment sur le sujet sont clairs : l'animal n'a pas vocation à guérir. Mais la relation affective qui le lie à l'être humain peut constituer une clé pour libérer des esprits, des corps, des énergies en souffrance, et les reconnecter à eux-mêmes et au monde.</p>
<p><strong>Fanny Lancelin</strong></p>
<p><span style="font-size: 8pt;">(1) Association française du syndrome de Rett : <a href="https://afsr.fr/">https://afsr.fr/</a><br />(2) Estelle a créé l'association AMELIE, Affronter la Maladie de nos Enfants et Lutter pour leur Intégration en gardant l'Espoir. Elle est basée à Vignoux-sous-les-Aix, dans le Cher. Plus d'informations : <a href="http://www.vignouxsouslesaix.fr/fr/information/57143/a-m-e-l-i-e">http://www.vignouxsouslesaix.fr/fr/information/57143/a-m-e-l-i-e</a></span></p>
<p> </p>
<div class="panel panel-primary">
<div class="panel-heading">
<h3 class="panel-title">Appel</h3>
</div>
<ul>
<li>L'association Handi Equus est à la recherche de bénévoles pouvant renforcer l'équipe existante. Actuellement soutenue par le Conseil départemental et la mairie d'Humbligny, elle souhaite également diversifier ses financements en faisant appel à des partenaires privés, notamment pour couvrir les charges inhérentes à la pension, la nourriture et le soin des animaux.<br />Plus d'informations sur <a href="http://handi-equus.over-blog.com">http://handi-equus.over-blog.com</a> <br />Contact : <a href="mailto:handiequus@gmail.fr">handiequus@gmail.fr</a></li>
</ul>
</div><p><strong>C'est une autre forme de thérapie qui permet aux personnes en souffrance de se sentir mieux, de s'évader, d'augmenter leurs capacités : la médiation animale se développe au sein d'établissements spécialisés mais aussi d'associations, qui proposent des activités avec des chiens, des chats, des chevaux. C'est le cas d'Handi Equus dans le Cher.</strong></p>
<p><strong> </strong></p>
<p>Un visage au teint de lait encadré par des boucles blondes, un regard droit derrière de petites lunettes rondes et un sourire éclatant… C'est l'une des plus belles images qui me vient à l'esprit lorsque je pense à ma nièce Auriane. Agée de 15 ans, elle est atteinte du syndrome de Rett, une maladie génétique entrainant un polyhandicap sévère <span style="font-size: 8pt;">(1)</span> : Auriane ne parle pas, ne marche pas seule, ne peut réaliser aucun acte de la vie quotidienne sans aide. Parfois, elle s'échappe dans un univers inaccessible, ce que j'appelle en moi-même sa « bulle » parce que j'espère cet univers doux et léger, protecteur, indolore… Pour celui ou celle qui ne la cotoie pas au jour le jour, il peut alors être difficile de reconnecter son regard, son attention à notre monde.<br />Mais dans ce souvenir, qui est une photographie envoyée par ma sœur, elle semble non seulement connectée au monde – son regard va droit à l'objectif – mais aussi à elle même. Elle n'est pas seule : son corps se prolonge dans celui d'un poney. Depuis plusieurs années, elle pratique l'équithérapie un trimestre par an, à raison d'une fois par semaine.<br />Fort heureusement, ce n'est pas la seule occasion qu'il nous ait été donnée de voir Auriane sourire ainsi ! Mais parmi les activités proposées par le centre spécialisé qui l'accueille le jour, la médiation par l'animal lui plaît particulièrement et a marqué durablement la famille.<br />Pour ma part, c'est ainsi que j'ai découvert cette forme d'activité et de thérapie. Quelques années plus tard, j'ai réalisé un reportage sur une association entrant dans les maisons de retraite avec des chiens et des chats. Les effets des échanges entre les personnes et les animaux – notamment les personnes atteintes de démence et les chiens – m'avaient stupéfaite.</p>
<p><span style="color: #ff615d; font-size: 14pt;"><strong>Handi Equus<br /></strong></span></p>
<p>A 500 kilomètres d'Auriane, Humbligny, dans le Cher. En ce samedi après-midi de février, le vent souffle, glacial, sur le centre équestre de la Métairie des Vignes. De jeunes cavalières peinent à quitter la chaleur du club house. Sophie Gérard et Christelle Sanchez m'y accueillent autour d'un café. Toutes deux font partie de l'association Handi Equus, qui propose une activité assistée par l'animal, en l'occurence ici le poney et le cheval.<a href="http://www.rebonds.net/images/ART_THÉRAPIE/médiation_animale_2.JPG" class="jcepopup" data-mediabox-title="Estelle et Sophie aident Amélie à s'installer sur Gold." data-mediabox="1"><img src="http://www.rebonds.net/images/ART_THÉRAPIE/médiation_animale_2.JPG" alt="médiation animale 2" width="336" height="443" style="margin-left: 15px; border: 2px double #e2e2e2; float: right;" /></a><em></em><br /><em>« L'association a été créée en mai 2009 au sein du centre équestre par Evelyne Cartron, psychomotricienne et cavalière,</em> raconte Sophie Gérard. <em>Elle amenait ici les enfants de l'IME (Institut Médico Educatif) où elle travaillait. Des amies cavalières, comme nous, l'ont rejoint bénévolement. Nous n'avons pas reçu de formation spécifique mais nous sommes guidées par elle et par les parents. »</em></p>
<p><span style="color: #ff615d; font-size: 14pt;"><strong>Thérapie et / ou activité assistée.s par l'animal</strong></span></p>
<p>La médiation par l'animal prend deux formes distinctes : la thérapie assistée par l'animal, portée par un professionnel médical, paramédical ou social ; l'activité assistée par l'animal, qui peut être le fait d'une équipe de bénévoles spécialisés dans un domaine comme, par exemple, l'équitation.</p>
<p>Dans le premier cas, un diagnostic est posé, des objectifs d'évolution sont définis, un médiateur est choisi, des grilles d'observation et d'évaluation permettent d'affiner la thérapie. Dans le second cas, il s'agit d'offrir une activité adaptée à des personnes avec des difficultés physiques, mentales, sociales…<br />Dans les deux cas, les bienfaits du contact avec l'animal sont indéniables : il favorise l'apaisement et diminue le stress, il permet de supporter des émotions fortes, il déclenche l'envie de jouer et de rire… Il augmente le sentiment de responsabilité et, dans les établissements, il facilite les échanges entre les personnes, résidentes, malades, les familles, les personnels soignants…</p>
<p><span style="color: #ff615d; font-size: 14pt;"><strong>L'animal, « catalyseur social »<br /></strong></span></p>
<p>Comment s'est-on rendu compte de ces effets ? Par des intuitions, des observations, des expérimentations…<br />Ainsi, celles de l'homme d'affaires et quaker William Tuke qui, choqué des traitements violents imposés aux malades mentaux en Angleterre, fonda l'Institute York Retreat en 1796 et y introduisit des animaux pour apaiser les patients.<br />Ou encore celles du psychologue pour enfants Boris Levinson qui, à la fin des années 1950, publia les premiers écrits consacrés entièrement aux effets bénéfiques des animaux sur l’homme. Il fut le premier à parler de « catalyseur social » à propos de l'animal, qui joue le rôle de facilitateur des interactions entre les individus. Il s'aperçut par hasard que la présence de son chien ouvrait des portes entre ses patients et lui, ses jeunes patients se sentant apaisés, en confiance. De plus, avant l'âge de 6 ans, l'enfant considère l'animal comme son égal : il est persuadé qu'il agit et raisonne comme lui, ce qui constitue un espace intéressant de projection pour un thérapeute.<br />Citons également le français Ange Condoret, vétérinaire qui, en 1976, mena une expérience avec des enfants souffrant de problèmes de langage. En 1978, il établit une méthode appelée Intervention Animale Modulée Précoce (IAMP) : le but était de favoriser la communication non verbale chez des enfants de maternelle qui avaient des troubles de la communication, en les mettant en contact avec différents animaux.</p>
<p><span style="color: #ff615d; font-size: 14pt;"><strong>Des bénéficiaires variés<br /></strong></span></p>
<p>Considérée d'abord avec circonspection par le milieu médical et scientifique (il est encore difficile d'expliquer pourquoi les animaux ont certains comportements ou effets sur des personnes malades), la médiation animale est progressivement entrée dans les établissements de soins, les hôpitaux, mais aussi des écoles ou des centres pénitentiaires. Ainsi, les bénéficiaires peuvent être des enfants, des personnes âgées, des personnes handicapées physiques et / ou mentales, des personnes en conflit avec leurs familles, des prisonniers…<a href="http://www.rebonds.net/images/ART_THÉRAPIE/médiation_animale_1.JPG" class="jcepopup" data-mediabox-title="Sophie lancent des défis à Amélie : ici, fermer les yeux et garder l'équilibre." data-mediabox="1"><img src="http://www.rebonds.net/images/ART_THÉRAPIE/médiation_animale_1.JPG" alt="médiation animale 1" width="418" height="365" style="margin-left: 15px; border: 2px double #e2e2e2; float: right;" /></a></p>
<p>A Humbligny, ce sont essentiellement des personnes porteuses de handicaps qui sont accueillies par Handi Equus. Elles peuvent faire partie d'établissements spécialisés ou venir individuellement.<br /><em>« Au départ, nous nous entretenons avec les parents pour connaître les besoins de l'enfant et définir le niveau d'accompagnement,</em> explique Sophie Gérard. <em>Ensuite, nous proposons un poney qui semble correspondre à l'enfant. Lors de la séance, nous commençons par le pansage et enfin, l'enfant monte... ou pas. Mais souvent, il veut monter directement ! »</em> La séance dure une heure.<br />Si le handicap le nécessite, un double portage est proposé : un adulte monte derrière l'enfant, afin de le mettre en confiance ou de lui permettre de se tenir.</p>
<p><span style="font-size: 14pt; color: #ff615d;"><strong>Des animaux qui semblent « savoir »...</strong></span></p>
<p>Cet après-midi là, Lucille et Amélie se retrouvent dans le manège couvert. Chaudement habillées, casquées, gantées, les petites filles préparent leurs montures, respectivement Sami et Gold, avant de grimper sur leurs dos. Sophie Gérard et Christelle Sanchez les accompagnent. Les parents peuvent assister à la séance. <em>« Ils voient parfois leurs enfants avec un autre regard,</em> souligne Sophie Gérard. <em>Les enfants s'épanouissent et du coup, les adultes aussi. »</em> Elle se souvient d'un garçon autiste qui s'est réellement ouvert au contact de l'animal ou encore d'un jeune trisomique avec qui elle s'est beaucoup amusée.</p>
<p>Amélie est de celles que l'activité fait rire. Agée de 10 ans et demi, elle est atteinte de la myopathie de Duchenne, une maladie génétique provoquant une dégénérescence progressive des muscles. <em>« Elle vient ici depuis trois ans,</em> explique sa maman, Estelle <span style="font-size: 8pt;">(2)</span>. <em>On a connu l'activité par le bouche-à-oreille. Au départ, le but était qu'Amélie puisse pratiquer un sport. Elle n'a jamais eu peur et on sent que l'animal réagit d'une certaine manière. »</em><br />Christelle Sanchez confirme : <em>« Un des poneys est un peu fougueux avec les autres. Mais dès que les enfants atteints de handicaps l'approche, il est calme, il n'y a pas de problème. »</em> Les poneys ne sont pas particulièrement formés et pourtant, ils semblent « savoir »…<a href="http://www.rebonds.net/images/ART_THÉRAPIE/médiation_animale_3.JPG" class="jcepopup" data-mediabox-title="A la fin de la séance, les fillettes récompensent leurs poneys." data-mediabox="1"><img src="http://www.rebonds.net/images/ART_THÉRAPIE/médiation_animale_3.JPG" alt="médiation animale 3" width="512" height="321" style="margin-left: 15px; border: 2px double #e2e2e2; float: right;" /></a></p>
