# 37 Pour un autre enfantement (juin 2020)(Re)bonds est un magazine mensuel créé par Fanny Lancelin, journaliste installée dans le Cher. Son but : à travers, des portraits d'habitant.es du Berry, raconter des parcours alternatifs, des modes de vie où le respect des êtres vivants et de leur environnement tient une place centrale.http://www.rebonds.net/37pourunautreenfantement/122-recreations2023-05-11T19:27:27+02:00(Re)bonds.netJoomla! - Open Source Content Management« Mettre au monde », Patrice Van Eersel2017-04-02T20:07:14+02:002017-04-02T20:07:14+02:00http://www.rebonds.net/37pourunautreenfantement/122-recreations/616-mettreaumondepatricevaneerselSuper User<p><img src="http://www.rebonds.net/images/AAD/mettre_au_monde.jpeg" /></p><p>Ce livre ne s'adresse pas seulement aux femmes qui s'apprêteraient à accoucher. S'il est formidable, c'est avant tout parce qu'il parle d'où nous venons tou·te·s et par là même, des rapports au monde qui découlent de ce point de départ. Ils sont différents d'une culture à l'autre, d'une époque à l'autre, d'une famille à l'autre, d'une méthode d'accouchement à l'autre...</p>
<p>L'auteur de « Mettre au monde – enquêtes sur les mystères de la naissance » <span style="font-size: 8pt;">(1)</span> est un homme. Cela pourrait rendre méfiant·e·s : pourquoi donc un homme se sentirait-il légitime d'écrire sur ce thème ? N'y aurait-il pas d'expertes mieux placées pour s'exprimer en la matière ?</p>
<p>Dès le début de l'ouvrage, Patrice Van Eersel s'explique : le journaliste (qui participa au lancement de « Libération » en 1973) a parcouru le monde pendant vingt ans pour réaliser ses reportages et il a eu de nombreuses occasions d'assister à des accouchements<em> « en tout genre »</em>.<br />En tant qu'homme, il s'est particulièrement intéressé à la place que tiennent les pères dans le processus d'accompagnement. Il écrit : <em>« Entre la génération de mon père et la mienne [l'auteur est né en 1949, ndlr], entre la première et la seconde moitié du XXe siècle, un tel renversement s'est produit quant au rôle de l'homme dans cette histoire que j'éprouve le besoin de tenter sinon un bilan, du moins une diagonale à travers le terrain, même partielle et partiale. »</em><br />Autre raison pour laquelle il a souhaité écrire cet ouvrage : <em>« la joie incommensurable que m'ont donnée [s]es enfants »</em>. Chacun·e est arrivé·e dans un contexte particulier et l'auteur se sert de ses expériences pour nous rappeler régulièrement son point de vie : celui d'un Occidental qui habite un pays et un siècle, où la péridurale est la norme et la douleur une hérésie.<br />Enfin, Patrice Van Eersel veut explorer ce qu'il appelle <em>« les paradoxes »</em> : douleur-anesthésie, naturel-artificiel, naissance-mort…</p>
<p>Au fil des pages, il raconte comment la médecine a progressivement investi le champ de l'enfantement, autrefois réservé aux femmes, aujourd'hui largement dominé par les hommes ; comment cette médicalisation a modifié profondément notre rapport à notre corps, mais aussi nous a coupé de notre nature de mammifère ; comment, pour se reconnecter à elle, des hommes et des femmes entendent faire « autrement », en s'inspirant de travaux scientifiques et / ou de rituels ancestraux ; comment, surtout, la manière de « mettre au monde » peut relever d'un choix et devenir une véritable affirmation de son être.</p>
<p>A travers des exemples concrets, des témoignages et des entretiens qu'il a réalisés, Patrice Van Eersel emporte les lecteur·ice·s. Son style est sobre et vivant. Il se garde de porter des jugements mais apporte à la fois des questionnements et des éléments de réponses, notamment en présentant des méthodes d'accouchement très variées.<br />Il n'élude aucun sujet : s'il sait parler de violence, de douleur et de peur, il sait aussi être poétique, en évoquant la musique, le cosmos, l'amour et les soigneurs d'âmes qui entourent l'acte de « mettre au monde ». Expression que chacun·e pourra prendre ici dans son acception littérale ou symbolique.<br /><br /><span style="font-size: 8pt;">(1) Editions Albin-Michel.</span></p>
