# 58 Du trad bien vivant (mai 2022)(Re)bonds est un magazine mensuel créé par Fanny Lancelin, journaliste installée dans le Cher. Son but : à travers, des portraits d'habitant.es du Berry, raconter des parcours alternatifs, des modes de vie où le respect des êtres vivants et de leur environnement tient une place centrale.http://www.rebonds.net/58dutradbienvivant2023-05-11T19:09:48+02:00(Re)bonds.netJoomla! - Open Source Content ManagementAllez danse !2017-03-21T13:37:42+01:002017-03-21T13:37:42+01:00http://www.rebonds.net/58dutradbienvivant/774-allezdanseSuper User<p><strong>Alice Fasse vit dans le Berry, dans la région de Bourges. Elle partage avec nous sa découverte de la danse en milieu trad, ce qu’elle lui apprend, ce qu’elle lui apporte, comment elle fait vibrer les corps et les cœurs...</strong></p>
<p><span style="color: #ff615d;"> </span></p>
<p>Il est déjà arrivé plusieurs fois que l'on me qualifie de danseuse et j'ai toujours trouvé cela fort étrange car je considère que je n'ai qu'un pied dans le milieu trad. Je ne suis pas une mordue. Je ne danse certainement pas aussi bien que je le voudrais, je n'ai jamais participé à des stages afin de remédier à cela, et je n'ai que rarement parcouru des centaines de kilomètres pour aller à un bal.</p>
<p>Cependant, j'ai toujours aimé danser, sans en avoir jamais fait une pratique sportive ou artistique, mais de manière intuitive, chez moi, en soirée ou en concert, comme expression de soi ou décharge d'énergie. Je n'ai jamais eu peur ou honte de bouger mon corps en public et j'y ai même toujours pris plaisir. Mais il s'agissait toujours de moi et de mon corps. Je n'avais jamais aimé ni réussi à danser en couple, que ce soit le rock, la salsa, le zouk. Et le peu que je connaissais alors des danses traditionnelles remontait au spectacle de ma petite sœur en costume folklorique à la kermesse de l'école, un brin ringard.<br />J'ai découvert la danse traditionnelle par hasard en venant travailler dans le Berry. Une amie m'a montré un soir quelques pas de chapelloise, et m'a emmenée quelque temps plus tard aux rencontres internationales de luthiers et maîtres sonneurs, « à Saint-Chartier », comme elle disait. Même si ça ne se passait plus dans ce village, c'était toujours la référence, pour elle comme pour les autres danseurs de longue date. Pour moi ce fut la rencontre avec le parquet, sous les arbres du château d'Ars <span style="font-size: 8pt;">(1)</span>.</p>
<p> </p>
<p><strong><span style="font-size: 14pt; color: #ff615d;">« La bienveillance était partout »</span></strong></p>
<p>Une rencontre éblouissante, joyeuse et intimidante. J'ai toujours aimé danser, mais surtout seule, ou en tout cas seulement à côté d'autres personnes. Il s'agissait là de danser avec d'autres personnes. J'ai beaucoup regardé d'abord, et lorsque ma copine m'a dit <em>« allez, celle-là c'est une chapelloise, tu connais, je te l'ai apprise ! »</em>, je me suis lancée et je suis montée avec elle sur le parquet. Quelle ne fut pas ma surprise lorsque j'ai découvert quelques minutes plus tard que cette danse collective impliquait de changer de partenaire ! Hop, envolée la copine, au bras de quelqu'un d'autre ! Alors tant bien que mal, j'ai suivi, et je me suis vite rendu compte que je n'étais pas la seule novice, d'autres en savaient même moins que moi. Mais, première découverte d'importance : la bienveillance était partout, ainsi que la transmission, le partage. Le principal étant de passer un bon moment, je me suis moi aussi retrouvée à indiquer à mon partenaire quels étaient les pas. Ce fut une des premières leçons du bal : le non-jugement.</p>
<p>De temps en temps, d'autres bals ont suivi, et j'ai continué à apprendre au fil des partenaires et des amitiés, la scottish, le cercle circassien, le rond d'Argenton, la bourrée à deux temps, à trois temps, la valse à cinq temps, la mazurka, le rondeau, l'andro et l'hanter-dro... Et d'autres leçons ont suivi aussi. Elles sont surtout intervenues avec les danses de couples.</p>
<p>Les danses collectives, pour moi c'est facile, il n'y a pas trop d'enjeu : je suis portée par le groupe, je me fonds dans la masse, les partenaires changent rapidement, et je peux vite m'abandonner à la transe. Les danses en couple... c'est tout une prise de risque. Il faut déjà aller demander à quelqu'un·e si iel veut bien danser, ou accepter une demande, voire accepter de ne pas être choisi·e, avec tout un éventail de subtilités du jeu de regards à la franche demande. Je croyais être une exception, mais une amie danseuse depuis l'enfance m'a déjà dit ressentir exactement la même chose : oser franchir le pas, aller vers l'autre, s'ouvrir avec le risque d'être refusé·e, ça n'est pas évident pour tout le monde, et ça peut en retenir certain·e·s au bord du parquet.<br />Dans la danse, ensuite, il faut s'accorder au rythme, au style, au physique de l'autre. Ça peut être très joyeux mais aussi très décevant. Même alors, on se remercie, car chacun·e reconnaît, il me semble, que ce n'est pas aisé de se rencontrer ainsi, de manière si intime.</p>
<p>Ma deuxième leçon fut justement celle-ci : la possibilité d'un rapport physique intime sans qu'il y ait forcément de jeu de séduction. L'opportunité de toucher quelqu'un·e, d'entrer en contact, avec respect et plaisir, sans qu'il soit question d'amour ou de sexe. Peu importe alors le genre, l'âge, l'apparence, la provenance sociale, la culture, la couleur de peau. Se réunir pour se laisser porter par la musique, baigner dans le son et les vibrations de tous les cœurs et les corps qui se trouvent là, glisser, sauter, tourner à en perdre la tête et l'équilibre, se retenir à l'autre, se laisser guider ou mener la danse, proposer, découvrir, apprendre.</p>
<p> </p>
<p><a href="http://www.rebonds.net/images/MUSIQUESTRAD/IMG_3498.JPG" class="jcepopup" data-mediabox="1" data-mediabox-title="Alice lors d'un bal avec son compagnon et l'une de ses filles (Photo : A.F.)."><img src="http://www.rebonds.net/images/MUSIQUESTRAD/IMG_3498.JPG" alt="IMG 3498" width="564" height="347" style="display: block; margin-left: auto; margin-right: auto;" /></a></p>
<p> </p>
<p><span style="color: #ff615d;"><strong><span style="font-size: 14pt;">« Envisager le dépassement de soi »</span></strong></span></p>
<p>Apprendre, toujours. Il y eut un moment où l'enthousiasme de la découverte céda le pas à l'envie et le besoin de maîtriser un peu mieux les codes et les pas de certaines danses. Comme je l'ai déjà mentionné, je n'ai jamais fait de stage. J'ai cependant participé à quelques ateliers pour comprendre un peu mieux certaines danses que je trouvais compliquées à appréhender dans le tourbillon festif d'un bal, notamment la bourrée et la mazurka. La bourrée, c'est une danse collective qui paraît très accessible de prime abord, mais qui possède tant de subtilités et de variations, qu'il ne peut qu'être intéressant d'explorer ce qui en constitue la base : le pas de bourrée. J'en ai passé du temps à parcourir une salle des fêtes à petits pas, courant presque, jusqu'à l'intégrer avec le plus de précision possible. Et j'observe depuis, régulièrement, des danseuses et des danseurs confirmé·es pour m'imprégner de leur propre interprétation de ce pas.</p>
<p>Des amis m'avaient questionnée, un soir de Saint-Jean, sur cet intérêt pour des danses codifiées, cadrées, qui paraissaient à leurs yeux dénuées d'une certaine liberté d'expression. Je leur avais justement répondu qu'à mon sens elles ne l'étaient pas. La nécessité d'une base commune pour pouvoir communiquer et se comprendre, permettre l'interaction, n'empêche nullement la naissance de toute une variété de styles et d'interprétations, très agréable à expérimenter. Une mazurka par exemple peut être dansée avec fermeté et tenue, de manière presque sautillante ou encore le plus langoureusement possible (la « mazurbada » !). Mais avant cela, outre les quelques trucs comme le placement des mains qui permet de sentir et de suivre les inflexions de l'autre, il faut apprendre et comprendre la base de la danse, ce qui fait sa particularité et qui va permettre d'en tirer parti en toute circonstance, en s'adaptant à la musique, à l'ambiance et à son ou sa partenaire.</p>
<p>Ce fut ainsi une autre leçon pour moi, une nouveauté : envisager le dépassement de soi, ne pas s'en tenir à ce que je savais déjà mais chercher à progresser, de toutes les manières possibles.<br />Par exemple, une bonne manière d'apprendre que j'explore depuis quelque temps est de changer de place : maintenant que je maîtrise quelque peu certaines danses comme personne guidée, je me lance à mon tour comme « guidante ». De manière générale, la personne qui guide est un homme et la femme suit son partenaire, mais de fait, beaucoup de femmes prennent la place d'hommes en bal, et il n'est pas rare de voir des hommes danser ensemble. Alors je préfère employer ces termes de « guidant·e » et « guidé·e » et j'aime expérimenter ces deux manières d'aborder la danse.</p>
<p><em>At last, but not least</em> <span style="font-size: 8pt;">(2)</span>, je parfais mon appréhension et ma compréhension de la danse en écoutant la musique : en bal ou en disque, cela me permet de m'imprégner du rythme, du groove, et peu à peu de reconnaître une danse à l'écoute sans avoir besoin de l'annonce des musiciens (<em>« allez, en place pour une bourrée deux temps ! »</em>), juste en suivant les impulsions de mon corps, de mes pieds, de mon bassin…</p>
<p> </p>
<p><strong><span style="font-size: 14pt; color: #ff615d;">« Respecter son souffle à soi pour respecter celui des autres »</span></strong></p>
<p>Cette pratique, je l'ai développée notamment ces deux dernières années, puisque privé·es de bal, nous en fûmes réduit·es (pour la plupart) à danser dans notre salon, avec des groupes jouant en livestream<span style="font-size: 8pt;"> (3)</span> et s'adressant à nous depuis le silence de leur propre salon. Le bal devint alors pour moi le symbole de tout ce qui ne nous était pas permis à ce moment : la liberté, la proximité, la prise de risque, l’inconnu...</p>
<p>Pour autant, cette absence de bal ne fut pas pour moi une absence de danse, et pour frustrante qu'elle fut, elle apporta son lot d'enseignements. Elle me permit en outre d'assumer le fait que si la danse m'anime, me porte et me transporte, si je danse en travaillant, en cuisinant, même en conduisant, je suis bien « une danseuse ».</p>