<p><span style="font-size: 14pt;"><strong><span style="color: #ff615d;">Quels effets sur les capacités physiques et psychiques ?</span></strong></span></p>
<p>Dans le manège, Sophie et Christelle enchaînent les jeux et exercices pour stimuler l'attention et le plaisir des deux fillettes. Comme toute médiation animale, la pratique de l'équitation peut avoir un effet sur les capacités motrices (comme la coordination des membres, la posture, l'adresse, par exemple), mais aussi sensorielles, cognitives (comme le repérage dans l'espace-temps, la compréhension, l'assimilation) et psycho-affectives (l'estime de soi, la communication, l'attention, la concentration, l'émotion)…<br />Une fois redescendues de leurs montures, Lucille et Amélie doivent aider à ranger le matériel et accompagner les poneys jusqu'à leur lieu de repos. Un temps de soins, de responsabilisation et d'au revoir.</p>
<p>En les quittant, je m'interroge sur ce lien que l'Homme n'a cessé de créer, tout au long de son histoire, avec l'Animal. Un lien constitué tour à tour de domination, d'exploitation, de coopération, d'affection… A quel point l'Homme considère-t-il l'Animal comme un « outil » ? Au point de le placer au coeur d'une thérapie ? Tous les professionnels qui s'expriment sur le sujet sont clairs : l'animal n'a pas vocation à guérir. Mais la relation affective qui le lie à l'être humain peut constituer une clé pour libérer des esprits, des corps, des énergies en souffrance, et les reconnecter à eux-mêmes et au monde.</p>
<p><strong>Fanny Lancelin</strong></p>
<p><span style="font-size: 8pt;">(1) Association française du syndrome de Rett : <a href="https://afsr.fr/">https://afsr.fr/</a><br />(2) Estelle a créé l'association AMELIE, Affronter la Maladie de nos Enfants et Lutter pour leur Intégration en gardant l'Espoir. Elle est basée à Vignoux-sous-les-Aix, dans le Cher. Plus d'informations : <a href="http://www.vignouxsouslesaix.fr/fr/information/57143/a-m-e-l-i-e">http://www.vignouxsouslesaix.fr/fr/information/57143/a-m-e-l-i-e</a></span></p>
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<h3 class="panel-title">Appel</h3>
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<li>L'association Handi Equus est à la recherche de bénévoles pouvant renforcer l'équipe existante. Actuellement soutenue par le Conseil départemental et la mairie d'Humbligny, elle souhaite également diversifier ses financements en faisant appel à des partenaires privés, notamment pour couvrir les charges inhérentes à la pension, la nourriture et le soin des animaux.<br />Plus d'informations sur <a href="http://handi-equus.over-blog.com">http://handi-equus.over-blog.com</a> <br />Contact : <a href="mailto:handiequus@gmail.fr">handiequus@gmail.fr</a></li>
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</div>L'art-thérapeute : un guide vers notre force de vie2017-03-21T12:54:42+01:002017-03-21T12:54:42+01:00http://www.rebonds.net/22destherapiesenmouvement/488-lartherapeuteunguideversnotreforcedevieSuper User<p style="text-align: right;"><strong><em><span style="color: #000000;"><em></em>« C'est en tant que créateur, si humble que soit le niveau où cette création se consomme, qu'un homme quel qu'il soit peut se reconnaître libre. »</span></em></strong></p>
<p style="text-align: right;"><strong><em><span style="color: #000000;">Gabriel Marcel<br /></span></em></strong></p>
<p><span style="font-size: 18pt;">J'</span>'ai pris le bleu. Et je laisse le pinceau esquisser des formes que je ne reconnais pas. Mes gestes sont répétitifs et pourtant, chacun d'eux est unique. Il me semble que je pourrais rester ainsi, dans ce mouvement, durant des heures.</p>
<p>Mon regard se voile, comme lorsqu'on « rêve » éveillé : je ne vois plus vraiment les points bleus peints par mon pinceau. Je ne sens que la lègère pression de mes doigts sur le petit manche en bois, prolongement de mon corps entrant en contact avec le papier.<br /><em>« Je n'ai jamais peint »</em>, pensai-je. Vraiment ? Comment est-ce possible, à mon âge, de n'avoir jamais peint ? Une image d'un morceau de pomme de terre coupée en frite, une extrêmité trempée de peinture – bleue, elle aussi – arrive à mon esprit. Ah. Oui, sans doute à la maternelle ! Je sais que pour que l'expérience que je suis en train de vivre fonctionne, il me faut éviter de m'accrocher aux idées qui me traversent. Je laisse passer celle-ci. <em>« Ça semble plus facile que lorsque je tente de méditer, assise en tailleur »</em>, pensai-je toutefois à nouveau. Et le pinceau de poursuivre sa danse sur le papier... <a href="http://www.rebonds.net/images/ART_THÉRAPIE/peinture_intuitive.JPG" class="jcepopup" data-mediabox-title="Le "résultat" de ma séance de peinture intuitive." data-mediabox="1"><img src="http://www.rebonds.net/images/ART_THÉRAPIE/peinture_intuitive.JPG" alt="peinture intuitive" width="459" height="400" style="margin-left: 15px; border: 2px double #e2e2e2; float: right;" /></a></p>
<p>Ce que je suis en train de vivre est un atelier de peinture intuitive, l'un des outils de l'art-thérapie. Et, plus précisément ici, d'art-thérapie spirituelle.<br />Depuis ma rencontre avec un gériatre, il y a quelques années à Sancerre, qui m'avait affirmé que la musicothérapie lui permettait de réduire la médication sur les personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer, je m'intéresse à ces démarches qui offrent aux patients de devenir créateurs, dans leur processus de transformation. Aux patients ? A chacun.e d'entre nous, en fait, qui devons faire avec les chocs émotionnels, les ruptures, les accidents, les maladies, les pathologies…<br />Malheureusement, le musicothérapeute a quitté le centre hospitalier de Sancerre et n'a pas été remplacé. Mais, dans le Cher, j'ai pu rencontrer d'autres art-thérapeutes qui m'ont généreusement ouvert les portes de leurs ateliers, de leurs maisons, de leurs univers. Ils sont d'abord des artistes : ils pratiquent un instrument, chantent, dessinent, peignent, dansent, font de la céramique… Et parce qu'ils connaissent ce qui se joue dans le processus de création, ils peuvent accompagner des personnes dans leur cheminement <em>« de l'ancien vers le nouveau »</em>, comme le souligne Pauline Duchez.</p>
<p><span style="color: #fc615d;">_____________________________________________________________</span></p>
<h3>Pauline Duchez : l'art-thérapie spirituelle</h3>
<p><span style="color: #fc615d;">_____________________________________________________________</span><br /><br /><strong>Mardi 5 février 2019 – 15 heures – Henrichemont</strong></p>
<p>Le soleil éclabousse la fenêtre et réchauffe le côté droit de mon corps, celui qui souffre, souvent. Je savoure ce présent. Je suis assise près de Pauline Duchez, dans un vieil appartement presque vide, au parquet de bois grinçant. Nous avons les yeux clos. J'écoute sa voix douce.<br />L'atelier de peinture intuitive commence par un temps de relaxation, qui peut aller jusqu'à la méditation si les participants y sont favorables. Il s'agit de prendre conscience des parties de son corps pour y apaiser les tensions et pour les rendre disponibles à ce qui va suivre. De profondes respirations rythment cette exploration mentale, des pieds jusqu'au sommet de la tête. Lorsque j'ouvre les yeux, je me sens parfaitement détendue, sans appréhension.</p>
<p>Pauline Duchez punaise deux feuilles blanches sur un des murs de l'atelier, à hauteur des yeux, pour les deux participantes du jour. Face au mur, une « table-palette »<span style="font-size: 8pt;"> (1)</span> : sur une table, sont posés des pots en verre, translucides, à moitié remplis de peinture et placés de telle sorte qu'ils forment un nuancier de couleurs. A leurs côtés, deux pinceaux et un verre d'eau. La mise en scène est précise. Les consignes aussi : nous devons nous placer face à la table-palette et, spontanément, choisir une couleur ; tremper le pinceau dans l'eau, puis à moitié dans la peinture ; s'avancer vers notre feuille blanche, respirer ; poser le pinceau et <em>« laisser faire </em>». Quoi ? Je pressens que la question est inutile. Laisser faire.<br />Je prends d'abord du orange. Mais finalement, il aurait pu s'agir de n'importe quelle couleur car ce qui me fascine immédiatement, c'est le mouvement du pinceau, la manière dont il tourne, agit sur la peinture, provoque des effets. Je reste longtemps, je crois, à l'observer bouger sur la feuille. Avant de prendre le bleu… de laisser me traverser quelques idées… puis, sur le vert, une musique arrive à mon esprit… « An Arz »… du mauve et une concentration plus intense encore, des sensations de mouvement agréables…</p>
<p><span style="font-size: 14pt;"><strong><span style="color: #ff615d;">Prendre conscience des ombres et de la lumière</span></strong></span></p>
<p>Lorsque je m'arrête, j'ai l'impression de peindre depuis une quinzaine de minutes. En réalité, une heure s'est écoulée. Pauline Duchez me demande à voix basse, pour ne pas déranger l'autre participante :<em> « Lorsque tu regardes ton dessin, quel est le premier mot qui te vient à l'esprit ? </em>» Je réponds sans hésiter : <em>« Mouvement. »</em> <em>« Et où le placerais-tu dans ton corps ? »</em> <em>« Dans les bras. Le bas du corps bouge mal en ce moment ! »</em><br />L'échange pourrait s'arrêter là. Ou bien se poursuivre en entretien individuel si je décidai d'entamer une véritable art-thérapie. Mais il ne s'agirait pas d'interpréter, de manière psychanalytique, les couleurs et les formes apparues. Ici, le thérapeute ne décrypte pas, ne juge pas. Il établit avant tout un cadre sécurisant, pour permettre aux participants de s'exprimer librement, sur la toile puis avec son accompagnant. L'objectif ? <em>« Quand on a pris conscience de ses parts d'ombre – ce qui peut être facile – puis de sa lumière – ce qui est parfois plus difficile – on peut prendre conscience de ce qui reste encore possible à faire</em>, explique Pauline Duchez. <em>Si on a conscience de toutes les parties de notre ego, on peut entrer en contact avec soi-même et s'auto-analyser. C'est le chemin vers l'autonomie. »<a href="http://www.rebonds.net/images/ART_THÉRAPIE/table_palette.JPG" class="jcepopup" data-mediabox-title="La table-palette." data-mediabox="1"><img src="http://www.rebonds.net/images/ART_THÉRAPIE/table_palette.JPG" alt="table palette" width="572" height="357" style="margin-left: 15px; border: 2px double #e2e2e2; float: right;" /></a></em></p>
<p><span style="font-size: 14pt;"><strong><span style="color: #ff615d;">« Les gens ont un pouvoir de changement »</span></strong></span></p>