<p></p><p><img src="http://www.rebonds.net/images/AAD/mettre_au_monde.jpeg" /></p><p>Ce livre ne s'adresse pas seulement aux femmes qui s'apprêteraient à accoucher. S'il est formidable, c'est avant tout parce qu'il parle d'où nous venons tou·te·s et par là même, des rapports au monde qui découlent de ce point de départ. Ils sont différents d'une culture à l'autre, d'une époque à l'autre, d'une famille à l'autre, d'une méthode d'accouchement à l'autre...</p>
<p>L'auteur de « Mettre au monde – enquêtes sur les mystères de la naissance » <span style="font-size: 8pt;">(1)</span> est un homme. Cela pourrait rendre méfiant·e·s : pourquoi donc un homme se sentirait-il légitime d'écrire sur ce thème ? N'y aurait-il pas d'expertes mieux placées pour s'exprimer en la matière ?</p>
<p>Dès le début de l'ouvrage, Patrice Van Eersel s'explique : le journaliste (qui participa au lancement de « Libération » en 1973) a parcouru le monde pendant vingt ans pour réaliser ses reportages et il a eu de nombreuses occasions d'assister à des accouchements<em> « en tout genre »</em>.<br />En tant qu'homme, il s'est particulièrement intéressé à la place que tiennent les pères dans le processus d'accompagnement. Il écrit : <em>« Entre la génération de mon père et la mienne [l'auteur est né en 1949, ndlr], entre la première et la seconde moitié du XXe siècle, un tel renversement s'est produit quant au rôle de l'homme dans cette histoire que j'éprouve le besoin de tenter sinon un bilan, du moins une diagonale à travers le terrain, même partielle et partiale. »</em><br />Autre raison pour laquelle il a souhaité écrire cet ouvrage : <em>« la joie incommensurable que m'ont donnée [s]es enfants »</em>. Chacun·e est arrivé·e dans un contexte particulier et l'auteur se sert de ses expériences pour nous rappeler régulièrement son point de vie : celui d'un Occidental qui habite un pays et un siècle, où la péridurale est la norme et la douleur une hérésie.<br />Enfin, Patrice Van Eersel veut explorer ce qu'il appelle <em>« les paradoxes »</em> : douleur-anesthésie, naturel-artificiel, naissance-mort…</p>
<p>Au fil des pages, il raconte comment la médecine a progressivement investi le champ de l'enfantement, autrefois réservé aux femmes, aujourd'hui largement dominé par les hommes ; comment cette médicalisation a modifié profondément notre rapport à notre corps, mais aussi nous a coupé de notre nature de mammifère ; comment, pour se reconnecter à elle, des hommes et des femmes entendent faire « autrement », en s'inspirant de travaux scientifiques et / ou de rituels ancestraux ; comment, surtout, la manière de « mettre au monde » peut relever d'un choix et devenir une véritable affirmation de son être.</p>
<p>A travers des exemples concrets, des témoignages et des entretiens qu'il a réalisés, Patrice Van Eersel emporte les lecteur·ice·s. Son style est sobre et vivant. Il se garde de porter des jugements mais apporte à la fois des questionnements et des éléments de réponses, notamment en présentant des méthodes d'accouchement très variées.<br />Il n'élude aucun sujet : s'il sait parler de violence, de douleur et de peur, il sait aussi être poétique, en évoquant la musique, le cosmos, l'amour et les soigneurs d'âmes qui entourent l'acte de « mettre au monde ». Expression que chacun·e pourra prendre ici dans son acception littérale ou symbolique.<br /><br /><span style="font-size: 8pt;">(1) Editions Albin-Michel.</span></p>