<p>Je dois cependant reconnaître que cette période recouvre et prolonge quatre ans de maternité qui m'ont presque autant éloignée des parquets, car même lorsque je me trouvais en bal, il n'y a pas si longtemps, je ne fus pas un seul moment sans mes filles. Et si le plaisir de partager avec elles mon amour de la musique, des instruments, de la danse fut total, je ne dansais pas une seule fois avec un·e adulte. J'avoue donc avoir une envie assez irrépressible de retourner danser sous peu, même si je retarde sciemment ce moment de peur d'une annulation de dernière minute ou d'un retournement de situation et d'une évidente déception. J'ai tellement envie de mettre en pratique toutes les leçons que j'ai apprises et que je continue d'intégrer, et dont la dernière, pas des moindres, m'a été apportée par un atelier de « danse du souffle »<span style="font-size: 8pt;"> (4)</span>, ou « Qi danse », mêlant le Qi qong à la danse contact, l'impro, le jam, et que voici :</p>
<p style="text-align: center;">Le souffle comme réponse à la difficulté d'aller vers l'autre<br /> Toujours vérifier son souffle, la justesse de son être pour rencontrer l'autre, ressentir son souffle et le respecter<br /> Respecter son souffle à soi pour respecter celui des autres<br /> Quand je (re)trouve mon souffle, je (re)trouve mon axe et je peux contacter l'autre avec sérénité et bienveillance.</p>
<p>Ce fut pour moi une découverte capitale qui m'a fait tomber d'accord avec la personne qui animait cet atelier pour dire qu'on devrait toujours proposer une pratique de « Qi danse » avant un bal ! Histoire de voir si on pourrait vivre une expérience de communion encore plus intense ?</p>
<p>Alors, on danse ?</p>
<p><strong>Alice Fasse</strong></p>
<p><span style="font-size: 8pt;"></span><span style="font-size: 8pt;">(1) <a href="http://www.lesoncontinu.fr/">http://www.lesoncontinu.fr/</a><br />(2) Dernier point mais non le moindre.<br />(3) Diffusion en temps réel d’une vidéo sur Internet.<br />(4) Atelier animé par Myriam Garouachi, inspirée par Marceau Chenault <a href="https://keweninstitute.com/qi-dance/">https://keweninstitute.com/qi-dance/</a></span></p><p><strong>Alice Fasse vit dans le Berry, dans la région de Bourges. Elle partage avec nous sa découverte de la danse en milieu trad, ce qu’elle lui apprend, ce qu’elle lui apporte, comment elle fait vibrer les corps et les cœurs...</strong></p>
<p><span style="color: #ff615d;"> </span></p>
<p>Il est déjà arrivé plusieurs fois que l'on me qualifie de danseuse et j'ai toujours trouvé cela fort étrange car je considère que je n'ai qu'un pied dans le milieu trad. Je ne suis pas une mordue. Je ne danse certainement pas aussi bien que je le voudrais, je n'ai jamais participé à des stages afin de remédier à cela, et je n'ai que rarement parcouru des centaines de kilomètres pour aller à un bal.</p>
<p>Cependant, j'ai toujours aimé danser, sans en avoir jamais fait une pratique sportive ou artistique, mais de manière intuitive, chez moi, en soirée ou en concert, comme expression de soi ou décharge d'énergie. Je n'ai jamais eu peur ou honte de bouger mon corps en public et j'y ai même toujours pris plaisir. Mais il s'agissait toujours de moi et de mon corps. Je n'avais jamais aimé ni réussi à danser en couple, que ce soit le rock, la salsa, le zouk. Et le peu que je connaissais alors des danses traditionnelles remontait au spectacle de ma petite sœur en costume folklorique à la kermesse de l'école, un brin ringard.<br />J'ai découvert la danse traditionnelle par hasard en venant travailler dans le Berry. Une amie m'a montré un soir quelques pas de chapelloise, et m'a emmenée quelque temps plus tard aux rencontres internationales de luthiers et maîtres sonneurs, « à Saint-Chartier », comme elle disait. Même si ça ne se passait plus dans ce village, c'était toujours la référence, pour elle comme pour les autres danseurs de longue date. Pour moi ce fut la rencontre avec le parquet, sous les arbres du château d'Ars <span style="font-size: 8pt;">(1)</span>.</p>
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<p><strong><span style="font-size: 14pt; color: #ff615d;">« La bienveillance était partout »</span></strong></p>
<p>Une rencontre éblouissante, joyeuse et intimidante. J'ai toujours aimé danser, mais surtout seule, ou en tout cas seulement à côté d'autres personnes. Il s'agissait là de danser avec d'autres personnes. J'ai beaucoup regardé d'abord, et lorsque ma copine m'a dit <em>« allez, celle-là c'est une chapelloise, tu connais, je te l'ai apprise ! »</em>, je me suis lancée et je suis montée avec elle sur le parquet. Quelle ne fut pas ma surprise lorsque j'ai découvert quelques minutes plus tard que cette danse collective impliquait de changer de partenaire ! Hop, envolée la copine, au bras de quelqu'un d'autre ! Alors tant bien que mal, j'ai suivi, et je me suis vite rendu compte que je n'étais pas la seule novice, d'autres en savaient même moins que moi. Mais, première découverte d'importance : la bienveillance était partout, ainsi que la transmission, le partage. Le principal étant de passer un bon moment, je me suis moi aussi retrouvée à indiquer à mon partenaire quels étaient les pas. Ce fut une des premières leçons du bal : le non-jugement.</p>
<p>De temps en temps, d'autres bals ont suivi, et j'ai continué à apprendre au fil des partenaires et des amitiés, la scottish, le cercle circassien, le rond d'Argenton, la bourrée à deux temps, à trois temps, la valse à cinq temps, la mazurka, le rondeau, l'andro et l'hanter-dro... Et d'autres leçons ont suivi aussi. Elles sont surtout intervenues avec les danses de couples.</p>
<p>Les danses collectives, pour moi c'est facile, il n'y a pas trop d'enjeu : je suis portée par le groupe, je me fonds dans la masse, les partenaires changent rapidement, et je peux vite m'abandonner à la transe. Les danses en couple... c'est tout une prise de risque. Il faut déjà aller demander à quelqu'un·e si iel veut bien danser, ou accepter une demande, voire accepter de ne pas être choisi·e, avec tout un éventail de subtilités du jeu de regards à la franche demande. Je croyais être une exception, mais une amie danseuse depuis l'enfance m'a déjà dit ressentir exactement la même chose : oser franchir le pas, aller vers l'autre, s'ouvrir avec le risque d'être refusé·e, ça n'est pas évident pour tout le monde, et ça peut en retenir certain·e·s au bord du parquet.<br />Dans la danse, ensuite, il faut s'accorder au rythme, au style, au physique de l'autre. Ça peut être très joyeux mais aussi très décevant. Même alors, on se remercie, car chacun·e reconnaît, il me semble, que ce n'est pas aisé de se rencontrer ainsi, de manière si intime.</p>
<p>Ma deuxième leçon fut justement celle-ci : la possibilité d'un rapport physique intime sans qu'il y ait forcément de jeu de séduction. L'opportunité de toucher quelqu'un·e, d'entrer en contact, avec respect et plaisir, sans qu'il soit question d'amour ou de sexe. Peu importe alors le genre, l'âge, l'apparence, la provenance sociale, la culture, la couleur de peau. Se réunir pour se laisser porter par la musique, baigner dans le son et les vibrations de tous les cœurs et les corps qui se trouvent là, glisser, sauter, tourner à en perdre la tête et l'équilibre, se retenir à l'autre, se laisser guider ou mener la danse, proposer, découvrir, apprendre.</p>
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<p><a href="http://www.rebonds.net/images/MUSIQUESTRAD/IMG_3498.JPG" class="jcepopup" data-mediabox="1" data-mediabox-title="Alice lors d'un bal avec son compagnon et l'une de ses filles (Photo : A.F.)."><img src="http://www.rebonds.net/images/MUSIQUESTRAD/IMG_3498.JPG" alt="IMG 3498" width="564" height="347" style="display: block; margin-left: auto; margin-right: auto;" /></a></p>
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<p><span style="color: #ff615d;"><strong><span style="font-size: 14pt;">« Envisager le dépassement de soi »</span></strong></span></p>
<p>Apprendre, toujours. Il y eut un moment où l'enthousiasme de la découverte céda le pas à l'envie et le besoin de maîtriser un peu mieux les codes et les pas de certaines danses. Comme je l'ai déjà mentionné, je n'ai jamais fait de stage. J'ai cependant participé à quelques ateliers pour comprendre un peu mieux certaines danses que je trouvais compliquées à appréhender dans le tourbillon festif d'un bal, notamment la bourrée et la mazurka. La bourrée, c'est une danse collective qui paraît très accessible de prime abord, mais qui possède tant de subtilités et de variations, qu'il ne peut qu'être intéressant d'explorer ce qui en constitue la base : le pas de bourrée. J'en ai passé du temps à parcourir une salle des fêtes à petits pas, courant presque, jusqu'à l'intégrer avec le plus de précision possible. Et j'observe depuis, régulièrement, des danseuses et des danseurs confirmé·es pour m'imprégner de leur propre interprétation de ce pas.</p>
<p>Des amis m'avaient questionnée, un soir de Saint-Jean, sur cet intérêt pour des danses codifiées, cadrées, qui paraissaient à leurs yeux dénuées d'une certaine liberté d'expression. Je leur avais justement répondu qu'à mon sens elles ne l'étaient pas. La nécessité d'une base commune pour pouvoir communiquer et se comprendre, permettre l'interaction, n'empêche nullement la naissance de toute une variété de styles et d'interprétations, très agréable à expérimenter. Une mazurka par exemple peut être dansée avec fermeté et tenue, de manière presque sautillante ou encore le plus langoureusement possible (la « mazurbada » !). Mais avant cela, outre les quelques trucs comme le placement des mains qui permet de sentir et de suivre les inflexions de l'autre, il faut apprendre et comprendre la base de la danse, ce qui fait sa particularité et qui va permettre d'en tirer parti en toute circonstance, en s'adaptant à la musique, à l'ambiance et à son ou sa partenaire.</p>
<p>Ce fut ainsi une autre leçon pour moi, une nouveauté : envisager le dépassement de soi, ne pas s'en tenir à ce que je savais déjà mais chercher à progresser, de toutes les manières possibles.<br />Par exemple, une bonne manière d'apprendre que j'explore depuis quelque temps est de changer de place : maintenant que je maîtrise quelque peu certaines danses comme personne guidée, je me lance à mon tour comme « guidante ». De manière générale, la personne qui guide est un homme et la femme suit son partenaire, mais de fait, beaucoup de femmes prennent la place d'hommes en bal, et il n'est pas rare de voir des hommes danser ensemble. Alors je préfère employer ces termes de « guidant·e » et « guidé·e » et j'aime expérimenter ces deux manières d'aborder la danse.</p>