<p>Pauline Duchez <span style="font-size: 8pt;">(2)</span> est en formation d'art-thérapeute auprès d'Anne Loudenot, qui a créé le concept d'art-thérapie spirituelle<span style="font-size: 8pt;"> (3)</span>. <em>« Je suis la seule à proposer cet accompagnement en France</em>, me précise-t-elle par téléphone. <em>Ici, le mot « spiritualité » signifie : quel sens je donne à ma vie ? Quelle place j'ai dans le monde ? Nous naissons une première fois biologiquement, une seconde fois socialement. Puis, vient le moment où nous nous posons la question du sens : qu'est-ce que je fais ici ? Commence alors le travail de l'être profond. L'art-thérapie spirituelle accompagne les personnes sur ce chemin-là. »</em><br />Anne Loudenot insiste sur le fait que la démarche n'est pas dogmatique et qu'elle est bien reliée, aussi, aux problèmes de la vie quotidienne : <em>« Tout ce qu'on vit en atelier peut être transposé à la vie quotidienne. Ça peut être très terre-à-terre. Par exemple : une maman m'a dit l'autre jour que pour la première fois, elle était parvenue à ne pas s'énerver après ses enfants... L'art-thérapeute va encourager la personne à écouter une part d'elle-même qui fait obstacle à certaines choses dans sa vie de tous les jours. » </em></p>
<p>Mais pourquoi a-t-on besoin d'un accompagnant pour réaliser ce travail sur soi ?<em> « Parce que notre société ne nous apprend pas à nous reconnecter à nous-mêmes. Certaines tribus ou cultures le font. Pas la nôtre. Notre histoire est marquée par la religion judéo-chrétienne qui a nié le corps et par la médecine qui l'a mécanisé. Nous sommes complètement déconnectés de notre transcendance, c'est-à-dire de cette force de vie qui nous a créés. On ne nous apprend pas à aller au-delà de notre mental. »</em> Anne Loudenot sent toutefois un changement : <em>« C'est en train d'imploser. Il y a de plus en plus de mouvements qui permettent de se sentir mieux, de ressentir cette force de vie. Il est en tout cas très urgent de transmettre aux gens qu'ils ont un pouvoir de changement. »</em> <br /><br /><span style="font-size: 14pt;"><strong><span style="color: #ff615d;">Pour une écologie de l'être</span></strong></span></p>
<p>La formation qu'elle dispense comprend trois années de cours théoriques et de pratiques.<br />Pauline Duchez en a entendu parler après cinq années passées à l'Ecole Nationale Supérieure des Arts (ENSA) de Bourges. <em>« Ça a tout de suite résonné en moi, j'ai immédiatement appelé la formatrice ! </em>» Les cours ont lieu à Paris, à raison d'un week-end par mois. Sont également prévus des stages et un suivi de supervision avec Anne Loudenot. En deuxième année, les futurs art-thérapeutes doivent commencer un accompagnement et rédiger un mémoire. La troisième année se termine par une certification <em>(lire aussi l'encadré</em>).</p>
<p>Initialement formée au dessin, elle s'est diversifiée pour proposer de l'argile, des collages, du tissage, du fusain, mais aussi du mouvement authentique.<em> « Certains médiums ne sont pas adaptés à certaines personnes »</em>, explique-t-elle.<br />L'art-thérapie spirituelle utilise des matériaux naturels en adéquation avec « l'écologie de l'être » qu'elle promeut. <em>« C'est très important,</em> assure Anne Loudenot. <em>Quand on prend conscience de tout, tout devient précieux et on fait attention à tout. »</em></p>
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<h3>L'atelier de terre de Suzanne Daigeler</h3>
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<p><strong>Samedi 26 janvier 2019 – 10 heures – La Borne</strong><br /><br />Suzanne Daigeler m'accueille dans sa maison située tout près de son atelier de céramiste. Pour des raisons de secret médical et de respect de la démarche thérapeutique, il est compliqué de pouvoir assister à une séance d'art-thérapie au sein d'établissements spécialisés comme celui où travaille Suzanne Daigeler : l'Institut Médico Educatif (IME) de Saint-Florent-sur-Cher près de Bourges.<br />Depuis quatre ans, deux fois par semaine, elle y accompagne des jeunes atteints de <em>« troubles envahissants du développement »</em> : des hyperactifs, des psychotiques et de plus en plus d'autistes. Individuellement ou en duo, pendant une demi heure ou une heure, elle leur propose un atelier de terre. Les jeunes concernés sont âgés de 9 à 18 ans actuellement.<br />Suzanne Daigeler fait partie intégrante de l'équipe de soin, qui comprend également une orthophoniste, une psychologue, une infirmière, une psychomotricienne et une art-thérapeute en peinture. C'est cette équipe qui prescrit l'art-thérapie aux patients, en fonction des pathologies et des objectifs qu'ils peuvent atteindre.<a href="http://www.rebonds.net/images/ART_THÉRAPIE/caisson_dargile.JPG" class="jcepopup" data-mediabox-title="Le caisson d'argile est un des médiums utilisés par Suzanne Daigeler (Photo : S.D.)." data-mediabox="1"><img src="http://www.rebonds.net/images/ART_THÉRAPIE/caisson_dargile.JPG" alt="caisson dargile" width="454" height="285" style="margin-left: 15px; border: 2px double #e2e2e2; float: right;" /></a><br />Des grilles comprenant de multiples critères doivent être remplies régulièrement pour évaluer la progression des patients. Une réunion, une fois par an, permet de tirer un bilan complet. A chaque fin de séance, Suzanne Daigeler note des observations, commentaires, interrogations…<br /><br /><span style="font-size: 14pt; color: #ff615d;"><strong>Plusieurs médiums</strong></span></p>
<p>Comment est-elle devenue art-thérapeute ? <em>« A l'origine, j'étais potière. J'avais donc déjà un bagage technique et une pratique créative. Mais j'ai toujours suivi des formations dans d'autres domaines comme la communication et la psychologie, par intérêt personnel. Pour l'art-thérapie, je me suis formée trois ans avec Brigitte Sénéca à l'institut « Terre du Ciel ». »</em> Lorsque le céramiste Jean Guillaume a pris sa retraite, il a parlé à Suzanne Daigeler du poste à Saint-Florent. <em>« J'étais déjà intervenue à la Maison d'arrêt de Bourges et je réfléchissais à donner des cours. J'avais un peu d'appréhension pour l'IME, parce que peu d'expériences personnelles du handicap,</em> avoue-t-elle. <em>Finalement, ce que j'apprécie à Saint-Florent, c'est la diversité des situations. Je vois beaucoup de jeunes, très différents. »</em></p>
<p>Dans son atelier à l'IME, plusieurs espaces pour plusieurs médiums : une table avec de la terre ; un caisson d'argile ; une planche de barbotine ; un bac à sable ; un tour… <em>« La première fois, c'est vraiment de l'expérimentation, en fonction de vers quoi l'enfant est attiré. Ensuite, je fais des propositions. Je dois tenir compte de leurs troubles, mais aussi, pour certains, du fait qu'ils sont des ados… avec des rythmes et des comportements d'ados ! »</em> <br /><br /><span style="font-size: 14pt; color: #ff615d;"><strong>Contacter la partie intacte de soi-même</strong></span></p>
<p>La relation entre l'accompagnant et le participant est très importante. <em>« Il faut créer une relation de confiance, ce qui ne se fait pas toujours spontanément. L'accompagnant doit avoir un regard bienveillant pour voir la lumière qu'il y a derrière le handicap. L'art-thérapeute doit reconnaître le potentiel de l'enfant. Il faut aussi savoir faire avec le transfert et le contre-transfert : ce que le jeune pose sur le thérapeute… il ne faut pas le prendre pour soi. »</em><br />Pour Suzanne Daigeler, l'art-thérapie s'adresse à <em>« la partie intacte de la personne »</em>.<em> « Quand on crée, on est en lien avec une partie intime de nous-mêmes, c'est pour cela que c'est parfois difficile. L'art-thérapie met les personnes handicapées en relation avec la partie intacte d'elles-mêmes. »</em><br /><a href="http://www.rebonds.net/images/ART_THÉRAPIE/maison.JPG" class="jcepopup" data-mediabox-title="Une maison en céramique réalisée par un des patients de Suzanne Daigeler (Photo : S.D.)." data-mediabox="1"><img src="http://www.rebonds.net/images/ART_THÉRAPIE/maison.JPG" alt="maison" width="433" height="274" style="margin-left: 15px; border: 2px double #e2e2e2; float: right;" /></a><br /><span style="font-size: 14pt;"><strong><span style="color: #ff615d;">L'art-thérapeute transmet un élan</span></strong></span></p>
<p>Depuis ses débuts, a-t-elle vu des changements chez les jeunes ? <em>« Je vois qu'ils avancent au niveau de leur création. Au départ, certains ne font que des miettes, puis ils les assemblent. Et quand on trouve un thème qui les intéresse, ça avance. En ce moment, il y en a un qui fabrique des fontaines, un autre des toboggans... »</em> Ses propositions doivent-elles régler des problèmes précis ? <em>« Oui et non. J'accompagne surtout un projet de création s'il y en a un. Ensuite, je fais en fonction des difficultés et des observations. Certains jeunes ont tellement été dans leur bulle que le but, c'est déjà qu'ils expérimentent le monde. Et dans cet atelier, ils peuvent faire des expériences de matières et d'éléments. On travaille aussi sur le plaisir : savoir jouer est un pré-requis pour construire. Enfin, il faut trouver ce qui maintiendra leur attention. »</em><br />La poterie suppose plusieurs étapes de transformation et ainsi, de nombreuses possibilités de création : le modelage, le tournage, la cuisson… <em>« Quand un jeune voit l'objet émaillé sortir du four, c'est comme s'il recevait un cadeau en plus de son travail ; ça le valorise. »</em></p>
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<h3>Coline Bescond : « La musique émane de nous »</h3>
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<p>Qu'est-ce que la création, sinon un prolongement de nous-mêmes ? La mise au jour d'une énergie qui, de toute façon, vit en nous ? Une extériorisation, une expression qui s'adresse autant à nous-mêmes qu'à Autrui, dans une tentative d'affirmation et de connection aux éléments qui constituent le monde.<br />N'en est-il pas ainsi de la musique ? Pour le psychiatre Jean-Pierre Klein, l'intérêt de la musique en art-thérapie tient à son essence même : <em>« L'intérêt, entre autres, de la musique, tient à son rapport ambigu entre le dedans et le dehors, l'individu et le groupe. La musique nous entoure et nous pénètre à la fois, elle est commune et nous la percevons singulièrement, elle émane de nous : voix, souffle dans un instrument, ou main qui le touche, le frappe, le pince… et elle nous envahit. »</em> <span style="font-size: 8pt;">(4)</span><br /><br /><strong>Jeudi 24 janvier 2019 – 18 h 30 – Bourges</strong></p>
<p>Je suis au centre d'un cercle et des sons m'envahissent de toutes parts : ils entrent par mes tympans, ressortent par les cellules de ma peau et mes cheveux, me touchent le coeur et la respiration, s'infiltrent dans mes vaisseaux, descendent jusque dans mes pieds avant de retourner en terre. D'autres virevoltent à travers toute la pièce et me frôlent, tels une multitude de papillons. Ce sont des voix qui s'entremêlent, se courent après puis s'étreignent dans un même souffle. Parfois, elles se font plus fortes, avant de diminuer en intensité. Elles ne prononcent pas de mots mais de simples sons continus qu'elles dirigent vers moi.<br />C'est ainsi que j'ai été accueillie au sein de l'atelier d'exploration vocale de l'association Domilune <span style="font-size: 8pt;">(5)</span>, animé par la musicienne et musicothérapeute Coline Bescond. Chaque nouveau membre a droit à ce présent, que les autres participants lui offrent généreusement.</p>