<p></p>« Entre leurs mains », de Céline Darmayan2017-04-02T20:07:14+02:002017-04-02T20:07:14+02:00http://www.rebonds.net/37pourunautreenfantement/122-recreations/617-entreleursmainsdecelinedarmayanSuper User<p><img src="http://www.rebonds.net/images/AAD/Affiche-Entre-leurs-mains-A3.jpg" /></p><p>Ce documentaire est sorti en 2014 mais il reste tout à fait d'actualité. Il suit des sages-femmes qui ont fait le choix d'accompagner uniquement des accouchements physiologiques, à domicile mais aussi en maisons de naissance et même en maternité.</p>
<p>Pas de commentaires ni de voix off. Le regard de la réalisatrice, Céline Darmayan, se veut aussi léger que possible. Sans jugement a priori. Durant 1 h 20, les spectateur·ice·s suivent Muriel, Sidonie, Céline et Jacqueline dans leur activité : sages-femmes libérales, elles préparent et accompagnent des couples vers un accouchement le plus naturel possible. Deux d'entre elles sont également formatrices auprès de professionnel·le·s.</p>
<p>Ici, comme le souligne Jacqueline, il n'est pas question de faire l'apologie de l'accouchement à la maison, mais plutôt de faire en sorte que les pratiques des sages-femmes permettent à la physiologie d'être respectée.</p>
<p>La caméra est posée tantôt dans un cabinet où Sidonie rencontre des parents désireu·se·s d'être informé·e·s ou dans une salle où Jacqueline dispense des cours ; tantôt dans l'intimité d'un appartement durant un enfantement à domicile avec Céline ou Muriel. Les images sont belles, jamais intrusives et on assiste même à l'arrivée d'un nouveau-né, au fond d'une petite piscine, dans la pénombre rassurante du cocon tissé tout juste exprès ce soir-là.</p>
<p>Mais Céline Darmayan n'occulte pas les questions que soulèvent ces pratiques dites « alternatives ». Elle montre que les sages-femmes sont formées et équipées des matériels les plus en pointe. Elle montre aussi que toutes tiennent les mêmes discours : ces accouchements sont proposés à des femmes en bonne santé, à risque bas et, en cas de problème, le transfert vers une maternité est la règle. Enfin, elle montre les difficultés que rencontre cette profession à faire reconnaître le droit d'exercer en dehors de structures : blocage du corps médical, problèmes d'assurance, menace de l'ordre des médecins… Si certaines baissent les bras, d'autres tiennent bon.</p>
<p>Diffusé sur la chaîne Public Sénat, ce documentaire et le débat qui l'accompagne sont désormais visibles sur You Tube : <a href="https://www.youtube.com/watch?v=_AdqqP796hs">https://www.youtube.com/watch?v=_AdqqP796hs</a></p>
<p>Plus de renseignements et la bande annonce sur le site du film : <a href="https://entreleursmains.wordpress.com/">https://entreleursmains.wordpress.com/</a></p><p><img src="http://www.rebonds.net/images/AAD/Affiche-Entre-leurs-mains-A3.jpg" /></p><p>Ce documentaire est sorti en 2014 mais il reste tout à fait d'actualité. Il suit des sages-femmes qui ont fait le choix d'accompagner uniquement des accouchements physiologiques, à domicile mais aussi en maisons de naissance et même en maternité.</p>
<p>Pas de commentaires ni de voix off. Le regard de la réalisatrice, Céline Darmayan, se veut aussi léger que possible. Sans jugement a priori. Durant 1 h 20, les spectateur·ice·s suivent Muriel, Sidonie, Céline et Jacqueline dans leur activité : sages-femmes libérales, elles préparent et accompagnent des couples vers un accouchement le plus naturel possible. Deux d'entre elles sont également formatrices auprès de professionnel·le·s.</p>
<p>Ici, comme le souligne Jacqueline, il n'est pas question de faire l'apologie de l'accouchement à la maison, mais plutôt de faire en sorte que les pratiques des sages-femmes permettent à la physiologie d'être respectée.</p>