<p><em>At last, but not least</em> <span style="font-size: 8pt;">(2)</span>, je parfais mon appréhension et ma compréhension de la danse en écoutant la musique : en bal ou en disque, cela me permet de m'imprégner du rythme, du groove, et peu à peu de reconnaître une danse à l'écoute sans avoir besoin de l'annonce des musiciens (<em>« allez, en place pour une bourrée deux temps ! »</em>), juste en suivant les impulsions de mon corps, de mes pieds, de mon bassin…</p>
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<p><strong><span style="font-size: 14pt; color: #ff615d;">« Respecter son souffle à soi pour respecter celui des autres »</span></strong></p>
<p>Cette pratique, je l'ai développée notamment ces deux dernières années, puisque privé·es de bal, nous en fûmes réduit·es (pour la plupart) à danser dans notre salon, avec des groupes jouant en livestream<span style="font-size: 8pt;"> (3)</span> et s'adressant à nous depuis le silence de leur propre salon. Le bal devint alors pour moi le symbole de tout ce qui ne nous était pas permis à ce moment : la liberté, la proximité, la prise de risque, l’inconnu...</p>
<p>Pour autant, cette absence de bal ne fut pas pour moi une absence de danse, et pour frustrante qu'elle fut, elle apporta son lot d'enseignements. Elle me permit en outre d'assumer le fait que si la danse m'anime, me porte et me transporte, si je danse en travaillant, en cuisinant, même en conduisant, je suis bien « une danseuse ».</p>
<p>Je dois cependant reconnaître que cette période recouvre et prolonge quatre ans de maternité qui m'ont presque autant éloignée des parquets, car même lorsque je me trouvais en bal, il n'y a pas si longtemps, je ne fus pas un seul moment sans mes filles. Et si le plaisir de partager avec elles mon amour de la musique, des instruments, de la danse fut total, je ne dansais pas une seule fois avec un·e adulte. J'avoue donc avoir une envie assez irrépressible de retourner danser sous peu, même si je retarde sciemment ce moment de peur d'une annulation de dernière minute ou d'un retournement de situation et d'une évidente déception. J'ai tellement envie de mettre en pratique toutes les leçons que j'ai apprises et que je continue d'intégrer, et dont la dernière, pas des moindres, m'a été apportée par un atelier de « danse du souffle »<span style="font-size: 8pt;"> (4)</span>, ou « Qi danse », mêlant le Qi qong à la danse contact, l'impro, le jam, et que voici :</p>
<p style="text-align: center;">Le souffle comme réponse à la difficulté d'aller vers l'autre<br /> Toujours vérifier son souffle, la justesse de son être pour rencontrer l'autre, ressentir son souffle et le respecter<br /> Respecter son souffle à soi pour respecter celui des autres<br /> Quand je (re)trouve mon souffle, je (re)trouve mon axe et je peux contacter l'autre avec sérénité et bienveillance.</p>
<p>Ce fut pour moi une découverte capitale qui m'a fait tomber d'accord avec la personne qui animait cet atelier pour dire qu'on devrait toujours proposer une pratique de « Qi danse » avant un bal ! Histoire de voir si on pourrait vivre une expérience de communion encore plus intense ?</p>
<p>Alors, on danse ?</p>
<p><strong>Alice Fasse</strong></p>
<p><span style="font-size: 8pt;"></span><span style="font-size: 8pt;">(1) <a href="http://www.lesoncontinu.fr/">http://www.lesoncontinu.fr/</a><br />(2) Dernier point mais non le moindre.<br />(3) Diffusion en temps réel d’une vidéo sur Internet.<br />(4) Atelier animé par Myriam Garouachi, inspirée par Marceau Chenault <a href="https://keweninstitute.com/qi-dance/">https://keweninstitute.com/qi-dance/</a></span></p>Le Grand Barbichon Prod2017-03-21T13:37:42+01:002017-03-21T13:37:42+01:00http://www.rebonds.net/58dutradbienvivant/775-legrandbarbichonprodSuper User<p><strong>C’est l’une des premières maisons de production de musiques traditionnelles créée en France : Sébastien Berthet a fondé Le Grand Barbichon Prod à Henrichemont où il est né. Depuis 2009, il y défend des groupes ancrés dans leurs terres mais aussi résolument ouverts à d’autres horizons.</strong></p>
<p>Garder les pieds sur terre et la tête dans les nuages. Sentir ses racines pour les retrouver après de longs voyages et les nourrir de tout ce que l’on a appris. Habiter le territoire et rester curieux de ce que les vents y déposent...<br />C’est ainsi que Sébastien Berthet veut poursuivre son aventure, celle de sa vie. Bercé par les sons et les danses traditionnels depuis le ventre de sa mère, les mains dans la terre et le nez en plein air dès l’enfance, il ne peut dissocier les éléments qui l’habitent. Pour rêver, créer, conserver ce petit grain de folie nécessaire à son travail, il a besoin de puiser de l’énergie dans son jardin et la forêt, dans ce pays qui l’a vu naître il y a 37 ans, le Berry.</p>
<p>Sébastien Berthet est le fondateur du Grand Barbichon Prod, une maison de production et de diffusion spécialisée dans les musiques traditionnelles. Etait-ce déjà folie que d’imaginer une telle entreprise, dans un milieu dominé par les amateur·ices et où les musicien·nes professionnel·les peinaient à se rémunérer ? Non, justement, il fallait les aider, Sébastien Berthet en avait la certitude et l’envie. Quinze ans plus tard, il a su faire sa place et accompagne sept à huit groupes du Centre de la France et du Poitou. Il défend la nécessité pour les musicien·nes de s’organiser, de fonder des collectifs, d’être reconnu·es. Il défend aussi la création et l’innovation qui permettent aux musiques traditionnelles d’évoluer et de rester vivantes.</p>
<p>Mais quel chemin, depuis les parquets des Viguenets, le groupe folklorique local, jusqu’aux Transmusicales de Rennes ! Quelles expériences l’ont jalonné ? Quels types d’artistes acceptent aujourd’hui de l’emprunter avec lui ?</p>
<p> </p>
<p><strong><span style="color: #ff615d; font-size: 14pt;">Folklore et / ou trad ?</span></strong></p>
<p>Lorsqu’on demande à Sébastien Berthet quelle est sa définition du folklore, il n’hésite pas : <em>« C’est une image figée sur un instant T, une époque, que l’on essaie de reproduire. Ça suppose de conserver certains codes. »</em><br />En revanche, lorsqu’on lui demande comment il définit les musiques traditionnelles, il laisse planer un long silence. Avant d’esquisser un léger sourire. Il sait que quoi qu’il réponde, il ne fera pas l’unanimité, tant le débat sur la question est permanent ! <em>« Je peux dire que je travaille avec des artistes qui ont conscience du territoire où ils habitent et de ceux qui, avant eux, ont donné une identité locale à ce territoire, à travers le patois ou certaines activités par exemple. Des histoires sont nées de ça et de ces histoires, des musiques et des danses. Les musiciens trad actuels y sont sensibles, ils s’y intéressent mais ils vivent dans leur époque. Ils grandissent avec les musiques, les outils et l’offre culturelle d’aujourd’hui. Ils s’inspirent d’autres univers artistiques. Ils composent donc avec, mais aussi avec l’écho de ce qui s’est fait avant eux. Ils transmettent ce qu’ils ont appris tout en le faisant évoluer. Et la génération suivante fera de même. »</em></p>
<p> </p>
<p><a href="http://www.rebonds.net/images/MUSIQUESTRAD/gbb_prod2.jpg" class="jcepopup" data-mediabox="1" data-mediabox-title="Sébastien Berthet (photo : GBBprod)."><img src="http://www.rebonds.net/images/MUSIQUESTRAD/gbb_prod2.jpg" alt="gbb prod2" width="336" height="375" style="display: block; margin-left: auto; margin-right: auto;" /></a></p>
<p> </p>
<p>Il connaît le folklore, il l’a vécu dans son corps. Enfant, il faisait partie du groupe local Les Viguenets de Morogues et dansait en costume. <em>« Ça m’a appris des valeurs sociales. Les gens qui y participaient, comme mes parents, étaient des jeunes qui se reliaient de cette manière. Ça apportait une certaine dynamique au village. Ça m’a aussi appris le rythme de l’engagement. »</em> Parallèlement, il apprend la guitare à l’école de musique et monte TNT (Tendance Néo Trad) notamment avec son frère Cyril<span style="font-size: 8pt;"> (1)</span>. <em>« Avec ce groupe, j’ai joué et voyagé partout en France ! »</em> Une pièce de la maison familiale est transformée en studio. <em>« Il ne s’agissait pas seulement de faire de la musique, mais aussi de créer et d’être ensemble. »</em></p>
<p>Au sein des Viguenets, les jeunes organisent leurs bals avant de créer leur propre association, Viellux. Une fois majeur, Sébastien Berthet en prend la présidence. <em>« On organisait des bals comme des fous, sans arrêt ! Parfois à thème ; on avait une équipe rien que pour la déco ! Comme on était au lycée, on arrivait à faire venir des tas d’autres jeunes : il y avait souvent 200 personnes. C’était trop bien, j’en ai de super souvenirs ! »</em> Ils organisent aussi un tremplin qui réunit 600 personnes et des groupes venus de toute la France. <em>« Ils n’étaient pas seulement invités à jouer. Ils participaient vraiment à l’événement en tenant la billetterie ou le bar »</em>, souligne Sébastien Berthet. Un esprit d’équipe, collectif, qu’il a toujours souhaité retrouver dans ses projets.</p>
<p> </p>
<p><strong><span style="color: #ff615d; font-size: 14pt;">Le temps de l’apprentissage</span></strong></p>
<p>Las ! Il faut aller à l’école… Il parvient tant bien que mal jusqu’en 3e. Pour la suite ? Il sait qu’il aime être dans la nature. Ce sera un BEP « Espaces verts ». Il finit premier de sa classe, enchaîne avec un Bac Pro et un BTS en alternance. Le diplôme d’architecte-paysagiste se profile déjà… <em>« J’ai arrêté en deuxième année de BTS. Vendre des plants venus de l’autre bout de la France, les arrosages intégrés, les produits phytosanitaires… Je ne m’y retrouvais pas, ça n’était pas possible. A l’époque, on ne parlait pas autant d’écologie et je ne voyais pas d’alternatives. »</em> Il reconnaît toutefois tout ce que cet apprentissage lui a apporté : <em>« Prendre des initiatives, monter des projets, gérer une équipe. »</em></p>
<p>En côtoyant des artistes comme le joueur de vielle Grégory Jolivet, il a compris les difficultés que les musicien·nes de trad rencontrent.<em> « Ce qui m’intéressait, c’était le rouage entre l’artiste qui cherche à jouer en étant rémunéré·e et l’organisateur qui doit boucler le budget de son événement. C’est comme ça qu’est née l’envie d’aider les musicien·nes à vivre de leur musique. »</em><br />Sans formation adéquate mais motivé à apprendre par lui-même, il voyage pendant deux ans en France et en Europe. Pour financer ses trajets, il contacte un couvreur local qui accepte de l’embaucher, de lui apprendre le métier, et de lui laisser ses vendredis, week-ends et vacances scolaires ! <em>« Il m’a accordé une véritable confiance, j’ai eu beaucoup de chance. »</em> La journée, il travaille donc sur les toits ; le soir, il monte des dossiers pour créer son activité ; le week-end, il sillonne les festivals et salons professionnels pour apprendre.</p>