<p><span style="font-size: 14pt; color: #fc615d;"><strong>Une forme d'improvisation</strong></span></p>
<p>Au cours de cette séance de deux heures, le petit groupe constitué de six femmes a expérimenté l'effet de ses voix sur ses corps et ses esprits, en se saisissant des propositions de Coline Bescond : par exemple, se servir de son doigt comme un crayon traçant dans l'espace des formes imaginaires ; quels sons peuvent bien sortir pour accompagner ce geste ? Le geste lui-même peut tantôt pointer, tantôt esquisser des entrelacs, tantôt tracer des lignes. La voix le suit-elle ?<a href="http://www.rebonds.net/images/ART_THÉRAPIE/domilune_4.jpeg" class="jcepopup" data-mediabox-title="Les percussions peuvent soutenir l'exploration vocale guidée par Coline Bescond (Photo : Domilune)." data-mediabox="1"><img src="http://www.rebonds.net/images/ART_THÉRAPIE/domilune_4.jpeg" alt="domilune 4" width="331" height="198" style="margin-left: 15px; border: 2px double #e2e2e2; float: right;" /></a></p>
<p>Au moment où je réponds à la proposition, je ne me pose aucune question. Car ici encore, il s'agit de lâcher prise, de laisser se révéler ce qui a besoin d'être révélé. Une forme d'improvisation autour d'un thème donné.<br />Bientôt, Coline Bescond nous demande de déployer un large morceau de tissu entre nous et nous explorons à nouveau sa proposition en se servant du contact avec cette matière douce. Symboliquement et physiquement, toutes les participantes sont désormais reliées entre elles. Mais déjà, par la voix, elles se rejoignent régulièrement dans des espaces d'harmonie.<br />Le tissu est ensuite laissé de côté pour un contact plus direct : c'est main contre main, le corps engagé, que l'improvisation vocale se poursuit. Lorsqu'on doit reprendre son souffle, les mains se décollent, pour se retrouver dans l'expiration. <br />Pour terminer, Coline Bescond nous confie de petits tambours, excepté à l'une d'entre nous qui improvisera un solo vocal, selon son inspiration du moment. Les percussions sont aussi libres de s'exprimer comme elles l'entendent. La coordination avec la voix prend quelques instants, puis s'aligne. Chacune garde sa place, est à l'écoute des autres. La répétition amène à une extrême concentration : rien d'autre n'existe que ce qui se joue ici et maintenant.<br />A la fin de chaque proposition, Coline Bescond interroge les participantes sur ce qu'elles ont ressenti. Le partage est volontaire, jamais contraint.<br />Si les personnes qui viennent à Coline Bescond ont des profils variés, toutes ont un objectif commun : <em>« retrouver une puissance de vie »</em>. <em>« Elles ont un besoin de pouvoir vibrer au monde par la voix »</em>, précise-t-elle. <br /><br /><span style="color: #fc615d;"><strong><span style="font-size: 14pt;">« Un espace de liberté »</span></strong></span></p>
<p>La musicothérapie s'adresse à toute la population : nourrissons, jeunes enfants, adolescents, adultes, personnes âgées… mais aussi <em>« à des personnes présentant des souffrances ou des difficultés liées à des troubles psychiques, sensoriels, physiques, neurologiques ou en difficultés psycho-sociales »</em>.<br />Les séances sont proposées en individuel, en groupe ou en famille, selon le contexte et le projet de soin ou d'accompagnement.<br />Coline Bescond met en œuvre une musicothérapie active, durant laquelle les participants sont acteurs ; la musicothérapie réceptive est un autre courant qui privilégie l'écoute.</p>
<p>Outre l'atelier d'exploration vocale, Coline Bescond a déjà pratiqué la musicothérapie en EHPAD (Etablissement d'Hébergement pour Personnes Agées Dépendantes), en ESAT (Etablissement Spécialisé d'Aide par le Travail), pour la PMI (Protection Maternelle Infantile), en Maison d'arrêt, par exemple.<br />Comment est-elle devenue musicothérapeute ? <em>« J'ai suivi des études de musicologie à Tours. A l'époque, j'étais pianiste. Mais à 20 ans, la musicothérapie m'intéressait déjà car j'avais voulu faire mon mémoire de maîtrise sur le sujet. Mais je me posais des questions… Pour moi, la musique était avant tout un art et non un outil. La musique n'était pas faite pour être utilisée. »</em> Elle prend alors un autre chemin et se forme comme chef de choeur au centre d'art polyphonique de Paris.<a href="http://www.rebonds.net/images/ART_THÉRAPIE/domilune_5_bis.jpeg" class="jcepopup" data-mediabox-title="Coline Bescond anime des ateliers dans des structures spécialisées (Photo : Domilune)." data-mediabox="1"><img src="http://www.rebonds.net/images/ART_THÉRAPIE/domilune_5_bis.jpeg" alt="domilune 5 bis" width="233" height="229" style="margin-left: 15px; border: 2px double #e2e2e2; float: right;" /></a><br />En s'installant à Bourges, ne se sentant pas libre d'enseigner dans des écoles « classiques », elle fonde Domilune en 1999. <em>« J'aimais l'enseignement mais dans les écoles, on apprend quelque chose, on ne se sert pas forcément des connaissances de la personne. On veut apprendre la musique comme si elle ne nous appartenait pas. Il faut que chaque personne sente qu'elle a toute sa place et que la créativité est en elle. C'est très important. Même si la personne n'a pas de technique, elle peut ressentir qu'elle a sa place dans l'univers et qu'elle est une force de création. »</em><br />En 2011, elle suit une formation d'art-thérapeute à l'INECAT (Institut National d'Expression, de Création, d'Art et Transformation).</p>
<p>Quels effets la musicothérapie produit-elle sur les participants à ses ateliers ? <em>« Globalement, ils peuvent mieux s'exprimer. Sur les personnes handicapées mentales, par exemple, on remarque une diminution des troubles compulsifs. </em>» Les résultats ne sont pas toujours immédiats, c'est pourquoi la persévérance est essentielle : <em>« Il y a un moment où il se passe quelque chose, mais si on n'y revient pas, il ne s'agira que d'un souvenir fugace alors que si on persévère, quelque chose sort d'on ne sait où. Avec la voix, on fait des découvertes jubilatoires. Il n'y a pas de juste ni de faux dans les sons produits, pas d'intention particulière, c'est la magie de la présence de chacun : il existe ici et maintenant un espace de liberté. »</em></p>
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<h3>Le corps en mouvement avec Adeline Loosli</h3>
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<p><em></em>Le recours à la danse dans l'art-thérapie semble moins répandu que les arts plastiques ou la musique. Si sa fonction cathartique remonte bien loin dans l'histoire de l'humanité, notamment dans les rites tribaux, c'est dans les années 1930 aux Etats-Unis que la danse-thérapie prit sa forme moderne, avec Marian Chace. Différents courants co-existent, plus ou moins empreints de psychanalyse, mais ils partagent des concepts communs comme le corps global ou la fonction de communication non verbale du corps. Comme l'écrit Jean-Pierre Klein, <em>« le corps devient symbole sans cesser d'être corps »</em>. Le participant peut <em>« être à soi-même son propre réanimateur </em>» <span style="font-size: 8pt;">(4)</span>.</p>
<p>Pour Adeline Loosli <span style="font-size: 8pt;">(6)</span>, danse-thérapeute installée à Vierzon, la danse-thérapie travaille sur <em>« la revalorisation et l'estime de soi »</em>, <em>« les relations »</em>, <em>« la communication »</em>, <em>« l'expression »</em>. <em>« Le simple fait de mettre le corps en mouvement peut aussi libérer certaines tensions </em>», souligne-t-elle.<br />Elle intervient auprès de personnes atteintes de diabète et en surpoids, des adultes en situation de handicap physique ou mental, des personnes suivies par un service psychiatrique… Elle s'était installée dans un cabinet avec une consœur, mais face à la difficulté de trouver un médecin prescripteur, elle a dû arrêter ses consultations individuelles et travaille désormais pour des associations et structures spécialisées.<br /><br /><strong><span style="font-size: 14pt; color: #ff615d;">Une dimension artistique plus que physique</span></strong></p>
<p>Quel est son parcours ? <em>« Je pratique la danse depuis l'âge de 6 ans. Mon père considérait que ce n'était pas un métier, alors j'ai dû suivre des études de comptabilité. J'ai obtenu mon diplôme d'expert-comptable et j'ai travaillé dans un cabinet mais ça ne me plaisait pas. Il y a dix ans, j'ai passé un DU (Diplôme Universitaire) d'art-thérapie à la fac de médecine à Tours. La formation s'est déroulée une semaine par mois pendant deux ans ; j'ai pu m'arranger avec mon employeur. »</em><br />Pourquoi la formation est-elle dispensée à la faculté de médecine ? Comprend-elle des cours d'anatomie ? <em>« Non, on étudie surtout les psycho-pathologies. Dans cette formation, toutes les pratiques sont réunies : arts plastiques, musique, danse… C'est intéressant en terme d'échanges. Il n'y avait pas beaucoup de danse-thérapeutes. »</em><br />Pour son mémoire, elle a choisi le thème de l'anorexie mentale. <em>« Ce n'était pas évident parce que normalement, l'activité physique est interdite aux anorexiques, pour éviter la perte de poids. Mais j'ai pu intégrer le service diabétique de l'hôpital Jacques-Coeur à Bourges, qui accueille les jeunes femmes anorexiques de plus de 18 ans. J'ai axé mon travail sur la dimension artistique, et non sur l'activité physique. J'ai constaté qu'elles n'avaient pas perdu de poids et qu'elles ressentaient un certain épanouissement, de la détente. Cétait une expérience positive. »</em></p>
<p>Une fois son diplôme décroché et suite à son stage à l'hôpital Jacques-Coeur, une association de diabétiques a fait appel à elle. <em>« Petit à petit, je sème des graines. J'envoie des cv, j'essaie de faire circuler l'information par le bouche-à-oreille… Les refus sont généralement liés à un manque de budget. Dans certaines structures, ils peinent déjà à embaucher des infirmières... Il faut aussi rencontrer des praticiens qui sont ouverts à ce type de thérapies. »<a href="http://www.rebonds.net/images/ART_THÉRAPIE/adeline_loosli.jpeg" class="jcepopup" data-mediabox-title="Les séances proposées par Adeline Loosli se déroulent surtout en groupe (Photo : A.L.)." data-mediabox="1"><img src="http://www.rebonds.net/images/ART_THÉRAPIE/adeline_loosli.jpeg" alt="adeline loosli" width="389" height="169" style="margin-left: 15px; border: 2px double #e2e2e2; float: right;" /></a><em></em></em><br /><br /><span style="font-size: 14pt; color: #ff615d;"><strong>Rester positive</strong></span></p>