<p>La caméra est posée tantôt dans un cabinet où Sidonie rencontre des parents désireu·se·s d'être informé·e·s ou dans une salle où Jacqueline dispense des cours ; tantôt dans l'intimité d'un appartement durant un enfantement à domicile avec Céline ou Muriel. Les images sont belles, jamais intrusives et on assiste même à l'arrivée d'un nouveau-né, au fond d'une petite piscine, dans la pénombre rassurante du cocon tissé tout juste exprès ce soir-là.</p>
<p>Mais Céline Darmayan n'occulte pas les questions que soulèvent ces pratiques dites « alternatives ». Elle montre que les sages-femmes sont formées et équipées des matériels les plus en pointe. Elle montre aussi que toutes tiennent les mêmes discours : ces accouchements sont proposés à des femmes en bonne santé, à risque bas et, en cas de problème, le transfert vers une maternité est la règle. Enfin, elle montre les difficultés que rencontre cette profession à faire reconnaître le droit d'exercer en dehors de structures : blocage du corps médical, problèmes d'assurance, menace de l'ordre des médecins… Si certaines baissent les bras, d'autres tiennent bon.</p>
<p>Diffusé sur la chaîne Public Sénat, ce documentaire et le débat qui l'accompagne sont désormais visibles sur You Tube : <a href="https://www.youtube.com/watch?v=_AdqqP796hs">https://www.youtube.com/watch?v=_AdqqP796hs</a></p>
<p>Plus de renseignements et la bande annonce sur le site du film : <a href="https://entreleursmains.wordpress.com/">https://entreleursmains.wordpress.com/</a></p>« Le choix », Désirée et Alain Frappier2017-04-02T20:07:14+02:002017-04-02T20:07:14+02:00http://www.rebonds.net/37pourunautreenfantement/122-recreations/618-lechoixdesireeetalainfrappierSuper User<p><img src="http://www.rebonds.net/images/AAD/a.jpg" /></p><p>Chaque année en France, 200.000 femmes avortent. Elles ont acquis ce droit il y a 45 ans, au prix de longues et douloureuses luttes. Cette histoire tutoie celle de Désirée Frappier. Dans la bande dessinée « Le choix », elle parle, avec délicatesse et force, des enfants désiré·e·s… ou non.</p>
<p>Pendant longtemps, Désirée Frappier s'est interrogée : pourquoi ne trouvait-elle pas sa place au sein de sa famille ? Pourquoi devait-elle sans cesse la quitter pour vivre dans d'autres foyers ? Ses souvenirs les plus heureux de son enfance : un trimestre passé auprès de sa grand-mère trop vite disparue, qu'elle surnomme « Bonheur »...</p>
<p>Adolescente, son chemin croise celui de jeunes femmes qui doivent ruser pour obtenir une contraception. Nous sommes dans les années 1970, la majorité s'acquiert à 21 ans et les femmes sont encore largement prisonnières de l'autorité de leur père.<br />Au pensionnat de l'école des filles, Désirée rencontre des militantes du MLAC, le Mouvement pour la Libération de l'Avortement et de la Contraception. Elles mènent notamment des actions pour aider les femmes à avorter en toute sécurité (avec la méthode Karman <span style="font-size: 8pt;">(1)</span>, par exemple), organisent des transports vers les pays qui ont déjà légalisé l'avortement, ou manifestent leur soutien à des luttes sociales comme les ouvrières de LIP <span style="font-size: 8pt;">(2)</span> et les paysannes du Larzac.<br />A l'époque, les médecins qui pratiquent l'avortement, les femmes qui en bénéficient voire les personnes les ayant aidé (financièrement) sont régulièrement traduit·e·s devant les tribunaux.<br />Le 29 novembre 1974, après un débat houleux, parfois violent, à l'Assemblée nationale, la loi dépénalisant l'Interruption Volontaire de Grossesse (IVG) est votée. Elle a été largement portée et défendue par Simone Veil, alors ministre de la Santé.<br />Le combat n'est pas fini. Il faudra encore attendre pour que l'IVG soit remboursée par la Sécurité sociale ou que les mineures n'aient pas besoin de l'autorisation de leurs parents.</p>