<p> </p>
<p><strong><span style="font-size: 14pt; color: #ff615d;">Une démarche militante</span></strong></p>
<p>Et comme si le sommeil ne comptait pas, il accompagne déjà Grégory Jolivet dans la recherche de dates. En 2007, il se lance avec le projet phare La Machine. Deux ans plus tard, il crée l’association Le Grand Barbichon Prod avec deux amies séduites par le projet. En 2010, iels organisent un festival à Morogues, « Le Grand Barbichon déroule sa barbe ».<br />A-t-il reçu un bon accueil du milieu ? <em>« Non !</em> répond-il tout de go.<em> Il y avait beaucoup de réticences et de peurs. Le milieu trad est peu professionnalisé. Il est déjà compliqué pour les musicien·nes d’être rémunéré·es alors quand tu ajoutes une part pour le producteur… Depuis dix ans, je fais un gros travail pour expliquer la démarche, une démarche militante : parce que, oui, c’est un coût supplémentaire, mais mon travail a un impact sur la qualité des projets, la vie de l’artiste, l’aura du groupe... »</em></p>
<p> </p>
<p><a href="http://www.rebonds.net/images/MUSIQUESTRAD/gbb_prod3.jpg" class="jcepopup" data-mediabox="1" data-mediabox-title="Grégory Jolivet, joueur de vielle et Sébastien Berthet lors de la sortie de l'album Osmose (photo : GBBprod)."><img src="http://www.rebonds.net/images/MUSIQUESTRAD/gbb_prod3.jpg" alt="gbb prod2" width="552" height="328" style="display: block; margin-left: auto; margin-right: auto;" /></a></p>
<p> </p>
<p>Son rôle est multiple. D’abord, il pose un regard artistique sur les projets des groupes qu’il suit. <em>« Ça peut être une écoute globale sur la production de l’album ou des commentaires concrets sur l’équilibre des instruments dans telle chanson, par exemple. Mais je n’ai qu’un avis consultatif. Je n’oblige jamais à rien. Je me mets au même niveau que les musiciens. »</em><br />Il produit les albums et spectacles, recherche des résidences et des actions culturelles.<br />Il assure un accompagnement administratif pour que les musicien·nes touchent leur intermittence.<br />Enfin, il organise les tournées pour faire vivre les albums sur scène. <em>« J’essaie de démarcher d’autres réseaux que celui des musiques traditionnelles, pour changer les a priori que les gens peuvent avoir sur ces musiques »</em>, précise-t-il. C’est ainsi que le projet électro de Grégory Jolivet avait été programmé au festival les Transmusicales à Rennes, par exemple. Le Printemps de Bourges ou les Vieilles Charrues ont aussi ouvert leurs portes.</p>
<p> </p>
<p><strong><span style="font-size: 14pt; color: #ff615d;">Développer l’équipe</span></strong></p>
<p>Longtemps, Sébastien Berthet a été seul mais depuis 2019, deux personnes le soutiennent, transformant Le Grand Barbichon en véritable équipe. <em>« Le rôle de Marie est d’apporter des outils pour gagner du temps, par exemple des logiciels en ligne pour les plannings ou les contrats à distance… C’est ce que j’appelle le Grand Barbichon 2.0 ! Sara travaille sur la communication et la recherche de financements. Elle accompagne aussi beaucoup la production des albums, ce qui me permet de me consacrer au reste. »</em><br />Accepter de déléguer n’a pas été facile : <em>« Je suis long dans mes processus de changement. J’ai souffert pour me remettre en question. Mais grâce à elles, durant la période du Covid, ça a tenu économiquement. Si elles n’avaient pas été là à ce moment, je crois que je n’aurais pas eu la force de continuer tout seul. »</em><br />Si en France de nombreux·ses musicien·nes ont dû arrêter leur métier faute de pouvoir jouer, celleux du Grand Barbichon Prod ont tenu bon.<em> « On les a encouragé·es à faire des actions culturelles, des concerts assis, des résidences d’écriture et de création… Bref, on voulait leur donner du sens. Pas forcément pour tenir avant la fin parce que… est-ce qu’on y est vraiment, à la fin ? Mais surtout pour garder l’émulation, l’appétit. »</em></p>
<p><a href="http://www.rebonds.net/images/MUSIQUESTRAD/logo.png" class="jcepopup" data-mediabox="1"><img src="http://www.rebonds.net/images/MUSIQUESTRAD/logo.png" alt="gbb prod2" width="337" height="375" style="display: block; margin-left: auto; margin-right: auto;" /></a></p>
<p>Comment s’imagine-t-il dans quelques années ? <em>« Il faut que je fasse en sorte que Le Grand Barbichon vive sans moi un jour, il faudrait développer l’équipe. C’est souvent beaucoup d’angoisses parce que c’est une grosse responsabilité vis-à-vis des artistes. Et puis, c’est un métier où il est important de rester jeune d’esprit, de savoir prendre des risques, de garder son grain de folie. »</em><br />En attendant, la reprise est là : de 40 dates programmées au début de l’année, le voici à 140 ! Pas le temps de souffler. Et de retourner dans la nature ? <em>« Je garderai toujours un rapport à la terre. Malgré la fatigue, je peux passer des heures, tard le soir, dans le jardin. »</em> Pour garder les pieds sur terre et la tête dans les nuages.</p>
<p><strong>Fanny Lancelin</strong><span style="font-size: 8pt;"></span></p>
<p><span style="font-size: 8pt;">(1) Lire la rubrique (Ré)acteur·ices.<br /></span></p>
<p> </p>
<div class="panel-heading">
<h3 class="panel-title" style="text-align: center;">Plus</h3>
</div>
<ul>
<li>La Machine, Bougnat Sound, Ma Petite, Ciac Boum, Le Grand Barouf… Pour en savoir plus sur les groupes suivis par Le Grand Barbichon Prod et notamment les dates des concerts, rendez-vous sur <a href="https://www.legrandbarbichonprod.com/">https://www.legrandbarbichonprod.com/</a></li>
</ul>
<p><a href="http://www.rebonds.net/images/MUSIQUESTRAD/20210402LEGRANDBAROUF-004.jpg" class="jcepopup" data-mediabox="1" data-mediabox-title="Le Grand Barouf, prochainement en concert à Bourges (photo : GBBprod)."><img src="http://www.rebonds.net/images/MUSIQUESTRAD/20210402LEGRANDBAROUF-004.jpg" alt="gbb prod2" width="479" height="319" style="display: block; margin-left: auto; margin-right: auto;" /></a><a href="https://www.legrandbarbichonprod.com/"></a></p>
<ul>
<li>Prochain concert dans le Berry, organisé en partenariat avec Emmetrop : vendredi 17 juin à 21 h au Nadir avec Le Grand Barouf et L’Ombre de la bête. Plus de renseignements sur <a href="https://antrepeaux.net/le-grand-barrouf-lombre-de-la-bete/">https://antrepeaux.net/le-grand-barrouf-lombre-de-la-bete/</a></li>
</ul><p><strong>C’est l’une des premières maisons de production de musiques traditionnelles créée en France : Sébastien Berthet a fondé Le Grand Barbichon Prod à Henrichemont où il est né. Depuis 2009, il y défend des groupes ancrés dans leurs terres mais aussi résolument ouverts à d’autres horizons.</strong></p>
<p>Garder les pieds sur terre et la tête dans les nuages. Sentir ses racines pour les retrouver après de longs voyages et les nourrir de tout ce que l’on a appris. Habiter le territoire et rester curieux de ce que les vents y déposent...<br />C’est ainsi que Sébastien Berthet veut poursuivre son aventure, celle de sa vie. Bercé par les sons et les danses traditionnels depuis le ventre de sa mère, les mains dans la terre et le nez en plein air dès l’enfance, il ne peut dissocier les éléments qui l’habitent. Pour rêver, créer, conserver ce petit grain de folie nécessaire à son travail, il a besoin de puiser de l’énergie dans son jardin et la forêt, dans ce pays qui l’a vu naître il y a 37 ans, le Berry.</p>
<p>Sébastien Berthet est le fondateur du Grand Barbichon Prod, une maison de production et de diffusion spécialisée dans les musiques traditionnelles. Etait-ce déjà folie que d’imaginer une telle entreprise, dans un milieu dominé par les amateur·ices et où les musicien·nes professionnel·les peinaient à se rémunérer ? Non, justement, il fallait les aider, Sébastien Berthet en avait la certitude et l’envie. Quinze ans plus tard, il a su faire sa place et accompagne sept à huit groupes du Centre de la France et du Poitou. Il défend la nécessité pour les musicien·nes de s’organiser, de fonder des collectifs, d’être reconnu·es. Il défend aussi la création et l’innovation qui permettent aux musiques traditionnelles d’évoluer et de rester vivantes.</p>
<p>Mais quel chemin, depuis les parquets des Viguenets, le groupe folklorique local, jusqu’aux Transmusicales de Rennes ! Quelles expériences l’ont jalonné ? Quels types d’artistes acceptent aujourd’hui de l’emprunter avec lui ?</p>
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<p><strong><span style="color: #ff615d; font-size: 14pt;">Folklore et / ou trad ?</span></strong></p>
<p>Lorsqu’on demande à Sébastien Berthet quelle est sa définition du folklore, il n’hésite pas : <em>« C’est une image figée sur un instant T, une époque, que l’on essaie de reproduire. Ça suppose de conserver certains codes. »</em><br />En revanche, lorsqu’on lui demande comment il définit les musiques traditionnelles, il laisse planer un long silence. Avant d’esquisser un léger sourire. Il sait que quoi qu’il réponde, il ne fera pas l’unanimité, tant le débat sur la question est permanent ! <em>« Je peux dire que je travaille avec des artistes qui ont conscience du territoire où ils habitent et de ceux qui, avant eux, ont donné une identité locale à ce territoire, à travers le patois ou certaines activités par exemple. Des histoires sont nées de ça et de ces histoires, des musiques et des danses. Les musiciens trad actuels y sont sensibles, ils s’y intéressent mais ils vivent dans leur époque. Ils grandissent avec les musiques, les outils et l’offre culturelle d’aujourd’hui. Ils s’inspirent d’autres univers artistiques. Ils composent donc avec, mais aussi avec l’écho de ce qui s’est fait avant eux. Ils transmettent ce qu’ils ont appris tout en le faisant évoluer. Et la génération suivante fera de même. »</em></p>
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<p><a href="http://www.rebonds.net/images/MUSIQUESTRAD/gbb_prod2.jpg" class="jcepopup" data-mediabox="1" data-mediabox-title="Sébastien Berthet (photo : GBBprod)."><img src="http://www.rebonds.net/images/MUSIQUESTRAD/gbb_prod2.jpg" alt="gbb prod2" width="336" height="375" style="display: block; margin-left: auto; margin-right: auto;" /></a></p>