<p>Toujours pour des questions budgétaires, l'ARS (Agence Régionale de Santé) préconise des séances en groupe, avec environ six personnes. Mais tout devrait plutôt dépendre des objectifs thérapeutiques. <em>« Par exemple, si on veut travailler la confiance en soi, le groupe, c'est bien. Mais pour la concentration, en individuel, c'est mieux. »</em><br />Comment se déroule une séance « type » ? <em>« Nous commençons par un échauffement avec un temps d'auto-massage pour être à l'écoute de son corps. Ensuite, je propose un exercice libre ou semi-dirigé qui permet de travailler les repères dans l'espace, le regard, le contact avec les autres… Vient un temps de chorégraphie : les participants choisissent la musique, un thème, des mouvements, le mode d'expression corporelle… Enfin, nous terminons par un temps de retour au calme et des échanges. Chacun dit ce qu'il a envie de dire, mais parfois, les participants n'ont pas accès à la verbalisation. J'observe des évolutions. J'essaie de rester positive, je ne souligne que les progrès. »</em></p>
<p>Certains patients abordent la première séance avec une certaine appréhension, voire refusent de danser. <em>« Je ne les force pas. Je leur dis bien : si vous ne voulez pas, ce n'est pas obligatoire. Je respecte ce qu'ils ont envie ou non de faire. Ils finissent par avoir confiance et par intégrer le groupe. C'est le lien qu'on crée qui est important. »<em></em></em></p>
<p>Comme en arts plastiques ou en musique, le ou la danse-thérapeute doit rester en phase avec sa discipline. Adeline Loosli pratique toujours la danse classique et contemporaine. <em>« Ça me nourrit et m'inspire. »</em></p>
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<h3>« Ce qui reste encore possible à faire »</h3>
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<p>Dans quelques jours, à Paris, je testerai un atelier de danse intuitive appelé aussi mouvement authentique. J'ai hâte de renouer avec cette partie de mon histoire – la danse – et d'observer les réactions de mon corps et de mon esprit.<a href="http://www.rebonds.net/images/ART_THÉRAPIE/Pauline_D_1.jpg" class="jcepopup" data-mediabox-title="Peinture : Pauline Duchez." data-mediabox="1"><img src="http://www.rebonds.net/images/ART_THÉRAPIE/Pauline_D_1.jpg" alt="Pauline D 1" width="442" height="344" style="margin-left: 15px; border: 2px double #e2e2e2; float: right;" /></a><em></em><br />Je cherche à créer une relation fraternelle, apaisée, entre mon corps traumatisé et mon esprit qui peine à l'accepter. J'ai parfois l'impression d'être hors de moi, au sens littéral du terme, et de les regarder se chamailler : l'esprit dispute le corps de n'être plus assez agile, rapide, fort, pour concrétiser ses idées sans cesse renouvellées, ses élans, ses désirs ; le corps boude et se plaint d'être incompris, tout las et endolori qu'il est… Parfois, je les surprends à rire de concert et leur énergie commune me porte et m'emporte. D'autres fois, je les écoute s'écharper, en rêvant à des jours meilleurs. Je sais qu'une réconciliation durable est la clé du bien être. Elle viendra.</p>
<p>Le processus de création, chez moi, se concrétise quasiment chaque jour de ma vie par l'écriture. Il ne s'agit certes pas toujours d'art, parfois seulement de technique, mais ces instants contribuent forcément à la transformation de mon être. Chacun.e d'entre nous peut l'expérimenter, dans des disciplines aussi variées que la peinture, le dessin, la gravure, le chant, la danse et l'écriture, mais aussi les marionnettes, la vidéo, la photographie… Tous ces médiums permettent de nous révéler nos parts d'ombre et de lumière et, le plus important, de <em>« ce qui reste encore possible à faire »</em>...</p>
<p style="text-align: left;"><strong>Fanny Lancelin</strong><span style="font-size: 8pt;"> </span></p>
<p style="text-align: left;"><span style="font-size: 8pt;">(1) La table-palette a été conçue par Arno Stern : <a href="http://www.arnostern.com/">http://www.arnostern.com/</a><br />Lire aussi la rubrique (Re)visiter.<br />(2) <a href="http://paulineduchez.wixsite.com/ateliers">http://paulineduchez.wixsite.com/ateliers</a><br />(3) Anne Loudenot a créé l'Institut d'art-thérapie spirituelle qui se trouve à Paris : <a href="https://www.artlifecoach.net/">https://www.artlifecoach.net/</a><br />(4) Jean-Pierre Klein, « L'art-thérapie », PUF, 2012.<br />(5) Domilune : <a href="https://ateliersdomilune.wixsite.com/domilune">https://ateliersdomilune.wixsite.com/domilune</a><br />(6) <a href="https://art-therapie-vierzon.fr/contact/1">https://art-therapie-vierzon.fr/contact/1</a><br /></span></p>
<p style="text-align: left;"> </p>
<div class="panel panel-primary">
<div class="panel-heading" style="text-align: left;">
<h3 class="panel-title">Art-thérapeute : ce qu'il est... ou pas</h3>
</div>
<ul>
<li style="text-align: left;">Il existe des diplômes universitaires mention art-thérapie, reconnus par l’État et délivrés par des facultés de médecine comme celles de Tours, Grenoble ou de Lille.<br />Mais la plupart des instituts indépendants de formation délivrent un certificat. C'est le cas de l'AFRAPATEM <span style="font-size: 8pt;">(1)</span> ou de PROFAC<span style="font-size: 8pt;"> (2)</span>, par exemple, dont les référenciels sont publiés au Journal Officiel.<br />On y lit ainsi que <em>« L'art-thérapeute crée les conditions favorables à l’expression des personnes en difficulté (psychologique, physique ou sociale), à travers des dispositifs créatifs qui ne sont pas orientés vers la production comme dans le champ habituel de l’art.</em><br /><em>L'art-thérapeute travaille exclusivement sur indication médicale en s’appuyant sur des techniques spécifiques à sa spécialisation à savoir : des dispositifs élaborés et réélaborés à partir de l’expérience de terrain et la recherche clinique.</em><br /><em>Il accompagne et soutient des personnes de tout âge dans des situations transitoires ou en processus de changement, en situation de crise ou dans un but préventif.</em><br /><em>L'art-thérapie est définie comme une pratique de soin utilisant des dispositifs inscrits dans le suivi créatif individuel ou groupal.</em><br /><em>Cette méthode s'appuie sur l’expérience créatrice comme moyen d'expression et offre des voies de communication non limités à la parole. </em><br /><em>Par cette approche, la personne peut percevoir et communiquer différemment son vécu singulier. </em><br /><em>L'art-thérapeute se différencie clairement :</em><br /><em>- du médiateur artistique ou de l'animateur d'atelier occupationnel, dans la mesure où ses interventions se font exclusivement sur indication médicale et contrôle du prescripteur ;</em><br /><em>- du psychothérapeute du fait qu'il n'interprète absolument jamais les productions ;</em><br /><em>- de l’ergothérapeute qui intervient dans le champ de la rééducation fonctionnelle. »</em><br />La profession, qui peut être exercée en libéral, est revendiquée par des profils de « thérapeutes » très variés qui s'apparentent parfois plutôt à des coachs de vie ou de développement personnel. Le risque ? Que l'auto-proclamé « thérapeute » ne maîtrise pas les bases de la psychologie et qu'il se laisse emporter par les émotions de celui ou celle qu'il doit accompagner. Mais, comme dans toute relation, tout est affaire de sensibilité et de confiance…<br /><br /><span style="font-size: 8pt;">(1) AFRAPATEM : <a href="http://art-therapie-tours.net/">http://art-therapie-tours.net/</a></span><br /><span style="font-size: 8pt;">(2) PROFAC : <a href="https://www.artherapie.com/">https://www.artherapie.com/</a></span></li>
</ul>
</div><p style="text-align: right;"><strong><em><span style="color: #000000;"><em></em>« C'est en tant que créateur, si humble que soit le niveau où cette création se consomme, qu'un homme quel qu'il soit peut se reconnaître libre. »</span></em></strong></p>
<p style="text-align: right;"><strong><em><span style="color: #000000;">Gabriel Marcel<br /></span></em></strong></p>
<p><span style="font-size: 18pt;">J'</span>'ai pris le bleu. Et je laisse le pinceau esquisser des formes que je ne reconnais pas. Mes gestes sont répétitifs et pourtant, chacun d'eux est unique. Il me semble que je pourrais rester ainsi, dans ce mouvement, durant des heures.</p>
<p>Mon regard se voile, comme lorsqu'on « rêve » éveillé : je ne vois plus vraiment les points bleus peints par mon pinceau. Je ne sens que la lègère pression de mes doigts sur le petit manche en bois, prolongement de mon corps entrant en contact avec le papier.<br /><em>« Je n'ai jamais peint »</em>, pensai-je. Vraiment ? Comment est-ce possible, à mon âge, de n'avoir jamais peint ? Une image d'un morceau de pomme de terre coupée en frite, une extrêmité trempée de peinture – bleue, elle aussi – arrive à mon esprit. Ah. Oui, sans doute à la maternelle ! Je sais que pour que l'expérience que je suis en train de vivre fonctionne, il me faut éviter de m'accrocher aux idées qui me traversent. Je laisse passer celle-ci. <em>« Ça semble plus facile que lorsque je tente de méditer, assise en tailleur »</em>, pensai-je toutefois à nouveau. Et le pinceau de poursuivre sa danse sur le papier... <a href="http://www.rebonds.net/images/ART_THÉRAPIE/peinture_intuitive.JPG" class="jcepopup" data-mediabox-title="Le "résultat" de ma séance de peinture intuitive." data-mediabox="1"><img src="http://www.rebonds.net/images/ART_THÉRAPIE/peinture_intuitive.JPG" alt="peinture intuitive" width="459" height="400" style="margin-left: 15px; border: 2px double #e2e2e2; float: right;" /></a></p>
<p>Ce que je suis en train de vivre est un atelier de peinture intuitive, l'un des outils de l'art-thérapie. Et, plus précisément ici, d'art-thérapie spirituelle.<br />Depuis ma rencontre avec un gériatre, il y a quelques années à Sancerre, qui m'avait affirmé que la musicothérapie lui permettait de réduire la médication sur les personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer, je m'intéresse à ces démarches qui offrent aux patients de devenir créateurs, dans leur processus de transformation. Aux patients ? A chacun.e d'entre nous, en fait, qui devons faire avec les chocs émotionnels, les ruptures, les accidents, les maladies, les pathologies…<br />Malheureusement, le musicothérapeute a quitté le centre hospitalier de Sancerre et n'a pas été remplacé. Mais, dans le Cher, j'ai pu rencontrer d'autres art-thérapeutes qui m'ont généreusement ouvert les portes de leurs ateliers, de leurs maisons, de leurs univers. Ils sont d'abord des artistes : ils pratiquent un instrument, chantent, dessinent, peignent, dansent, font de la céramique… Et parce qu'ils connaissent ce qui se joue dans le processus de création, ils peuvent accompagner des personnes dans leur cheminement <em>« de l'ancien vers le nouveau »</em>, comme le souligne Pauline Duchez.</p>
<p><span style="color: #fc615d;">_____________________________________________________________</span></p>
<h3>Pauline Duchez : l'art-thérapie spirituelle</h3>
<p><span style="color: #fc615d;">_____________________________________________________________</span><br /><br /><strong>Mardi 5 février 2019 – 15 heures – Henrichemont</strong></p>
<p>Le soleil éclabousse la fenêtre et réchauffe le côté droit de mon corps, celui qui souffre, souvent. Je savoure ce présent. Je suis assise près de Pauline Duchez, dans un vieil appartement presque vide, au parquet de bois grinçant. Nous avons les yeux clos. J'écoute sa voix douce.<br />L'atelier de peinture intuitive commence par un temps de relaxation, qui peut aller jusqu'à la méditation si les participants y sont favorables. Il s'agit de prendre conscience des parties de son corps pour y apaiser les tensions et pour les rendre disponibles à ce qui va suivre. De profondes respirations rythment cette exploration mentale, des pieds jusqu'au sommet de la tête. Lorsque j'ouvre les yeux, je me sens parfaitement détendue, sans appréhension.</p>