<p>Le soir même, la mère de Désirée lui rend visite à son cours de danse. Et lui parle. Et c'est ainsi que la jeune femme comprend, son mal-être, son sentiment de n'avoir jamais eu sa place, de n'avoir jamais été désirée.<em> « J'ai souvent rencontré des gens horrifiés que ma mère ait pu me raconter ses avortements</em>, écrit-elle. <em>On encourage toujours les femmes à souffrir en silence. Et comment aurai-je pu comprendre, sinon ? Les enfants portent les silences de leurs mères, des silences qui se transforment en chagrins qui durent. »</em></p>
<p>Toute la puissance de cette bande dessinée est là. Dans cet entrelacement entre des histoires individuelles – celle de Désirée Frappier et des femmes qu'elle rencontre au cours des années 1970 et 1980 – et notre histoire commune, à tous et à toutes, qui consacre la vraie liberté d'un choix. Celui de disposer de son corps.</p>
<p>Sans tabous, sans tomber dans le débat purement moral ou dans le pathos, Désirée Frappier offre ici un récit sincère, servi par les illustrations de son mari, Alain Frappier.<br />De nombreux témoignages et documents historiques enrichissent le propos, notamment dans un chapitre bonus : coupures de presse, affiches d'époque, sondages, interviews de professionnel·le·s de la santé et de militant·e·s associatif·ve·s…</p>
<p>« Le choix » a été édité en 2015 à l'occasion du 40e anniversaire de la loi dite « Veil » par La Ville Brûle et réédité en 2020 chez Steinkis.</p>
<p>Plus d'informations sur le site des auteur·ice·s : <a href="https://dafrappier.weebly.com/le-choix.html">https://dafrappier.weebly.com/le-choix.html</a></p>
<p><span style="font-size: 8pt;">(1) Méthode Karman : technique qui doit son nom à l'américain Harvey Karman, militant pour la liberté de l'avortement dans les années 1950. Il s'agit d'une méthode d'aspiration du contenu utérin. En France, la première démonstration d'avortement par cette méthode a eu lieu dans l'appartement de Delphine Seyrig en 1972. Elle permettait un avortement sûr, au contraire des techniques employées jusqu'alors par les médecins ou les femmes elles-mêmes, et qui pouvaient leur coûter la vie.</span><br /><span style="font-size: 8pt;">(2) L'usine LIP à Besançon fabriquait des montres. Elle a été le théâtre d'importants mouvements sociaux et d'expériences d'auto-gestion. Cette histoire est racontée notamment dans le documentaire « Les LIP, l'imagination au pouvoir » de Christian Rouaud.</span></p><p><img src="http://www.rebonds.net/images/AAD/a.jpg" /></p><p>Chaque année en France, 200.000 femmes avortent. Elles ont acquis ce droit il y a 45 ans, au prix de longues et douloureuses luttes. Cette histoire tutoie celle de Désirée Frappier. Dans la bande dessinée « Le choix », elle parle, avec délicatesse et force, des enfants désiré·e·s… ou non.</p>
<p>Pendant longtemps, Désirée Frappier s'est interrogée : pourquoi ne trouvait-elle pas sa place au sein de sa famille ? Pourquoi devait-elle sans cesse la quitter pour vivre dans d'autres foyers ? Ses souvenirs les plus heureux de son enfance : un trimestre passé auprès de sa grand-mère trop vite disparue, qu'elle surnomme « Bonheur »...</p>
<p>Adolescente, son chemin croise celui de jeunes femmes qui doivent ruser pour obtenir une contraception. Nous sommes dans les années 1970, la majorité s'acquiert à 21 ans et les femmes sont encore largement prisonnières de l'autorité de leur père.<br />Au pensionnat de l'école des filles, Désirée rencontre des militantes du MLAC, le Mouvement pour la Libération de l'Avortement et de la Contraception. Elles mènent notamment des actions pour aider les femmes à avorter en toute sécurité (avec la méthode Karman <span style="font-size: 8pt;">(1)</span>, par exemple), organisent des transports vers les pays qui ont déjà légalisé l'avortement, ou manifestent leur soutien à des luttes sociales comme les ouvrières de LIP <span style="font-size: 8pt;">(2)</span> et les paysannes du Larzac.