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<p>Il connaît le folklore, il l’a vécu dans son corps. Enfant, il faisait partie du groupe local Les Viguenets de Morogues et dansait en costume. <em>« Ça m’a appris des valeurs sociales. Les gens qui y participaient, comme mes parents, étaient des jeunes qui se reliaient de cette manière. Ça apportait une certaine dynamique au village. Ça m’a aussi appris le rythme de l’engagement. »</em> Parallèlement, il apprend la guitare à l’école de musique et monte TNT (Tendance Néo Trad) notamment avec son frère Cyril<span style="font-size: 8pt;"> (1)</span>. <em>« Avec ce groupe, j’ai joué et voyagé partout en France ! »</em> Une pièce de la maison familiale est transformée en studio. <em>« Il ne s’agissait pas seulement de faire de la musique, mais aussi de créer et d’être ensemble. »</em></p>
<p>Au sein des Viguenets, les jeunes organisent leurs bals avant de créer leur propre association, Viellux. Une fois majeur, Sébastien Berthet en prend la présidence. <em>« On organisait des bals comme des fous, sans arrêt ! Parfois à thème ; on avait une équipe rien que pour la déco ! Comme on était au lycée, on arrivait à faire venir des tas d’autres jeunes : il y avait souvent 200 personnes. C’était trop bien, j’en ai de super souvenirs ! »</em> Ils organisent aussi un tremplin qui réunit 600 personnes et des groupes venus de toute la France. <em>« Ils n’étaient pas seulement invités à jouer. Ils participaient vraiment à l’événement en tenant la billetterie ou le bar »</em>, souligne Sébastien Berthet. Un esprit d’équipe, collectif, qu’il a toujours souhaité retrouver dans ses projets.</p>
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<p><strong><span style="color: #ff615d; font-size: 14pt;">Le temps de l’apprentissage</span></strong></p>
<p>Las ! Il faut aller à l’école… Il parvient tant bien que mal jusqu’en 3e. Pour la suite ? Il sait qu’il aime être dans la nature. Ce sera un BEP « Espaces verts ». Il finit premier de sa classe, enchaîne avec un Bac Pro et un BTS en alternance. Le diplôme d’architecte-paysagiste se profile déjà… <em>« J’ai arrêté en deuxième année de BTS. Vendre des plants venus de l’autre bout de la France, les arrosages intégrés, les produits phytosanitaires… Je ne m’y retrouvais pas, ça n’était pas possible. A l’époque, on ne parlait pas autant d’écologie et je ne voyais pas d’alternatives. »</em> Il reconnaît toutefois tout ce que cet apprentissage lui a apporté : <em>« Prendre des initiatives, monter des projets, gérer une équipe. »</em></p>
<p>En côtoyant des artistes comme le joueur de vielle Grégory Jolivet, il a compris les difficultés que les musicien·nes de trad rencontrent.<em> « Ce qui m’intéressait, c’était le rouage entre l’artiste qui cherche à jouer en étant rémunéré·e et l’organisateur qui doit boucler le budget de son événement. C’est comme ça qu’est née l’envie d’aider les musicien·nes à vivre de leur musique. »</em><br />Sans formation adéquate mais motivé à apprendre par lui-même, il voyage pendant deux ans en France et en Europe. Pour financer ses trajets, il contacte un couvreur local qui accepte de l’embaucher, de lui apprendre le métier, et de lui laisser ses vendredis, week-ends et vacances scolaires ! <em>« Il m’a accordé une véritable confiance, j’ai eu beaucoup de chance. »</em> La journée, il travaille donc sur les toits ; le soir, il monte des dossiers pour créer son activité ; le week-end, il sillonne les festivals et salons professionnels pour apprendre.</p>
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<p><strong><span style="font-size: 14pt; color: #ff615d;">Une démarche militante</span></strong></p>
<p>Et comme si le sommeil ne comptait pas, il accompagne déjà Grégory Jolivet dans la recherche de dates. En 2007, il se lance avec le projet phare La Machine. Deux ans plus tard, il crée l’association Le Grand Barbichon Prod avec deux amies séduites par le projet. En 2010, iels organisent un festival à Morogues, « Le Grand Barbichon déroule sa barbe ».<br />A-t-il reçu un bon accueil du milieu ? <em>« Non !</em> répond-il tout de go.<em> Il y avait beaucoup de réticences et de peurs. Le milieu trad est peu professionnalisé. Il est déjà compliqué pour les musicien·nes d’être rémunéré·es alors quand tu ajoutes une part pour le producteur… Depuis dix ans, je fais un gros travail pour expliquer la démarche, une démarche militante : parce que, oui, c’est un coût supplémentaire, mais mon travail a un impact sur la qualité des projets, la vie de l’artiste, l’aura du groupe... »</em></p>
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<p><a href="http://www.rebonds.net/images/MUSIQUESTRAD/gbb_prod3.jpg" class="jcepopup" data-mediabox="1" data-mediabox-title="Grégory Jolivet, joueur de vielle et Sébastien Berthet lors de la sortie de l'album Osmose (photo : GBBprod)."><img src="http://www.rebonds.net/images/MUSIQUESTRAD/gbb_prod3.jpg" alt="gbb prod2" width="552" height="328" style="display: block; margin-left: auto; margin-right: auto;" /></a></p>
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<p>Son rôle est multiple. D’abord, il pose un regard artistique sur les projets des groupes qu’il suit. <em>« Ça peut être une écoute globale sur la production de l’album ou des commentaires concrets sur l’équilibre des instruments dans telle chanson, par exemple. Mais je n’ai qu’un avis consultatif. Je n’oblige jamais à rien. Je me mets au même niveau que les musiciens. »</em><br />Il produit les albums et spectacles, recherche des résidences et des actions culturelles.<br />Il assure un accompagnement administratif pour que les musicien·nes touchent leur intermittence.<br />Enfin, il organise les tournées pour faire vivre les albums sur scène. <em>« J’essaie de démarcher d’autres réseaux que celui des musiques traditionnelles, pour changer les a priori que les gens peuvent avoir sur ces musiques »</em>, précise-t-il. C’est ainsi que le projet électro de Grégory Jolivet avait été programmé au festival les Transmusicales à Rennes, par exemple. Le Printemps de Bourges ou les Vieilles Charrues ont aussi ouvert leurs portes.</p>
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<p><strong><span style="font-size: 14pt; color: #ff615d;">Développer l’équipe</span></strong></p>
<p>Longtemps, Sébastien Berthet a été seul mais depuis 2019, deux personnes le soutiennent, transformant Le Grand Barbichon en véritable équipe. <em>« Le rôle de Marie est d’apporter des outils pour gagner du temps, par exemple des logiciels en ligne pour les plannings ou les contrats à distance… C’est ce que j’appelle le Grand Barbichon 2.0 ! Sara travaille sur la communication et la recherche de financements. Elle accompagne aussi beaucoup la production des albums, ce qui me permet de me consacrer au reste. »</em><br />Accepter de déléguer n’a pas été facile : <em>« Je suis long dans mes processus de changement. J’ai souffert pour me remettre en question. Mais grâce à elles, durant la période du Covid, ça a tenu économiquement. Si elles n’avaient pas été là à ce moment, je crois que je n’aurais pas eu la force de continuer tout seul. »</em><br />Si en France de nombreux·ses musicien·nes ont dû arrêter leur métier faute de pouvoir jouer, celleux du Grand Barbichon Prod ont tenu bon.<em> « On les a encouragé·es à faire des actions culturelles, des concerts assis, des résidences d’écriture et de création… Bref, on voulait leur donner du sens. Pas forcément pour tenir avant la fin parce que… est-ce qu’on y est vraiment, à la fin ? Mais surtout pour garder l’émulation, l’appétit. »</em></p>
<p><a href="http://www.rebonds.net/images/MUSIQUESTRAD/logo.png" class="jcepopup" data-mediabox="1"><img src="http://www.rebonds.net/images/MUSIQUESTRAD/logo.png" alt="gbb prod2" width="337" height="375" style="display: block; margin-left: auto; margin-right: auto;" /></a></p>
<p>Comment s’imagine-t-il dans quelques années ? <em>« Il faut que je fasse en sorte que Le Grand Barbichon vive sans moi un jour, il faudrait développer l’équipe. C’est souvent beaucoup d’angoisses parce que c’est une grosse responsabilité vis-à-vis des artistes. Et puis, c’est un métier où il est important de rester jeune d’esprit, de savoir prendre des risques, de garder son grain de folie. »</em><br />En attendant, la reprise est là : de 40 dates programmées au début de l’année, le voici à 140 ! Pas le temps de souffler. Et de retourner dans la nature ? <em>« Je garderai toujours un rapport à la terre. Malgré la fatigue, je peux passer des heures, tard le soir, dans le jardin. »</em> Pour garder les pieds sur terre et la tête dans les nuages.</p>
<p><strong>Fanny Lancelin</strong><span style="font-size: 8pt;"></span></p>
<p><span style="font-size: 8pt;">(1) Lire la rubrique (Ré)acteur·ices.<br /></span></p>
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<div class="panel-heading">
<h3 class="panel-title" style="text-align: center;">Plus</h3>
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<li>La Machine, Bougnat Sound, Ma Petite, Ciac Boum, Le Grand Barouf… Pour en savoir plus sur les groupes suivis par Le Grand Barbichon Prod et notamment les dates des concerts, rendez-vous sur <a href="https://www.legrandbarbichonprod.com/">https://www.legrandbarbichonprod.com/</a></li>
</ul>
<p><a href="http://www.rebonds.net/images/MUSIQUESTRAD/20210402LEGRANDBAROUF-004.jpg" class="jcepopup" data-mediabox="1" data-mediabox-title="Le Grand Barouf, prochainement en concert à Bourges (photo : GBBprod)."><img src="http://www.rebonds.net/images/MUSIQUESTRAD/20210402LEGRANDBAROUF-004.jpg" alt="gbb prod2" width="479" height="319" style="display: block; margin-left: auto; margin-right: auto;" /></a><a href="https://www.legrandbarbichonprod.com/"></a></p>
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<li>Prochain concert dans le Berry, organisé en partenariat avec Emmetrop : vendredi 17 juin à 21 h au Nadir avec Le Grand Barouf et L’Ombre de la bête. Plus de renseignements sur <a href="https://antrepeaux.net/le-grand-barrouf-lombre-de-la-bete/">https://antrepeaux.net/le-grand-barrouf-lombre-de-la-bete/</a></li>
</ul>Un ensemble de musiques traditionnelles bien dans son époque !2017-03-21T12:54:42+01:002017-03-21T12:54:42+01:00http://www.rebonds.net/58dutradbienvivant/773-unensembledemusiquestraditionnellesbiendanssonepoqueSuper User<p style="text-align: right;"><strong><em>« La tradition ne peut s’exprimer vraiment qu’à travers l’esprit de courage et de défi, et non dans l’observance de la sauvegarde superficielle des coutumes. »</em></strong></p>
<p style="text-align: right;"><strong><em>Henry Miller</em></strong></p>