<p>Pauline Duchez punaise deux feuilles blanches sur un des murs de l'atelier, à hauteur des yeux, pour les deux participantes du jour. Face au mur, une « table-palette »<span style="font-size: 8pt;"> (1)</span> : sur une table, sont posés des pots en verre, translucides, à moitié remplis de peinture et placés de telle sorte qu'ils forment un nuancier de couleurs. A leurs côtés, deux pinceaux et un verre d'eau. La mise en scène est précise. Les consignes aussi : nous devons nous placer face à la table-palette et, spontanément, choisir une couleur ; tremper le pinceau dans l'eau, puis à moitié dans la peinture ; s'avancer vers notre feuille blanche, respirer ; poser le pinceau et <em>« laisser faire </em>». Quoi ? Je pressens que la question est inutile. Laisser faire.<br />Je prends d'abord du orange. Mais finalement, il aurait pu s'agir de n'importe quelle couleur car ce qui me fascine immédiatement, c'est le mouvement du pinceau, la manière dont il tourne, agit sur la peinture, provoque des effets. Je reste longtemps, je crois, à l'observer bouger sur la feuille. Avant de prendre le bleu… de laisser me traverser quelques idées… puis, sur le vert, une musique arrive à mon esprit… « An Arz »… du mauve et une concentration plus intense encore, des sensations de mouvement agréables…</p>
<p><span style="font-size: 14pt;"><strong><span style="color: #ff615d;">Prendre conscience des ombres et de la lumière</span></strong></span></p>
<p>Lorsque je m'arrête, j'ai l'impression de peindre depuis une quinzaine de minutes. En réalité, une heure s'est écoulée. Pauline Duchez me demande à voix basse, pour ne pas déranger l'autre participante :<em> « Lorsque tu regardes ton dessin, quel est le premier mot qui te vient à l'esprit ? </em>» Je réponds sans hésiter : <em>« Mouvement. »</em> <em>« Et où le placerais-tu dans ton corps ? »</em> <em>« Dans les bras. Le bas du corps bouge mal en ce moment ! »</em><br />L'échange pourrait s'arrêter là. Ou bien se poursuivre en entretien individuel si je décidai d'entamer une véritable art-thérapie. Mais il ne s'agirait pas d'interpréter, de manière psychanalytique, les couleurs et les formes apparues. Ici, le thérapeute ne décrypte pas, ne juge pas. Il établit avant tout un cadre sécurisant, pour permettre aux participants de s'exprimer librement, sur la toile puis avec son accompagnant. L'objectif ? <em>« Quand on a pris conscience de ses parts d'ombre – ce qui peut être facile – puis de sa lumière – ce qui est parfois plus difficile – on peut prendre conscience de ce qui reste encore possible à faire</em>, explique Pauline Duchez. <em>Si on a conscience de toutes les parties de notre ego, on peut entrer en contact avec soi-même et s'auto-analyser. C'est le chemin vers l'autonomie. »<a href="http://www.rebonds.net/images/ART_THÉRAPIE/table_palette.JPG" class="jcepopup" data-mediabox-title="La table-palette." data-mediabox="1"><img src="http://www.rebonds.net/images/ART_THÉRAPIE/table_palette.JPG" alt="table palette" width="572" height="357" style="margin-left: 15px; border: 2px double #e2e2e2; float: right;" /></a></em></p>
<p><span style="font-size: 14pt;"><strong><span style="color: #ff615d;">« Les gens ont un pouvoir de changement »</span></strong></span></p>
<p>Pauline Duchez <span style="font-size: 8pt;">(2)</span> est en formation d'art-thérapeute auprès d'Anne Loudenot, qui a créé le concept d'art-thérapie spirituelle<span style="font-size: 8pt;"> (3)</span>. <em>« Je suis la seule à proposer cet accompagnement en France</em>, me précise-t-elle par téléphone. <em>Ici, le mot « spiritualité » signifie : quel sens je donne à ma vie ? Quelle place j'ai dans le monde ? Nous naissons une première fois biologiquement, une seconde fois socialement. Puis, vient le moment où nous nous posons la question du sens : qu'est-ce que je fais ici ? Commence alors le travail de l'être profond. L'art-thérapie spirituelle accompagne les personnes sur ce chemin-là. »</em><br />Anne Loudenot insiste sur le fait que la démarche n'est pas dogmatique et qu'elle est bien reliée, aussi, aux problèmes de la vie quotidienne : <em>« Tout ce qu'on vit en atelier peut être transposé à la vie quotidienne. Ça peut être très terre-à-terre. Par exemple : une maman m'a dit l'autre jour que pour la première fois, elle était parvenue à ne pas s'énerver après ses enfants... L'art-thérapeute va encourager la personne à écouter une part d'elle-même qui fait obstacle à certaines choses dans sa vie de tous les jours. » </em></p>
<p>Mais pourquoi a-t-on besoin d'un accompagnant pour réaliser ce travail sur soi ?<em> « Parce que notre société ne nous apprend pas à nous reconnecter à nous-mêmes. Certaines tribus ou cultures le font. Pas la nôtre. Notre histoire est marquée par la religion judéo-chrétienne qui a nié le corps et par la médecine qui l'a mécanisé. Nous sommes complètement déconnectés de notre transcendance, c'est-à-dire de cette force de vie qui nous a créés. On ne nous apprend pas à aller au-delà de notre mental. »</em> Anne Loudenot sent toutefois un changement : <em>« C'est en train d'imploser. Il y a de plus en plus de mouvements qui permettent de se sentir mieux, de ressentir cette force de vie. Il est en tout cas très urgent de transmettre aux gens qu'ils ont un pouvoir de changement. »</em> <br /><br /><span style="font-size: 14pt;"><strong><span style="color: #ff615d;">Pour une écologie de l'être</span></strong></span></p>
<p>La formation qu'elle dispense comprend trois années de cours théoriques et de pratiques.<br />Pauline Duchez en a entendu parler après cinq années passées à l'Ecole Nationale Supérieure des Arts (ENSA) de Bourges. <em>« Ça a tout de suite résonné en moi, j'ai immédiatement appelé la formatrice ! </em>» Les cours ont lieu à Paris, à raison d'un week-end par mois. Sont également prévus des stages et un suivi de supervision avec Anne Loudenot. En deuxième année, les futurs art-thérapeutes doivent commencer un accompagnement et rédiger un mémoire. La troisième année se termine par une certification <em>(lire aussi l'encadré</em>).</p>
<p>Initialement formée au dessin, elle s'est diversifiée pour proposer de l'argile, des collages, du tissage, du fusain, mais aussi du mouvement authentique.<em> « Certains médiums ne sont pas adaptés à certaines personnes »</em>, explique-t-elle.<br />L'art-thérapie spirituelle utilise des matériaux naturels en adéquation avec « l'écologie de l'être » qu'elle promeut. <em>« C'est très important,</em> assure Anne Loudenot. <em>Quand on prend conscience de tout, tout devient précieux et on fait attention à tout. »</em></p>
<p><span style="color: #fc615d;">_________________________________________________________</span></p>
<h3>L'atelier de terre de Suzanne Daigeler</h3>
<p><span style="color: #fc615d;">_________________________________________________________</span></p>
<p><strong>Samedi 26 janvier 2019 – 10 heures – La Borne</strong><br /><br />Suzanne Daigeler m'accueille dans sa maison située tout près de son atelier de céramiste. Pour des raisons de secret médical et de respect de la démarche thérapeutique, il est compliqué de pouvoir assister à une séance d'art-thérapie au sein d'établissements spécialisés comme celui où travaille Suzanne Daigeler : l'Institut Médico Educatif (IME) de Saint-Florent-sur-Cher près de Bourges.<br />Depuis quatre ans, deux fois par semaine, elle y accompagne des jeunes atteints de <em>« troubles envahissants du développement »</em> : des hyperactifs, des psychotiques et de plus en plus d'autistes. Individuellement ou en duo, pendant une demi heure ou une heure, elle leur propose un atelier de terre. Les jeunes concernés sont âgés de 9 à 18 ans actuellement.<br />Suzanne Daigeler fait partie intégrante de l'équipe de soin, qui comprend également une orthophoniste, une psychologue, une infirmière, une psychomotricienne et une art-thérapeute en peinture. C'est cette équipe qui prescrit l'art-thérapie aux patients, en fonction des pathologies et des objectifs qu'ils peuvent atteindre.<a href="http://www.rebonds.net/images/ART_THÉRAPIE/caisson_dargile.JPG" class="jcepopup" data-mediabox-title="Le caisson d'argile est un des médiums utilisés par Suzanne Daigeler (Photo : S.D.)." data-mediabox="1"><img src="http://www.rebonds.net/images/ART_THÉRAPIE/caisson_dargile.JPG" alt="caisson dargile" width="454" height="285" style="margin-left: 15px; border: 2px double #e2e2e2; float: right;" /></a><br />Des grilles comprenant de multiples critères doivent être remplies régulièrement pour évaluer la progression des patients. Une réunion, une fois par an, permet de tirer un bilan complet. A chaque fin de séance, Suzanne Daigeler note des observations, commentaires, interrogations…<br /><br /><span style="font-size: 14pt; color: #ff615d;"><strong>Plusieurs médiums</strong></span></p>
<p>Comment est-elle devenue art-thérapeute ? <em>« A l'origine, j'étais potière. J'avais donc déjà un bagage technique et une pratique créative. Mais j'ai toujours suivi des formations dans d'autres domaines comme la communication et la psychologie, par intérêt personnel. Pour l'art-thérapie, je me suis formée trois ans avec Brigitte Sénéca à l'institut « Terre du Ciel ». »</em> Lorsque le céramiste Jean Guillaume a pris sa retraite, il a parlé à Suzanne Daigeler du poste à Saint-Florent. <em>« J'étais déjà intervenue à la Maison d'arrêt de Bourges et je réfléchissais à donner des cours. J'avais un peu d'appréhension pour l'IME, parce que peu d'expériences personnelles du handicap,</em> avoue-t-elle. <em>Finalement, ce que j'apprécie à Saint-Florent, c'est la diversité des situations. Je vois beaucoup de jeunes, très différents. »</em></p>
<p>Dans son atelier à l'IME, plusieurs espaces pour plusieurs médiums : une table avec de la terre ; un caisson d'argile ; une planche de barbotine ; un bac à sable ; un tour… <em>« La première fois, c'est vraiment de l'expérimentation, en fonction de vers quoi l'enfant est attiré. Ensuite, je fais des propositions. Je dois tenir compte de leurs troubles, mais aussi, pour certains, du fait qu'ils sont des ados… avec des rythmes et des comportements d'ados ! »</em> <br /><br /><span style="font-size: 14pt; color: #ff615d;"><strong>Contacter la partie intacte de soi-même</strong></span></p>