<br />A l'époque, les médecins qui pratiquent l'avortement, les femmes qui en bénéficient voire les personnes les ayant aidé (financièrement) sont régulièrement traduit·e·s devant les tribunaux.<br />Le 29 novembre 1974, après un débat houleux, parfois violent, à l'Assemblée nationale, la loi dépénalisant l'Interruption Volontaire de Grossesse (IVG) est votée. Elle a été largement portée et défendue par Simone Veil, alors ministre de la Santé.<br />Le combat n'est pas fini. Il faudra encore attendre pour que l'IVG soit remboursée par la Sécurité sociale ou que les mineures n'aient pas besoin de l'autorisation de leurs parents.</p>
<p>Le soir même, la mère de Désirée lui rend visite à son cours de danse. Et lui parle. Et c'est ainsi que la jeune femme comprend, son mal-être, son sentiment de n'avoir jamais eu sa place, de n'avoir jamais été désirée.<em> « J'ai souvent rencontré des gens horrifiés que ma mère ait pu me raconter ses avortements</em>, écrit-elle. <em>On encourage toujours les femmes à souffrir en silence. Et comment aurai-je pu comprendre, sinon ? Les enfants portent les silences de leurs mères, des silences qui se transforment en chagrins qui durent. »</em></p>
<p>Toute la puissance de cette bande dessinée est là. Dans cet entrelacement entre des histoires individuelles – celle de Désirée Frappier et des femmes qu'elle rencontre au cours des années 1970 et 1980 – et notre histoire commune, à tous et à toutes, qui consacre la vraie liberté d'un choix. Celui de disposer de son corps.</p>
<p>Sans tabous, sans tomber dans le débat purement moral ou dans le pathos, Désirée Frappier offre ici un récit sincère, servi par les illustrations de son mari, Alain Frappier.<br />De nombreux témoignages et documents historiques enrichissent le propos, notamment dans un chapitre bonus : coupures de presse, affiches d'époque, sondages, interviews de professionnel·le·s de la santé et de militant·e·s associatif·ve·s…</p>
<p>« Le choix » a été édité en 2015 à l'occasion du 40e anniversaire de la loi dite « Veil » par La Ville Brûle et réédité en 2020 chez Steinkis.</p>
<p>Plus d'informations sur le site des auteur·ice·s : <a href="https://dafrappier.weebly.com/le-choix.html">https://dafrappier.weebly.com/le-choix.html</a></p>
<p><span style="font-size: 8pt;">(1) Méthode Karman : technique qui doit son nom à l'américain Harvey Karman, militant pour la liberté de l'avortement dans les années 1950. Il s'agit d'une méthode d'aspiration du contenu utérin. En France, la première démonstration d'avortement par cette méthode a eu lieu dans l'appartement de Delphine Seyrig en 1972. Elle permettait un avortement sûr, au contraire des techniques employées jusqu'alors par les médecins ou les femmes elles-mêmes, et qui pouvaient leur coûter la vie.</span><br /><span style="font-size: 8pt;">(2) L'usine LIP à Besançon fabriquait des montres. Elle a été le théâtre d'importants mouvements sociaux et d'expériences d'auto-gestion. Cette histoire est racontée notamment dans le documentaire « Les LIP, l'imagination au pouvoir » de Christian Rouaud.</span></p>L'histoire d'Angélique du Coudray2017-04-02T20:07:14+02:002017-04-02T20:07:14+02:00http://www.rebonds.net/37pourunautreenfantement/122-recreations/619-lhistoiredangeliqueducoudraySuper User<p><img src="http://www.rebonds.net/images/AAD/machine_accouchement.jpeg" /></p><p>Comment l'enfantement était-il accompagné avant l'apparition des sages-femmes ? Pourquoi la fonction s'est-elle professionnalisée ? Cette évolution sociologique est marquée par la figure d'Angélique du Coudray qui, au XVIIIe siècle, forma près de 5.000 femmes à travers toute la France. L'émission « Le Cours de l'Histoire » sur France Culture revient sur son parcours exceptionnel.</p>