<p><span style="font-size: 18pt;">A</span>u cœur de l’orchestre, sautillant sur ses pieds nus, tout son corps marque le rythme. D’une main, il accompagne les soufflants ; de l’autre, il soutient les peaux. Son regard passe des un·es aux autres, son sourire aussi... Autour de lui, les bras s’activent, les doigts glissent, les lèvres se tendent. Iels jouent à accorder leurs mouvements et ainsi, à créer une énergie qui donne envie de danser. Iels cherchent à être et faire ensemble...</p>
<p>En cet après-midi d’avril, une quarantaine de musicien·nes sont réuni·es à la salle des fêtes de Soulangis, dans le Cher. Au centre, Cyril Berthet les dirige. Un peu partout dans la pièce, des micros captent le son des accordéons, vielles, flûtes, guitares, cuivres, percussions… Pour célébrer ses 30 ans, l’Ensemble Départemental de Musiques Traditionnelles (EDMT) a en effet décidé d’enregistrer un album. Le dernier datait de 2015 et à son écoute, on mesure le chemin parcouru. S’il s’agit de<em> « faire trace »</em>, pas question de figer le répertoire : l’EDMT s’inscrit pleinement dans son époque, en interprétant des airs certes inspirés de formes traditionnelles, mais arrangés voire entièrement composés par des contemporains. L’instrumentarium s’est aussi élargi pour faire entendre de nouvelles sonorités.</p>
<p>Mais quelle place un orchestre tel que l’EDMT peut-il avoir aujourd’hui ? Comment a-t-il évolué et comment les musicien·nes le font vivre ?</p>
<p><a href="http://www.rebonds.net/images/MUSIQUESTRAD/EDMT2020.jpg" class="jcepopup" data-mediabox="1" data-mediabox-title="L'Ensemble Départemental de Musiques Traditionnelles en 2020 (photo : EDMT)."><img src="http://www.rebonds.net/images/MUSIQUESTRAD/EDMT2020.jpg" alt="Eco délégués CE" width="800" height="377" style="display: block; margin-left: auto; margin-right: auto;" /></a></p>
<p><strong><span style="color: #fc615d;">_________________________________</span></strong></p>
<h3>Jouer et faire danser</h3>
<p><span style="font-size: 12pt; color: #ff615d;"><span style="font-size: 10pt;">__</span><strong>________________________</strong></span><span style="font-family: georgia, palatino;"><span style="color: #fc615d;"><br /></span></span></p>
<p>Lorsque l’EDMT a vu le jour en 1991 à Bourges, Cyril Berthet n’était encore qu’un enfant. Originaire d’Henrichemont, il dansait alors dans le groupe folklorique des Viguenets à Morogues. <em>« Tous mes frères et sœurs y étaient passés,</em> explique-t-il.<em> Il y avait un groupe de danses spécifiquement pour les petits. »</em> En parallèle, il entre à l’école de musique locale, où il apprend la flûte traversière. <em>« C’était un enseignement classique, mais Grégory Jolivet et Thierry Pinson y enseignaient. Les rencontrer a été déterminant. »</em><br />Grégory Jolivet est l’un des grands noms de la vielle en France, qu’il joue de manière traditionnelle mais aussi résolument contemporaine, allant jusqu’à l’équiper de pédales d’effets et à l’associer à la musique électronique<span style="font-size: 8pt;"> (1)</span>. Accordéoniste, compositeur et arrangeur, Thierry Pinson est, entre autres, le fondateur de l’EDMT <span style="font-size: 8pt;">(2)</span>.</p>
<p>Devenu adolescent, Cyril Berthet crée avec des ami·es le groupe TNT pour Tendance Néo-Trad. <em>« Nous y étions plus libres parce que nous jouions des compositions et nous pouvions ajouter aux instruments traditionnels une guitare, une basse, une flûte, un piano... Nous faisions des bals et ça faisait bien danser ! »</em><br />En 2006, ces jeunes néo-trad montent Les Nuits Trad’ Epicées, un tremplin de groupes venus de toute la France. Un an plus tard, le festival « Avis de stages » voit le jour : la programmation mêle ateliers de musiques et de danses, et concerts. Après avoir changé de nom pour s’appeler « Quartiers libres », il s’est arrêté en 2017, les bénévoles ayant souhaité passer à autre chose.</p>
<p><a href="http://www.rebonds.net/images/MUSIQUESTRAD/cyril_EDMT.JPG" class="jcepopup" data-mediabox="1" data-mediabox-title="Cyril Berthet lors d'une répétition de l'EDMT en mai 2022 (Photo : F. Lancelin)."><img src="http://www.rebonds.net/images/MUSIQUESTRAD/cyril_EDMT.JPG" alt="Eco délégués CE" width="288" height="361" style="display: block; margin-left: auto; margin-right: auto;" /></a></p>
<p>En 2010, Cyril Berthet devient musicien professionnel. Il joue au sein de Rue Pascale, avec Grégory Jolivet et Thierry Pinson notamment. Depuis, il a aussi fondé Décibal et joue régulièrement dans la compagnie de théâtre Oh Z’arts Etc <span style="font-size: 8pt;">(3)</span>. <em>« En 2010, je suis aussi revenu au pays après des études à Tours et Nantes,</em> raconte-t-il. <em>Et la même année, Grégory et Thierry m’ont proposé de reprendre l’EDMT. Grégory le dirigeait depuis dix ans. »</em><br />Pendant plusieurs mois, ils travaillent en tuilage. <em>« L’ambiance était déjà très conviviale. J’ai reçu un super accueil. »</em> Une vingtaine de musicien·nes constituent alors l’ensemble. Iels viennent du Cher, de l’Indre et du Loiret dans un but commun : jouer... et faire danser !</p>
<p> <strong><span style="color: #fc615d;">_______________________________________________</span></strong></p>
<h3>Transmettre à l’écrit et à l’oral</h3>
<p><span style="font-size: 12pt; color: #ff615d;"><span style="font-size: 10pt;"></span><strong>_____________________________________</strong></span><span style="font-family: georgia, palatino;"><span style="color: #fc615d;"><br /></span></span></p>
<p>En effet, l’EDMT ne se produit pas en concert mais lors de bals. Son répertoire est composé de formes standards (cercles, scottishes, valses, mazurkas…) et régionales (bourrées, rondeaux, ronds d’Argenton…).<em> « Mais il s’agit essentiellement de compositions originales ou d’adaptations d’airs collectés que j’ai entendus, joués par des musiciens d'aujourd'hui »</em>, précise Cyril Berthet. Lui-même compose et arrange. Des musicien·nes de l’ensemble aussi, comme Eric qui a écrit « Anc ta pelle et pis ton siau » ou Gilles qui a imaginé une valse…</p>
<p> </p>
<p><a href="http://www.rebonds.net/images/MUSIQUESTRAD/EDMT_accordéons.JPG" class="jcepopup" data-mediabox="1" data-mediabox-title="L'ensemble répète tous les quinze jours à Bourges (Photo : F. Lancelin)."><img src="http://www.rebonds.net/images/MUSIQUESTRAD/EDMT_accordéons.JPG" alt="Eco délégués CE" width="422" height="315" style="display: block; margin-left: auto; margin-right: auto;" /></a></p>
<p> </p>
<p>Pour travailler et répéter ces morceaux, chacun·e a sa méthode. Car tous·tes ne savent pas lire les partitions. <em>« Musique de druide, oreille de druide !</em> plaisante Julien, accordéoniste. <em>Je joue à l’oreille et à l’oeil, en suivant Cyril ! »</em> Les airs sont alors appris lors de répétitions par pupitre, à l’oral comme le veut la tradition. Dans une boîte numérique accessible via Internet, Cyril glisse des enregistrements que les musicien·nes peuvent écouter pour s’entraîner chez elleux.<br />Tania, professeur de flûte au conservatoire de Bourges, a quant à elle l’habitude de lire : <em>« Les musiciens classiques sont des musiciens de l’écrit. On nous apprend le respect du texte. J’ai toujours souhaité déconstruire ça. Avant le trad, j’ai étudié la musique indienne, par exemple. »</em><br />Depuis cette année, Cyril fournit des « partitions d’orchestre », des repères que chacun·e s’approprie à sa manière. <em>« Ça permet de faire moins d’erreurs, mais je remarque aussi que lorsque les musiciens ont le nez dans la partition, ils sont moins à l’écoute. »</em></p>
<p> <strong><span style="color: #fc615d;">________________________________________________</span></strong></p>
<h3>« Mélanger trad’ et modernes »</h3>
<p><span style="font-size: 12pt; color: #ff615d;"><span style="font-size: 10pt;">_</span><strong>_____________________________________</strong></span></p>
<p>Autre particularité de l’ensemble : il ne réunit pas seulement des instruments traditionnels. Aux côtés des accordéons diatoniques, des cornemuses et des vielles, on trouve ainsi des saxophones, un cornet, un trombone, une guitare et une basse électriques, des congas, des flûtes traversières, une cithare… Denis, saxophoniste, s’en réjouit : <em>« Le mélange entre les instruments trad’ et modernes, ça dépoussière les morceaux. Plutôt que de les figer dans le folklore, on les fait vivre ! »</em><br />L’ensemble est aujourd’hui complet même si Cyril s’autoriserait quelques ajouts, comme une trompette par exemple. <em>« Je ne recrute pas selon le niveau, je ne fais d’ailleurs passer aucun « test ». Mais je suis vigilant sur l’équilibre sonore. Des violons, pourquoi pas ? Mais il faudrait qu’ils soient au moins dix pour qu’on les entende et je n’ai pas la place où les mettre ! »</em></p>
<p><strong><span style="color: #fc615d;">_________________________________________________</span></strong></p>
<h3>Un rapport particulier au public</h3>
<p><span style="font-size: 12pt; color: #ff615d;"><span style="font-size: 10pt;"></span><strong><span style="font-size: 10pt;">_</span>_____________________________________</strong></span></p>
<p>Trouver des prestations et des scènes suffisamment grandes pour 38 musicien·nes n’est déjà pas facile ! <em>« En bal, ça n’est pas du tout courant d’avoir un si grand groupe ! »</em> L’EDMT se produit environ six fois par an. Cette année a été plus calme à cause du Covid mais l’ensemble espère reprendre ce rythme à la prochaine saison.<br /><em>« Jouer lors d’un bal, ça donne un rapport particulier avec le public</em>, explique Cyril. <em>Ce n’est pas un concert où les gens sont assis. L’EDMT n’est pas un orchestre qui interprète de la musique à danser, mais qui joue pour des danseurs. Nous les voyons devant nous, nous jouons pour eux. C’est un plaisir, ça provoque des sensations particulières. »</em></p>
<p> </p>
<p><a href="http://www.rebonds.net/images/MUSIQUESTRAD/EDMT_ensemble.JPG" class="jcepopup" data-mediabox="1" data-mediabox-title="L'ensemble se compose d'instruments traditionnels mais pas seulement... (Photo : F. Lancelin)."><img src="http://www.rebonds.net/images/MUSIQUESTRAD/EDMT_ensemble.JPG" alt="Eco délégués CE" width="518" height="386" style="display: block; margin-left: auto; margin-right: auto;" /></a></p>
<p> </p>