<p>La relation entre l'accompagnant et le participant est très importante. <em>« Il faut créer une relation de confiance, ce qui ne se fait pas toujours spontanément. L'accompagnant doit avoir un regard bienveillant pour voir la lumière qu'il y a derrière le handicap. L'art-thérapeute doit reconnaître le potentiel de l'enfant. Il faut aussi savoir faire avec le transfert et le contre-transfert : ce que le jeune pose sur le thérapeute… il ne faut pas le prendre pour soi. »</em><br />Pour Suzanne Daigeler, l'art-thérapie s'adresse à <em>« la partie intacte de la personne »</em>.<em> « Quand on crée, on est en lien avec une partie intime de nous-mêmes, c'est pour cela que c'est parfois difficile. L'art-thérapie met les personnes handicapées en relation avec la partie intacte d'elles-mêmes. »</em><br /><a href="http://www.rebonds.net/images/ART_THÉRAPIE/maison.JPG" class="jcepopup" data-mediabox-title="Une maison en céramique réalisée par un des patients de Suzanne Daigeler (Photo : S.D.)." data-mediabox="1"><img src="http://www.rebonds.net/images/ART_THÉRAPIE/maison.JPG" alt="maison" width="433" height="274" style="margin-left: 15px; border: 2px double #e2e2e2; float: right;" /></a><br /><span style="font-size: 14pt;"><strong><span style="color: #ff615d;">L'art-thérapeute transmet un élan</span></strong></span></p>
<p>Depuis ses débuts, a-t-elle vu des changements chez les jeunes ? <em>« Je vois qu'ils avancent au niveau de leur création. Au départ, certains ne font que des miettes, puis ils les assemblent. Et quand on trouve un thème qui les intéresse, ça avance. En ce moment, il y en a un qui fabrique des fontaines, un autre des toboggans... »</em> Ses propositions doivent-elles régler des problèmes précis ? <em>« Oui et non. J'accompagne surtout un projet de création s'il y en a un. Ensuite, je fais en fonction des difficultés et des observations. Certains jeunes ont tellement été dans leur bulle que le but, c'est déjà qu'ils expérimentent le monde. Et dans cet atelier, ils peuvent faire des expériences de matières et d'éléments. On travaille aussi sur le plaisir : savoir jouer est un pré-requis pour construire. Enfin, il faut trouver ce qui maintiendra leur attention. »</em><br />La poterie suppose plusieurs étapes de transformation et ainsi, de nombreuses possibilités de création : le modelage, le tournage, la cuisson… <em>« Quand un jeune voit l'objet émaillé sortir du four, c'est comme s'il recevait un cadeau en plus de son travail ; ça le valorise. »</em></p>
<p><span style="color: #fc615d;">_________________________________________________________________________</span></p>
<h3>Coline Bescond : « La musique émane de nous »</h3>
<p><span style="color: #fc615d;">_________________________________________________________________________</span></p>
<p>Qu'est-ce que la création, sinon un prolongement de nous-mêmes ? La mise au jour d'une énergie qui, de toute façon, vit en nous ? Une extériorisation, une expression qui s'adresse autant à nous-mêmes qu'à Autrui, dans une tentative d'affirmation et de connection aux éléments qui constituent le monde.<br />N'en est-il pas ainsi de la musique ? Pour le psychiatre Jean-Pierre Klein, l'intérêt de la musique en art-thérapie tient à son essence même : <em>« L'intérêt, entre autres, de la musique, tient à son rapport ambigu entre le dedans et le dehors, l'individu et le groupe. La musique nous entoure et nous pénètre à la fois, elle est commune et nous la percevons singulièrement, elle émane de nous : voix, souffle dans un instrument, ou main qui le touche, le frappe, le pince… et elle nous envahit. »</em> <span style="font-size: 8pt;">(4)</span><br /><br /><strong>Jeudi 24 janvier 2019 – 18 h 30 – Bourges</strong></p>
<p>Je suis au centre d'un cercle et des sons m'envahissent de toutes parts : ils entrent par mes tympans, ressortent par les cellules de ma peau et mes cheveux, me touchent le coeur et la respiration, s'infiltrent dans mes vaisseaux, descendent jusque dans mes pieds avant de retourner en terre. D'autres virevoltent à travers toute la pièce et me frôlent, tels une multitude de papillons. Ce sont des voix qui s'entremêlent, se courent après puis s'étreignent dans un même souffle. Parfois, elles se font plus fortes, avant de diminuer en intensité. Elles ne prononcent pas de mots mais de simples sons continus qu'elles dirigent vers moi.<br />C'est ainsi que j'ai été accueillie au sein de l'atelier d'exploration vocale de l'association Domilune <span style="font-size: 8pt;">(5)</span>, animé par la musicienne et musicothérapeute Coline Bescond. Chaque nouveau membre a droit à ce présent, que les autres participants lui offrent généreusement.</p>
<p><span style="font-size: 14pt; color: #fc615d;"><strong>Une forme d'improvisation</strong></span></p>
<p>Au cours de cette séance de deux heures, le petit groupe constitué de six femmes a expérimenté l'effet de ses voix sur ses corps et ses esprits, en se saisissant des propositions de Coline Bescond : par exemple, se servir de son doigt comme un crayon traçant dans l'espace des formes imaginaires ; quels sons peuvent bien sortir pour accompagner ce geste ? Le geste lui-même peut tantôt pointer, tantôt esquisser des entrelacs, tantôt tracer des lignes. La voix le suit-elle ?<a href="http://www.rebonds.net/images/ART_THÉRAPIE/domilune_4.jpeg" class="jcepopup" data-mediabox-title="Les percussions peuvent soutenir l'exploration vocale guidée par Coline Bescond (Photo : Domilune)." data-mediabox="1"><img src="http://www.rebonds.net/images/ART_THÉRAPIE/domilune_4.jpeg" alt="domilune 4" width="331" height="198" style="margin-left: 15px; border: 2px double #e2e2e2; float: right;" /></a></p>
<p>Au moment où je réponds à la proposition, je ne me pose aucune question. Car ici encore, il s'agit de lâcher prise, de laisser se révéler ce qui a besoin d'être révélé. Une forme d'improvisation autour d'un thème donné.<br />Bientôt, Coline Bescond nous demande de déployer un large morceau de tissu entre nous et nous explorons à nouveau sa proposition en se servant du contact avec cette matière douce. Symboliquement et physiquement, toutes les participantes sont désormais reliées entre elles. Mais déjà, par la voix, elles se rejoignent régulièrement dans des espaces d'harmonie.<br />Le tissu est ensuite laissé de côté pour un contact plus direct : c'est main contre main, le corps engagé, que l'improvisation vocale se poursuit. Lorsqu'on doit reprendre son souffle, les mains se décollent, pour se retrouver dans l'expiration. <br />Pour terminer, Coline Bescond nous confie de petits tambours, excepté à l'une d'entre nous qui improvisera un solo vocal, selon son inspiration du moment. Les percussions sont aussi libres de s'exprimer comme elles l'entendent. La coordination avec la voix prend quelques instants, puis s'aligne. Chacune garde sa place, est à l'écoute des autres. La répétition amène à une extrême concentration : rien d'autre n'existe que ce qui se joue ici et maintenant.<br />A la fin de chaque proposition, Coline Bescond interroge les participantes sur ce qu'elles ont ressenti. Le partage est volontaire, jamais contraint.<br />Si les personnes qui viennent à Coline Bescond ont des profils variés, toutes ont un objectif commun : <em>« retrouver une puissance de vie »</em>. <em>« Elles ont un besoin de pouvoir vibrer au monde par la voix »</em>, précise-t-elle. <br /><br /><span style="color: #fc615d;"><strong><span style="font-size: 14pt;">« Un espace de liberté »</span></strong></span></p>
<p>La musicothérapie s'adresse à toute la population : nourrissons, jeunes enfants, adolescents, adultes, personnes âgées… mais aussi <em>« à des personnes présentant des souffrances ou des difficultés liées à des troubles psychiques, sensoriels, physiques, neurologiques ou en difficultés psycho-sociales »</em>.<br />Les séances sont proposées en individuel, en groupe ou en famille, selon le contexte et le projet de soin ou d'accompagnement.<br />Coline Bescond met en œuvre une musicothérapie active, durant laquelle les participants sont acteurs ; la musicothérapie réceptive est un autre courant qui privilégie l'écoute.</p>
<p>Outre l'atelier d'exploration vocale, Coline Bescond a déjà pratiqué la musicothérapie en EHPAD (Etablissement d'Hébergement pour Personnes Agées Dépendantes), en ESAT (Etablissement Spécialisé d'Aide par le Travail), pour la PMI (Protection Maternelle Infantile), en Maison d'arrêt, par exemple.<br />Comment est-elle devenue musicothérapeute ? <em>« J'ai suivi des études de musicologie à Tours. A l'époque, j'étais pianiste. Mais à 20 ans, la musicothérapie m'intéressait déjà car j'avais voulu faire mon mémoire de maîtrise sur le sujet. Mais je me posais des questions… Pour moi, la musique était avant tout un art et non un outil. La musique n'était pas faite pour être utilisée. »</em> Elle prend alors un autre chemin et se forme comme chef de choeur au centre d'art polyphonique de Paris.<a href="http://www.rebonds.net/images/ART_THÉRAPIE/domilune_5_bis.jpeg" class="jcepopup" data-mediabox-title="Coline Bescond anime des ateliers dans des structures spécialisées (Photo : Domilune)." data-mediabox="1"><img src="http://www.rebonds.net/images/ART_THÉRAPIE/domilune_5_bis.jpeg" alt="domilune 5 bis" width="233" height="229" style="margin-left: 15px; border: 2px double #e2e2e2; float: right;" /></a><br />En s'installant à Bourges, ne se sentant pas libre d'enseigner dans des écoles « classiques », elle fonde Domilune en 1999. <em>« J'aimais l'enseignement mais dans les écoles, on apprend quelque chose, on ne se sert pas forcément des connaissances de la personne. On veut apprendre la musique comme si elle ne nous appartenait pas. Il faut que chaque personne sente qu'elle a toute sa place et que la créativité est en elle. C'est très important. Même si la personne n'a pas de technique, elle peut ressentir qu'elle a sa place dans l'univers et qu'elle est une force de création. »</em><br />En 2011, elle suit une formation d'art-thérapeute à l'INECAT (Institut National d'Expression, de Création, d'Art et Transformation).</p>
<p>Quels effets la musicothérapie produit-elle sur les participants à ses ateliers ? <em>« Globalement, ils peuvent mieux s'exprimer. Sur les personnes handicapées mentales, par exemple, on remarque une diminution des troubles compulsifs. </em>» Les résultats ne sont pas toujours immédiats, c'est pourquoi la persévérance est essentielle : <em>« Il y a un moment où il se passe quelque chose, mais si on n'y revient pas, il ne s'agira que d'un souvenir fugace alors que si on persévère, quelque chose sort d'on ne sait où. Avec la voix, on fait des découvertes jubilatoires. Il n'y a pas de juste ni de faux dans les sons produits, pas d'intention particulière, c'est la magie de la présence de chacun : il existe ici et maintenant un espace de liberté. »</em></p>
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<h3>Le corps en mouvement avec Adeline Loosli</h3>
<p><span style="color: #fc615d;">___________________________________________________________________</span></p>
<p><em></em>Le recours à la danse dans l'art-thérapie semble moins répandu que les arts plastiques ou la musique. Si sa fonction cathartique remonte bien loin dans l'histoire de l'humanité, notamment dans les rites tribaux, c'est dans les années 1930 aux Etats-Unis que la danse-thérapie prit sa forme moderne, avec Marian Chace. Différents courants co-existent, plus ou moins empreints de psychanalyse, mais ils partagent des concepts communs comme le corps global ou la fonction de communication non verbale du corps. Comme l'écrit Jean-Pierre Klein, <em>« le corps devient symbole sans cesser d'être corps »</em>. Le participant peut <em>« être à soi-même son propre réanimateur </em>» <span style="font-size: 8pt;">(4)</span>.</p>