<p>C'est Nathalie Sage-Pranchère, auteure d'une thèse de doctorat en histoire intitulée « L'école des sages-femmes : naissance d'un corps professionnel, 1786-1917 »<span style="font-size: 8pt;"> (1)</span>, que Xavier Mauduit, producteur et animateur de l'émission, interrogeait le 12 mai 2020. Le podcast peut encore s'écouter sur le site de France Culture<span style="font-size: 8pt;"> (2)</span>.</p>
<p>On y apprend notamment que dès le XIVe siècle, la France possédait la première et unique école de sages-femmes en Europe, située à l'Hôtel-Dieu de Paris. Avant cette époque (et longtemps après encore), si les pratiques variaient d'une classe sociale à une autre, selon qu'on habitait à la ville ou à la campagne, l'enfantement était majoritairement accompagné par des femmes, appelées accoucheuses ou matrones. Il n'était pas question de « professionnelles », mais de personnes suffisamment expérimentées pour être appelées à assister un accouchement.</p>
<p>A partir du XVIIIe siècle, naît une inquiétude : la population diminue et ce phénomène est associé notamment à la mortalité en couches (de la mère comme de l'enfant). C'est pourquoi, à partir de 1750, les formations des accoucheuses se généralisent.</p>
<p>Angélique-Marguerite Le Boursier du Coudray (dit Angélique du Coudray) est l'une d'entre elles. Née en 1714 à Clermont-Ferrand, elle a d'abord pratiqué la fonction de sage-femme à Paris, avant de retourner dans son Auvergne natale pour partager son savoir. En 1759, elle obtient un brevet royal et entame une itinérance à travers tout le pays qui durera 25 ans ; elle publie également un ouvrage illustré de gravures intitulé « Abrégé de l'art des accouchements »<span style="font-size: 8pt;"> (3)</span>. Mais ce que l'histoire a retenu d'elle, c'est surtout sa « machine » de démonstration : un mannequin permettant à ses élèves de s'exercer précisément aux gestes gynécologiques et obstétricaux. Elle souhaitait ainsi pouvoir s'adresser à toutes les femmes, y compris celles de la campagne, peu instruites et peu lettrées.</p>
<p>Composé de toile et de peau, monté sur une armature de fer, le mannequin est présenté en position gynécologique. Il se compose de la partie basse du corps d'une femme et d'un fœtus, tous deux grandeur nature et reliés par un cordon ombilical. Des étiquettes cousues sur les différents éléments permettaient aux élèves d'apprendre à reconnaître les organes de la reproduction. En tenant le mannequin comme une marionnette, il·le·s pouvaient pratiquer le toucher du col utérin.</p>
<p>Déposée en 1778, il reste un unique exemplaire de ce mannequin au musée Flaubert et d’Histoire de la Médecine, à Rouen.</p>
<p>Au total, Angélique du Coudray aurait formé environ 5.000 femmes, ainsi que des chirurgiens. Ses relations avec ceux-ci étaient parfois houleuses, comme le raconte Nathalie Sage-Pranchère dans cette émission passionnante...<br /><br /><span style="font-size: 8pt;">(1) Thèse soutenue en 2011 et publiée aux Presses Universitaires François Rabelais en 2017.</span><br /><span style="font-size: 8pt;">(2) <a href="https://www.franceculture.fr/emissions/le-cours-de-lhistoire/un-destin-pour-le-soin-quatre-figures-de-lhistoire-du-soin-et-de-la-medecine-24-angelique-du-coudray">https://www.franceculture.fr/emissions/le-cours-de-lhistoire/un-destin-pour-le-soin-quatre-figures-de-lhistoire-du-soin-et-de-la-medecine-24-angelique-du-coudray</a></span><br /><span style="font-size: 8pt;">(3) <a href="https://gallica.bnf.fr/ark">https://gallica.bnf.fr/ark</a>:/12148/bpt6k9766051b.texteImage</span></p>
<p></p><p><img src="http://www.rebonds.net/images/AAD/machine_accouchement.jpeg" /></p><p>Comment l'enfantement était-il accompagné avant l'apparition des sages-femmes ? Pourquoi la fonction s'est-elle professionnalisée ? Cette évolution sociologique est marquée par la figure d'Angélique du Coudray qui, au XVIIIe siècle, forma près de 5.000 femmes à travers toute la France. L'émission « Le Cours de l'Histoire » sur France Culture revient sur son parcours exceptionnel.</p>