<p>Une ou deux fois par an, Cyril Berthet invite les musicien·nes à danser une heure, sur une répétition d'une journée, afin de les encourager à pratiquer la danse et à savoir ce qui est lié au rythme. Joueuse de cithare, Sylvie est arrivée à l’EDMT en 2014, après l’avoir vu à la fête de la musique : <em>« Je n'aimais pas du tout la musique traditionnelle, synonyme pour moi de « crincrintude » et ne connaissais aucune des danses : le cercle circassien et la Chapelloise m'ont étonnée. Ce sont des danses d'ensemble assez faciles à apprendre et très sympathiques parce que l'on change de cavalier à chaque tour, donc on change de manière de danser, tout en gardant les pas de base. On peut ajouter des tournés, des balancés et autres, mais la base reste la même. La mazurka, avec son temps suspendu comme une virgule, ne peut se danser sans sourire. » </em><br />Elle intègre l’ensemble en pensant trouver des danseur·ses aux répétitions. Surprise : il n’y en a pas. <em>« J'ai compris plus tard que les danseurs étaient aux aguets des bals et que certains nous suivaient <em>«</em> à la trace <em>»</em>… J'ai compris aussi que je ne pourrais pas jouer ces danses sans en connaître les pas. Pour les apprendre, j'ai suivi quelques ateliers mais surtout, je suis allée à d'autres bals et, autre surprise, il y avait toujours quelqu'un de disponible pour m'apprendre à danser. Il fallait aussi observer les danseurs : certains sont exceptionnels et créatifs. »</em></p>
<p><strong><span style="color: #fc615d;">__________________________________________</span></strong></p>
<h3>Continuer à expérimenter</h3>
<p><span style="font-size: 12pt; color: #ff615d;"><span style="font-size: 10pt;"></span><strong>_________________________________</strong></span></p>
<p>La vie de l’EDMT est aussi rythmée par des événements comme des rencontres avec d’autres ensembles, le tournage d’une vidéo diffusée sur Youtube ou, récemment, un flash-mob ! Dans un lieu impromptu, les musicien·nes arrivent un·e par un·e, s’installent et jouent chacun·e leur partie.<em> « Les gens réagissent bien, s’arrêtent, écoutent</em>, assure Julien qui a eu cette idée. <em>Le thème se répète mais s’enrichit avec l’arrivée progressive des musicien·nes. A la fin du morceau, on s’en va ! »</em></p>
<p>La prochaine date sera la fête de la musique, le mardi 21 juin à Bourges. A l’automne, l’album enregistré à Soulangis pour les 30 ans de l’EDMT sortira et il faudra le faire vivre en l’interprétant en direct, sur scène.<em> « J’aime beaucoup le fait de marquer un moment de la vie d’un orchestre, de faire trace,</em> explique Cyril Berthet. <em>Je suis fier de ce qu’on fait ensemble. »</em> Il souligne toutes les <em>« micro-évolutions »</em> vécues depuis dix ans : <em>« Il faut ce temps, ce cheminement… c’est nécessaire pour obtenir un son, une ambiance... »</em></p>
<p>Toujours musicien, il assure pourtant que son rôle dans l’EDMT est la partie de son activité professionnelle qui lui plaît le plus. <em>« Je donne beaucoup de temps et d’énergie mais ça m’apporte beaucoup, beaucoup. Ce sont des gens que j’aime. Quand je compose, je pense à eux. Il y a une vraie complicité. »</em><br />Musicalement, il reconnaît sa chance : <em>« Je peux expérimenter tout ce que je veux. J’ai une idée, je l’écris, je la partage, on la joue et on l’écoute. J’ai tout le cheminement ! Et je suis à la meilleure place pour entendre l’orchestre ! »</em></p>
<p>Des projets ? Oui, forcément, comme un ciné-concert ou des croisements avec la musique électro. Il ne décide pas seul, bien sûr : les musicien·nes et le conseil d’administration de l’association donnent leur avis. Mais nul doute que les prochaines années de l’EDMT seront vivantes et qu’il continuera à faire partie du paysage musical, bien dans son époque.</p>
<p><strong>Fanny Lancelin</strong></p>
<p><span style="font-size: 8pt;"> </span><span style="font-size: 8pt;">(1) <a href="https://www.legrandbarbichonprod.com/artistes/gregory-jolivet-11">https://www.legrandbarbichonprod.com/artistes/gregory-jolivet-11</a><br />(2) <a href="https://agendatrad.org/groupe/thierry-pinson_95.html">https://agendatrad.org/groupe/thierry-pinson_95.html</a><br />(3) <a href="https://www.ohzartsetc.fr/">https://www.ohzartsetc.fr/</a></span></p>
<p style="text-align: center;"> </p>
<div class="panel panel-primary">
<div class="panel-heading">
<h3 class="panel-title">A écouter</h3>
<p style="text-align: left;">En avant-première, un extrait de l'enregistrement du nouvel album de l'EDMT, en cours de mixage !</p>
<iframe src="https://video.ploud.fr/videos/embed/d436d15f-bb98-4c7f-82e8-0dfc1db9588c" width="560" height="315" title="EDMT_Extrait_PolkaABourdouneau" sandbox="allow-same-origin allow-scripts allow-popups" allowfullscreen="" frameborder="0"></iframe>
<div class="panel panel-primary" style="text-align: center;">
<div class="panel-heading" style="text-align: left;">
<h3 class="panel-title">Plus</h3>
</div>
<ul>
<li style="text-align: left;"><span style="color: #000000;">Pour en savoir plus sur l’EDMT, rendez-vous sur le site</span> <a href="https://edmt.jimdofree.com/">https://edmt.jimdofree.com/ </a>e<span style="color: #000000;">t sur Youtube pour l’écouter et découvrir la vidéo qui raconte son histoire :</span> <a href="https://www.youtube.com/watch?v=Bq2LDq2ltPo">https://www.youtube.com/watch?v=Bq2LDq2ltPo</a></li>
</ul>
</div>
</div>
</div><p style="text-align: right;"><strong><em>« La tradition ne peut s’exprimer vraiment qu’à travers l’esprit de courage et de défi, et non dans l’observance de la sauvegarde superficielle des coutumes. »</em></strong></p>
<p style="text-align: right;"><strong><em>Henry Miller</em></strong></p>
<p><span style="font-size: 18pt;">A</span>u cœur de l’orchestre, sautillant sur ses pieds nus, tout son corps marque le rythme. D’une main, il accompagne les soufflants ; de l’autre, il soutient les peaux. Son regard passe des un·es aux autres, son sourire aussi... Autour de lui, les bras s’activent, les doigts glissent, les lèvres se tendent. Iels jouent à accorder leurs mouvements et ainsi, à créer une énergie qui donne envie de danser. Iels cherchent à être et faire ensemble...</p>
<p>En cet après-midi d’avril, une quarantaine de musicien·nes sont réuni·es à la salle des fêtes de Soulangis, dans le Cher. Au centre, Cyril Berthet les dirige. Un peu partout dans la pièce, des micros captent le son des accordéons, vielles, flûtes, guitares, cuivres, percussions… Pour célébrer ses 30 ans, l’Ensemble Départemental de Musiques Traditionnelles (EDMT) a en effet décidé d’enregistrer un album. Le dernier datait de 2015 et à son écoute, on mesure le chemin parcouru. S’il s’agit de<em> « faire trace »</em>, pas question de figer le répertoire : l’EDMT s’inscrit pleinement dans son époque, en interprétant des airs certes inspirés de formes traditionnelles, mais arrangés voire entièrement composés par des contemporains. L’instrumentarium s’est aussi élargi pour faire entendre de nouvelles sonorités.</p>
<p>Mais quelle place un orchestre tel que l’EDMT peut-il avoir aujourd’hui ? Comment a-t-il évolué et comment les musicien·nes le font vivre ?</p>
<p><a href="http://www.rebonds.net/images/MUSIQUESTRAD/EDMT2020.jpg" class="jcepopup" data-mediabox="1" data-mediabox-title="L'Ensemble Départemental de Musiques Traditionnelles en 2020 (photo : EDMT)."><img src="http://www.rebonds.net/images/MUSIQUESTRAD/EDMT2020.jpg" alt="Eco délégués CE" width="800" height="377" style="display: block; margin-left: auto; margin-right: auto;" /></a></p>
<p><strong><span style="color: #fc615d;">_________________________________</span></strong></p>
<h3>Jouer et faire danser</h3>
<p><span style="font-size: 12pt; color: #ff615d;"><span style="font-size: 10pt;">__</span><strong>________________________</strong></span><span style="font-family: georgia, palatino;"><span style="color: #fc615d;"><br /></span></span></p>
<p>Lorsque l’EDMT a vu le jour en 1991 à Bourges, Cyril Berthet n’était encore qu’un enfant. Originaire d’Henrichemont, il dansait alors dans le groupe folklorique des Viguenets à Morogues. <em>« Tous mes frères et sœurs y étaient passés,</em> explique-t-il.<em> Il y avait un groupe de danses spécifiquement pour les petits. »</em> En parallèle, il entre à l’école de musique locale, où il apprend la flûte traversière. <em>« C’était un enseignement classique, mais Grégory Jolivet et Thierry Pinson y enseignaient. Les rencontrer a été déterminant. »</em><br />Grégory Jolivet est l’un des grands noms de la vielle en France, qu’il joue de manière traditionnelle mais aussi résolument contemporaine, allant jusqu’à l’équiper de pédales d’effets et à l’associer à la musique électronique<span style="font-size: 8pt;"> (1)</span>. Accordéoniste, compositeur et arrangeur, Thierry Pinson est, entre autres, le fondateur de l’EDMT <span style="font-size: 8pt;">(2)</span>.</p>
<p>Devenu adolescent, Cyril Berthet crée avec des ami·es le groupe TNT pour Tendance Néo-Trad. <em>« Nous y étions plus libres parce que nous jouions des compositions et nous pouvions ajouter aux instruments traditionnels une guitare, une basse, une flûte, un piano... Nous faisions des bals et ça faisait bien danser ! »</em><br />En 2006, ces jeunes néo-trad montent Les Nuits Trad’ Epicées, un tremplin de groupes venus de toute la France. Un an plus tard, le festival « Avis de stages » voit le jour : la programmation mêle ateliers de musiques et de danses, et concerts. Après avoir changé de nom pour s’appeler « Quartiers libres », il s’est arrêté en 2017, les bénévoles ayant souhaité passer à autre chose.</p>
<p><a href="http://www.rebonds.net/images/MUSIQUESTRAD/cyril_EDMT.JPG" class="jcepopup" data-mediabox="1" data-mediabox-title="Cyril Berthet lors d'une répétition de l'EDMT en mai 2022 (Photo : F. Lancelin)."><img src="http://www.rebonds.net/images/MUSIQUESTRAD/cyril_EDMT.JPG" alt="Eco délégués CE" width="288" height="361" style="display: block; margin-left: auto; margin-right: auto;" /></a></p>
<p>En 2010, Cyril Berthet devient musicien professionnel. Il joue au sein de Rue Pascale, avec Grégory Jolivet et Thierry Pinson notamment. Depuis, il a aussi fondé Décibal et joue régulièrement dans la compagnie de théâtre Oh Z’arts Etc <span style="font-size: 8pt;">(3)</span>. <em>« En 2010, je suis aussi revenu au pays après des études à Tours et Nantes,</em> raconte-t-il. <em>Et la même année, Grégory et Thierry m’ont proposé de reprendre l’EDMT. Grégory le dirigeait depuis dix ans. »</em><br />Pendant plusieurs mois, ils travaillent en tuilage. <em>« L’ambiance était déjà très conviviale. J’ai reçu un super accueil. »</em> Une vingtaine de musicien·nes constituent alors l’ensemble. Iels viennent du Cher, de l’Indre et du Loiret dans un but commun : jouer... et faire danser !</p>
<p> <strong><span style="color: #fc615d;">_______________________________________________</span></strong></p>
<h3>Transmettre à l’écrit et à l’oral</h3>