<p>Pour Adeline Loosli <span style="font-size: 8pt;">(6)</span>, danse-thérapeute installée à Vierzon, la danse-thérapie travaille sur <em>« la revalorisation et l'estime de soi »</em>, <em>« les relations »</em>, <em>« la communication »</em>, <em>« l'expression »</em>. <em>« Le simple fait de mettre le corps en mouvement peut aussi libérer certaines tensions </em>», souligne-t-elle.<br />Elle intervient auprès de personnes atteintes de diabète et en surpoids, des adultes en situation de handicap physique ou mental, des personnes suivies par un service psychiatrique… Elle s'était installée dans un cabinet avec une consœur, mais face à la difficulté de trouver un médecin prescripteur, elle a dû arrêter ses consultations individuelles et travaille désormais pour des associations et structures spécialisées.<br /><br /><strong><span style="font-size: 14pt; color: #ff615d;">Une dimension artistique plus que physique</span></strong></p>
<p>Quel est son parcours ? <em>« Je pratique la danse depuis l'âge de 6 ans. Mon père considérait que ce n'était pas un métier, alors j'ai dû suivre des études de comptabilité. J'ai obtenu mon diplôme d'expert-comptable et j'ai travaillé dans un cabinet mais ça ne me plaisait pas. Il y a dix ans, j'ai passé un DU (Diplôme Universitaire) d'art-thérapie à la fac de médecine à Tours. La formation s'est déroulée une semaine par mois pendant deux ans ; j'ai pu m'arranger avec mon employeur. »</em><br />Pourquoi la formation est-elle dispensée à la faculté de médecine ? Comprend-elle des cours d'anatomie ? <em>« Non, on étudie surtout les psycho-pathologies. Dans cette formation, toutes les pratiques sont réunies : arts plastiques, musique, danse… C'est intéressant en terme d'échanges. Il n'y avait pas beaucoup de danse-thérapeutes. »</em><br />Pour son mémoire, elle a choisi le thème de l'anorexie mentale. <em>« Ce n'était pas évident parce que normalement, l'activité physique est interdite aux anorexiques, pour éviter la perte de poids. Mais j'ai pu intégrer le service diabétique de l'hôpital Jacques-Coeur à Bourges, qui accueille les jeunes femmes anorexiques de plus de 18 ans. J'ai axé mon travail sur la dimension artistique, et non sur l'activité physique. J'ai constaté qu'elles n'avaient pas perdu de poids et qu'elles ressentaient un certain épanouissement, de la détente. Cétait une expérience positive. »</em></p>
<p>Une fois son diplôme décroché et suite à son stage à l'hôpital Jacques-Coeur, une association de diabétiques a fait appel à elle. <em>« Petit à petit, je sème des graines. J'envoie des cv, j'essaie de faire circuler l'information par le bouche-à-oreille… Les refus sont généralement liés à un manque de budget. Dans certaines structures, ils peinent déjà à embaucher des infirmières... Il faut aussi rencontrer des praticiens qui sont ouverts à ce type de thérapies. »<a href="http://www.rebonds.net/images/ART_THÉRAPIE/adeline_loosli.jpeg" class="jcepopup" data-mediabox-title="Les séances proposées par Adeline Loosli se déroulent surtout en groupe (Photo : A.L.)." data-mediabox="1"><img src="http://www.rebonds.net/images/ART_THÉRAPIE/adeline_loosli.jpeg" alt="adeline loosli" width="389" height="169" style="margin-left: 15px; border: 2px double #e2e2e2; float: right;" /></a><em></em></em><br /><br /><span style="font-size: 14pt; color: #ff615d;"><strong>Rester positive</strong></span></p>
<p>Toujours pour des questions budgétaires, l'ARS (Agence Régionale de Santé) préconise des séances en groupe, avec environ six personnes. Mais tout devrait plutôt dépendre des objectifs thérapeutiques. <em>« Par exemple, si on veut travailler la confiance en soi, le groupe, c'est bien. Mais pour la concentration, en individuel, c'est mieux. »</em><br />Comment se déroule une séance « type » ? <em>« Nous commençons par un échauffement avec un temps d'auto-massage pour être à l'écoute de son corps. Ensuite, je propose un exercice libre ou semi-dirigé qui permet de travailler les repères dans l'espace, le regard, le contact avec les autres… Vient un temps de chorégraphie : les participants choisissent la musique, un thème, des mouvements, le mode d'expression corporelle… Enfin, nous terminons par un temps de retour au calme et des échanges. Chacun dit ce qu'il a envie de dire, mais parfois, les participants n'ont pas accès à la verbalisation. J'observe des évolutions. J'essaie de rester positive, je ne souligne que les progrès. »</em></p>
<p>Certains patients abordent la première séance avec une certaine appréhension, voire refusent de danser. <em>« Je ne les force pas. Je leur dis bien : si vous ne voulez pas, ce n'est pas obligatoire. Je respecte ce qu'ils ont envie ou non de faire. Ils finissent par avoir confiance et par intégrer le groupe. C'est le lien qu'on crée qui est important. »<em></em></em></p>
<p>Comme en arts plastiques ou en musique, le ou la danse-thérapeute doit rester en phase avec sa discipline. Adeline Loosli pratique toujours la danse classique et contemporaine. <em>« Ça me nourrit et m'inspire. »</em></p>
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<h3>« Ce qui reste encore possible à faire »</h3>
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<p>Dans quelques jours, à Paris, je testerai un atelier de danse intuitive appelé aussi mouvement authentique. J'ai hâte de renouer avec cette partie de mon histoire – la danse – et d'observer les réactions de mon corps et de mon esprit.<a href="http://www.rebonds.net/images/ART_THÉRAPIE/Pauline_D_1.jpg" class="jcepopup" data-mediabox-title="Peinture : Pauline Duchez." data-mediabox="1"><img src="http://www.rebonds.net/images/ART_THÉRAPIE/Pauline_D_1.jpg" alt="Pauline D 1" width="442" height="344" style="margin-left: 15px; border: 2px double #e2e2e2; float: right;" /></a><em></em><br />Je cherche à créer une relation fraternelle, apaisée, entre mon corps traumatisé et mon esprit qui peine à l'accepter. J'ai parfois l'impression d'être hors de moi, au sens littéral du terme, et de les regarder se chamailler : l'esprit dispute le corps de n'être plus assez agile, rapide, fort, pour concrétiser ses idées sans cesse renouvellées, ses élans, ses désirs ; le corps boude et se plaint d'être incompris, tout las et endolori qu'il est… Parfois, je les surprends à rire de concert et leur énergie commune me porte et m'emporte. D'autres fois, je les écoute s'écharper, en rêvant à des jours meilleurs. Je sais qu'une réconciliation durable est la clé du bien être. Elle viendra.</p>
<p>Le processus de création, chez moi, se concrétise quasiment chaque jour de ma vie par l'écriture. Il ne s'agit certes pas toujours d'art, parfois seulement de technique, mais ces instants contribuent forcément à la transformation de mon être. Chacun.e d'entre nous peut l'expérimenter, dans des disciplines aussi variées que la peinture, le dessin, la gravure, le chant, la danse et l'écriture, mais aussi les marionnettes, la vidéo, la photographie… Tous ces médiums permettent de nous révéler nos parts d'ombre et de lumière et, le plus important, de <em>« ce qui reste encore possible à faire »</em>...</p>
<p style="text-align: left;"><strong>Fanny Lancelin</strong><span style="font-size: 8pt;"> </span></p>
<p style="text-align: left;"><span style="font-size: 8pt;">(1) La table-palette a été conçue par Arno Stern : <a href="http://www.arnostern.com/">http://www.arnostern.com/</a><br />Lire aussi la rubrique (Re)visiter.<br />(2) <a href="http://paulineduchez.wixsite.com/ateliers">http://paulineduchez.wixsite.com/ateliers</a><br />(3) Anne Loudenot a créé l'Institut d'art-thérapie spirituelle qui se trouve à Paris : <a href="https://www.artlifecoach.net/">https://www.artlifecoach.net/</a><br />(4) Jean-Pierre Klein, « L'art-thérapie », PUF, 2012.<br />(5) Domilune : <a href="https://ateliersdomilune.wixsite.com/domilune">https://ateliersdomilune.wixsite.com/domilune</a><br />(6) <a href="https://art-therapie-vierzon.fr/contact/1">https://art-therapie-vierzon.fr/contact/1</a><br /></span></p>
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<div class="panel panel-primary">
<div class="panel-heading" style="text-align: left;">
<h3 class="panel-title">Art-thérapeute : ce qu'il est... ou pas</h3>
</div>
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<li style="text-align: left;">Il existe des diplômes universitaires mention art-thérapie, reconnus par l’État et délivrés par des facultés de médecine comme celles de Tours, Grenoble ou de Lille.<br />Mais la plupart des instituts indépendants de formation délivrent un certificat. C'est le cas de l'AFRAPATEM <span style="font-size: 8pt;">(1)</span> ou de PROFAC<span style="font-size: 8pt;"> (2)</span>, par exemple, dont les référenciels sont publiés au Journal Officiel.<br />On y lit ainsi que <em>« L'art-thérapeute crée les conditions favorables à l’expression des personnes en difficulté (psychologique, physique ou sociale), à travers des dispositifs créatifs qui ne sont pas orientés vers la production comme dans le champ habituel de l’art.</em><br /><em>L'art-thérapeute travaille exclusivement sur indication médicale en s’appuyant sur des techniques spécifiques à sa spécialisation à savoir : des dispositifs élaborés et réélaborés à partir de l’expérience de terrain et la recherche clinique.</em><br /><em>Il accompagne et soutient des personnes de tout âge dans des situations transitoires ou en processus de changement, en situation de crise ou dans un but préventif.</em><br /><em>L'art-thérapie est définie comme une pratique de soin utilisant des dispositifs inscrits dans le suivi créatif individuel ou groupal.</em><br /><em>Cette méthode s'appuie sur l’expérience créatrice comme moyen d'expression et offre des voies de communication non limités à la parole. </em><br /><em>Par cette approche, la personne peut percevoir et communiquer différemment son vécu singulier. </em><br /><em>L'art-thérapeute se différencie clairement :</em><br /><em>- du médiateur artistique ou de l'animateur d'atelier occupationnel, dans la mesure où ses interventions se font exclusivement sur indication médicale et contrôle du prescripteur ;</em><br /><em>- du psychothérapeute du fait qu'il n'interprète absolument jamais les productions ;</em><br /><em>- de l’ergothérapeute qui intervient dans le champ de la rééducation fonctionnelle. »</em><br />La profession, qui peut être exercée en libéral, est revendiquée par des profils de « thérapeutes » très variés qui s'apparentent parfois plutôt à des coachs de vie ou de développement personnel. Le risque ? Que l'auto-proclamé « thérapeute » ne maîtrise pas les bases de la psychologie et qu'il se laisse emporter par les émotions de celui ou celle qu'il doit accompagner. Mais, comme dans toute relation, tout est affaire de sensibilité et de confiance…<br /><br /><span style="font-size: 8pt;">(1) AFRAPATEM : <a href="http://art-therapie-tours.net/">http://art-therapie-tours.net/</a></span><br /><span style="font-size: 8pt;">(2) PROFAC : <a href="https://www.artherapie.com/">https://www.artherapie.com/</a></span></li>
</ul>
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