<p>C'est Nathalie Sage-Pranchère, auteure d'une thèse de doctorat en histoire intitulée « L'école des sages-femmes : naissance d'un corps professionnel, 1786-1917 »<span style="font-size: 8pt;"> (1)</span>, que Xavier Mauduit, producteur et animateur de l'émission, interrogeait le 12 mai 2020. Le podcast peut encore s'écouter sur le site de France Culture<span style="font-size: 8pt;"> (2)</span>.</p>
<p>On y apprend notamment que dès le XIVe siècle, la France possédait la première et unique école de sages-femmes en Europe, située à l'Hôtel-Dieu de Paris. Avant cette époque (et longtemps après encore), si les pratiques variaient d'une classe sociale à une autre, selon qu'on habitait à la ville ou à la campagne, l'enfantement était majoritairement accompagné par des femmes, appelées accoucheuses ou matrones. Il n'était pas question de « professionnelles », mais de personnes suffisamment expérimentées pour être appelées à assister un accouchement.</p>
<p>A partir du XVIIIe siècle, naît une inquiétude : la population diminue et ce phénomène est associé notamment à la mortalité en couches (de la mère comme de l'enfant). C'est pourquoi, à partir de 1750, les formations des accoucheuses se généralisent.</p>
<p>Angélique-Marguerite Le Boursier du Coudray (dit Angélique du Coudray) est l'une d'entre elles. Née en 1714 à Clermont-Ferrand, elle a d'abord pratiqué la fonction de sage-femme à Paris, avant de retourner dans son Auvergne natale pour partager son savoir. En 1759, elle obtient un brevet royal et entame une itinérance à travers tout le pays qui durera 25 ans ; elle publie également un ouvrage illustré de gravures intitulé « Abrégé de l'art des accouchements »<span style="font-size: 8pt;"> (3)</span>. Mais ce que l'histoire a retenu d'elle, c'est surtout sa « machine » de démonstration : un mannequin permettant à ses élèves de s'exercer précisément aux gestes gynécologiques et obstétricaux. Elle souhaitait ainsi pouvoir s'adresser à toutes les femmes, y compris celles de la campagne, peu instruites et peu lettrées.</p>
<p>Composé de toile et de peau, monté sur une armature de fer, le mannequin est présenté en position gynécologique. Il se compose de la partie basse du corps d'une femme et d'un fœtus, tous deux grandeur nature et reliés par un cordon ombilical. Des étiquettes cousues sur les différents éléments permettaient aux élèves d'apprendre à reconnaître les organes de la reproduction. En tenant le mannequin comme une marionnette, il·le·s pouvaient pratiquer le toucher du col utérin.</p>
<p>Déposée en 1778, il reste un unique exemplaire de ce mannequin au musée Flaubert et d’Histoire de la Médecine, à Rouen.</p>
<p>Au total, Angélique du Coudray aurait formé environ 5.000 femmes, ainsi que des chirurgiens. Ses relations avec ceux-ci étaient parfois houleuses, comme le raconte Nathalie Sage-Pranchère dans cette émission passionnante...<br /><br /><span style="font-size: 8pt;">(1) Thèse soutenue en 2011 et publiée aux Presses Universitaires François Rabelais en 2017.</span><br /><span style="font-size: 8pt;">(2) <a href="https://www.franceculture.fr/emissions/le-cours-de-lhistoire/un-destin-pour-le-soin-quatre-figures-de-lhistoire-du-soin-et-de-la-medecine-24-angelique-du-coudray">https://www.franceculture.fr/emissions/le-cours-de-lhistoire/un-destin-pour-le-soin-quatre-figures-de-lhistoire-du-soin-et-de-la-medecine-24-angelique-du-coudray</a></span><br /><span style="font-size: 8pt;">(3) <a href="https://gallica.bnf.fr/ark">https://gallica.bnf.fr/ark</a>:/12148/bpt6k9766051b.texteImage</span></p>
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