<p><span style="font-size: 12pt; color: #ff615d;"><span style="font-size: 10pt;"></span><strong>_____________________________________</strong></span><span style="font-family: georgia, palatino;"><span style="color: #fc615d;"><br /></span></span></p>
<p>En effet, l’EDMT ne se produit pas en concert mais lors de bals. Son répertoire est composé de formes standards (cercles, scottishes, valses, mazurkas…) et régionales (bourrées, rondeaux, ronds d’Argenton…).<em> « Mais il s’agit essentiellement de compositions originales ou d’adaptations d’airs collectés que j’ai entendus, joués par des musiciens d'aujourd'hui »</em>, précise Cyril Berthet. Lui-même compose et arrange. Des musicien·nes de l’ensemble aussi, comme Eric qui a écrit « Anc ta pelle et pis ton siau » ou Gilles qui a imaginé une valse…</p>
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<p><a href="http://www.rebonds.net/images/MUSIQUESTRAD/EDMT_accordéons.JPG" class="jcepopup" data-mediabox="1" data-mediabox-title="L'ensemble répète tous les quinze jours à Bourges (Photo : F. Lancelin)."><img src="http://www.rebonds.net/images/MUSIQUESTRAD/EDMT_accordéons.JPG" alt="Eco délégués CE" width="422" height="315" style="display: block; margin-left: auto; margin-right: auto;" /></a></p>
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<p>Pour travailler et répéter ces morceaux, chacun·e a sa méthode. Car tous·tes ne savent pas lire les partitions. <em>« Musique de druide, oreille de druide !</em> plaisante Julien, accordéoniste. <em>Je joue à l’oreille et à l’oeil, en suivant Cyril ! »</em> Les airs sont alors appris lors de répétitions par pupitre, à l’oral comme le veut la tradition. Dans une boîte numérique accessible via Internet, Cyril glisse des enregistrements que les musicien·nes peuvent écouter pour s’entraîner chez elleux.<br />Tania, professeur de flûte au conservatoire de Bourges, a quant à elle l’habitude de lire : <em>« Les musiciens classiques sont des musiciens de l’écrit. On nous apprend le respect du texte. J’ai toujours souhaité déconstruire ça. Avant le trad, j’ai étudié la musique indienne, par exemple. »</em><br />Depuis cette année, Cyril fournit des « partitions d’orchestre », des repères que chacun·e s’approprie à sa manière. <em>« Ça permet de faire moins d’erreurs, mais je remarque aussi que lorsque les musiciens ont le nez dans la partition, ils sont moins à l’écoute. »</em></p>
<p> <strong><span style="color: #fc615d;">________________________________________________</span></strong></p>
<h3>« Mélanger trad’ et modernes »</h3>
<p><span style="font-size: 12pt; color: #ff615d;"><span style="font-size: 10pt;">_</span><strong>_____________________________________</strong></span></p>
<p>Autre particularité de l’ensemble : il ne réunit pas seulement des instruments traditionnels. Aux côtés des accordéons diatoniques, des cornemuses et des vielles, on trouve ainsi des saxophones, un cornet, un trombone, une guitare et une basse électriques, des congas, des flûtes traversières, une cithare… Denis, saxophoniste, s’en réjouit : <em>« Le mélange entre les instruments trad’ et modernes, ça dépoussière les morceaux. Plutôt que de les figer dans le folklore, on les fait vivre ! »</em><br />L’ensemble est aujourd’hui complet même si Cyril s’autoriserait quelques ajouts, comme une trompette par exemple. <em>« Je ne recrute pas selon le niveau, je ne fais d’ailleurs passer aucun « test ». Mais je suis vigilant sur l’équilibre sonore. Des violons, pourquoi pas ? Mais il faudrait qu’ils soient au moins dix pour qu’on les entende et je n’ai pas la place où les mettre ! »</em></p>
<p><strong><span style="color: #fc615d;">_________________________________________________</span></strong></p>
<h3>Un rapport particulier au public</h3>
<p><span style="font-size: 12pt; color: #ff615d;"><span style="font-size: 10pt;"></span><strong><span style="font-size: 10pt;">_</span>_____________________________________</strong></span></p>
<p>Trouver des prestations et des scènes suffisamment grandes pour 38 musicien·nes n’est déjà pas facile ! <em>« En bal, ça n’est pas du tout courant d’avoir un si grand groupe ! »</em> L’EDMT se produit environ six fois par an. Cette année a été plus calme à cause du Covid mais l’ensemble espère reprendre ce rythme à la prochaine saison.<br /><em>« Jouer lors d’un bal, ça donne un rapport particulier avec le public</em>, explique Cyril. <em>Ce n’est pas un concert où les gens sont assis. L’EDMT n’est pas un orchestre qui interprète de la musique à danser, mais qui joue pour des danseurs. Nous les voyons devant nous, nous jouons pour eux. C’est un plaisir, ça provoque des sensations particulières. »</em></p>
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<p><a href="http://www.rebonds.net/images/MUSIQUESTRAD/EDMT_ensemble.JPG" class="jcepopup" data-mediabox="1" data-mediabox-title="L'ensemble se compose d'instruments traditionnels mais pas seulement... (Photo : F. Lancelin)."><img src="http://www.rebonds.net/images/MUSIQUESTRAD/EDMT_ensemble.JPG" alt="Eco délégués CE" width="518" height="386" style="display: block; margin-left: auto; margin-right: auto;" /></a></p>
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<p>Une ou deux fois par an, Cyril Berthet invite les musicien·nes à danser une heure, sur une répétition d'une journée, afin de les encourager à pratiquer la danse et à savoir ce qui est lié au rythme. Joueuse de cithare, Sylvie est arrivée à l’EDMT en 2014, après l’avoir vu à la fête de la musique : <em>« Je n'aimais pas du tout la musique traditionnelle, synonyme pour moi de « crincrintude » et ne connaissais aucune des danses : le cercle circassien et la Chapelloise m'ont étonnée. Ce sont des danses d'ensemble assez faciles à apprendre et très sympathiques parce que l'on change de cavalier à chaque tour, donc on change de manière de danser, tout en gardant les pas de base. On peut ajouter des tournés, des balancés et autres, mais la base reste la même. La mazurka, avec son temps suspendu comme une virgule, ne peut se danser sans sourire. » </em><br />Elle intègre l’ensemble en pensant trouver des danseur·ses aux répétitions. Surprise : il n’y en a pas. <em>« J'ai compris plus tard que les danseurs étaient aux aguets des bals et que certains nous suivaient <em>«</em> à la trace <em>»</em>… J'ai compris aussi que je ne pourrais pas jouer ces danses sans en connaître les pas. Pour les apprendre, j'ai suivi quelques ateliers mais surtout, je suis allée à d'autres bals et, autre surprise, il y avait toujours quelqu'un de disponible pour m'apprendre à danser. Il fallait aussi observer les danseurs : certains sont exceptionnels et créatifs. »</em></p>
<p><strong><span style="color: #fc615d;">__________________________________________</span></strong></p>
<h3>Continuer à expérimenter</h3>
<p><span style="font-size: 12pt; color: #ff615d;"><span style="font-size: 10pt;"></span><strong>_________________________________</strong></span></p>
<p>La vie de l’EDMT est aussi rythmée par des événements comme des rencontres avec d’autres ensembles, le tournage d’une vidéo diffusée sur Youtube ou, récemment, un flash-mob ! Dans un lieu impromptu, les musicien·nes arrivent un·e par un·e, s’installent et jouent chacun·e leur partie.<em> « Les gens réagissent bien, s’arrêtent, écoutent</em>, assure Julien qui a eu cette idée. <em>Le thème se répète mais s’enrichit avec l’arrivée progressive des musicien·nes. A la fin du morceau, on s’en va ! »</em></p>
<p>La prochaine date sera la fête de la musique, le mardi 21 juin à Bourges. A l’automne, l’album enregistré à Soulangis pour les 30 ans de l’EDMT sortira et il faudra le faire vivre en l’interprétant en direct, sur scène.<em> « J’aime beaucoup le fait de marquer un moment de la vie d’un orchestre, de faire trace,</em> explique Cyril Berthet. <em>Je suis fier de ce qu’on fait ensemble. »</em> Il souligne toutes les <em>« micro-évolutions »</em> vécues depuis dix ans : <em>« Il faut ce temps, ce cheminement… c’est nécessaire pour obtenir un son, une ambiance... »</em></p>
<p>Toujours musicien, il assure pourtant que son rôle dans l’EDMT est la partie de son activité professionnelle qui lui plaît le plus. <em>« Je donne beaucoup de temps et d’énergie mais ça m’apporte beaucoup, beaucoup. Ce sont des gens que j’aime. Quand je compose, je pense à eux. Il y a une vraie complicité. »</em><br />Musicalement, il reconnaît sa chance : <em>« Je peux expérimenter tout ce que je veux. J’ai une idée, je l’écris, je la partage, on la joue et on l’écoute. J’ai tout le cheminement ! Et je suis à la meilleure place pour entendre l’orchestre ! »</em></p>
<p>Des projets ? Oui, forcément, comme un ciné-concert ou des croisements avec la musique électro. Il ne décide pas seul, bien sûr : les musicien·nes et le conseil d’administration de l’association donnent leur avis. Mais nul doute que les prochaines années de l’EDMT seront vivantes et qu’il continuera à faire partie du paysage musical, bien dans son époque.</p>
<p><strong>Fanny Lancelin</strong></p>
<p><span style="font-size: 8pt;"> </span><span style="font-size: 8pt;">(1) <a href="https://www.legrandbarbichonprod.com/artistes/gregory-jolivet-11">https://www.legrandbarbichonprod.com/artistes/gregory-jolivet-11</a><br />(2) <a href="https://agendatrad.org/groupe/thierry-pinson_95.html">https://agendatrad.org/groupe/thierry-pinson_95.html</a><br />(3) <a href="https://www.ohzartsetc.fr/">https://www.ohzartsetc.fr/</a></span></p>
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<h3 class="panel-title">A écouter</h3>
<p style="text-align: left;">En avant-première, un extrait de l'enregistrement du nouvel album de l'EDMT, en cours de mixage !</p>
<iframe src="https://video.ploud.fr/videos/embed/d436d15f-bb98-4c7f-82e8-0dfc1db9588c" width="560" height="315" title="EDMT_Extrait_PolkaABourdouneau" sandbox="allow-same-origin allow-scripts allow-popups" allowfullscreen="" frameborder="0"></iframe>
<div class="panel panel-primary" style="text-align: center;">
<div class="panel-heading" style="text-align: left;">
<h3 class="panel-title">Plus</h3>
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<ul>
<li style="text-align: left;"><span style="color: #000000;">Pour en savoir plus sur l’EDMT, rendez-vous sur le site</span> <a href="https://edmt.jimdofree.com/">https://edmt.jimdofree.com/ </a>e<span style="color: #000000;">t sur Youtube pour l’écouter et découvrir la vidéo qui raconte son histoire :</span> <a href="https://www.youtube.com/watch?v=Bq2LDq2ltPo">https://www.youtube.com/watch?v=Bq2LDq2ltPo</a></li>
</ul>
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