# 59 La voie du communisme libertaire (juin 2022) (Re)bonds est un magazine mensuel créé par Fanny Lancelin, journaliste installée dans le Cher. Son but : à travers, des portraits d'habitant.es du Berry, raconter des parcours alternatifs, des modes de vie où le respect des êtres vivants et de leur environnement tient une place centrale. http://www.rebonds.net/59lavoieducommunismelibertaire 2023-05-11T19:10:02+02:00 (Re)bonds.net Joomla! - Open Source Content Management Les enjeux de la syndicalisation des secteurs féminisés 2017-03-21T13:37:42+01:00 2017-03-21T13:37:42+01:00 http://www.rebonds.net/59lavoieducommunismelibertaire/783-lesenjeuxdelasyndicalisationdessecteursfeminises Super User <p><strong>Malgré de nombreuses luttes menées depuis la Révolution industrielle, le travail réalisé par les femmes est aujourd’hui encore le plus précaire, le moins reconnu, le plus mal payé. Les communistes libertaires les encouragent à créer des réseaux, notamment syndicaux, pour lutter contre le patriarcat qui les étouffe. Comment&nbsp;? La brochure «&nbsp;Quand les femmes se lèvent, le peuple avance&nbsp;» apporte des éléments de réponse.</strong></p> <p>Publiée en février 2022, cette brochure est le fruit des réflexions des commissions travail et antipatriarcat de l’Union Communiste Libertaire. Elle a été présentée lors des rencontres des syndicats autogestionnaires et libertaires à Montreuil, en mai <em>(lire aussi la rubrique (Ré)acteur·ices</em>).</p> <p><strong><span style="color: #ff615d; font-size: 14pt;">Une division sexuée du travail imposée par le patriarcat</span></strong></p> <p>De quels constats partent-elles&nbsp;? Aujourd’hui en France, 14 millions de femmes travaillent, dont la moitié dans des secteurs où l’on sert ou s’occupe des autres&nbsp;: caissières, employées, vendeuses, assistantes maternelles, secrétaires, infirmières, agentes d’entretien, aides-soignantes, aides à domicile, enseignantes… Le résultat de la division sexuée imposée par le système capitaliste, fondamentalement patriarcal et sexiste, et selon lequel les femmes posséderaient des qualités innées comme celles de prendre soin.<br />A cela s’ajoutent d’autres discriminations&nbsp;: ainsi, les travailleuses racisées sont les plus exploitées. Elles se concentrent essentiellement dans quatre secteurs&nbsp;: aides soignantes, aides maternelles, aides à la personne, agentes d’entretien.</p> <p>Leurs conditions d’emploi et de salaires sont sujettes à l’exploitation et à l’oppression. En effet, la précarité et le temps partiel imposé organisent la dépendance des femmes vis-à-vis du conjoint dans une relation hétérosexuelle. Elles les vulnérabilisent lorsqu’elles sont à la tête de familles monoparentales. Conséquence : cela réduit leurs possibilités de refuser, leurs capacités à s’opposer.<br />Sur le lieu de travail, l’oppression spécifique prend la forme du harcèlement sexuel ou de la placardisation. Ces formes sont aussi infligées à celles et ceux qui refusent leur assignation de genre comme les personnes LGBTI <span style="font-size: 8pt;">(1).</span><br />Les femmes non blanches subissent, en plus, la division raciste du travail&nbsp;: elles sont les forçats des secteurs féminisés.</p> <p>Pourtant, leurs métiers sont indispensables à la société et notamment à l’économie. La crise sanitaire liée au Covid l’a montré&nbsp;: 80&nbsp;% des salarié·es des secteurs de la «&nbsp;première ligne&nbsp;» étaient des femmes.</p> <p><strong><span style="color: #ff615d; font-size: 14pt;">Le prolétarien féminin déconsidéré par le syndicalisme</span></strong></p> <p>Comme il est rappelé dans la brochure, l’histoire du mouvement ouvrier est marquée par les luttes des femmes&nbsp;: grève des fileuses de Troyes en 1791&nbsp;; des blanchisseuses de Chaillot, des ovalistes à Lyon, des couturières et lingères de Vouvray, de la laine d’Elbeuf au XIXe siècle&nbsp;; mouvement des sardinières à Douarnenez, des «&nbsp;midinettes&nbsp;» de la haute-couture à Paris, des institutrices, des employées des PTT, des grands magasins, des infirmières, des ouvrières de Moulinex au XXe siècle… Il y a quelques années seulement, les caissières, les travailleuses sans papiers des salons de coiffure, les employées des hôtels... Sans oublier leur rôle dans la Commune de Paris en 1871, dans les mouvements sociaux de Mai 68, dans la lutte contre les réformes des retraites en 2020…</p> <p>Pourtant, le prolétariat féminin est déconsidéré. Le mouvement ouvrier s’est construit autour de la figure de l’homme ouvrier cis blanc. Aujourd’hui encore, la formation syndicale de base tient peu compte de l’histoire des luttes des femmes au travail. Ce machisme à l’intérieur même des organisations militantes est l’une des difficultés de la syndicalisation des femmes.</p> <p>Mais d’autres freins existent&nbsp;: le syndicalisme ne tient pas compte des réalités des métiers féminisés et du travail gratuit que les femmes réalisent au foyer, ce qui rend très difficile pour elles de participer aux activités syndicales. Le travail domestique est encore à la charge des femmes à 80&nbsp;%. <em>«&nbsp;Le syndicalisme ne prend pas de mesures internes pour supprimer ces obstacles&nbsp;»</em>, regrettent les rédacteur·ices de la brochure. <em>«&nbsp;Dans les couples hétérosexuels, tout comme pour la carrière professionnelle, le militantisme syndical du conjoint est favorisé au détriment de celui de la femme syndiquée.&nbsp;»</em><br />De plus, les modes d’action syndicale qui sont les plus valorisés sont encore ceux qui ont une représentation très viriliste de la lutte : barricades, affrontements physiques, etc. <br />Enfin, la bureaucratie syndicale entretient un mode de fonctionnement qui favorise les enjeux de pouvoir, dimension très prégnante chez les hommes, car créée et entretenue par la société patriarcale.</p> <p>&nbsp;</p> <p><img src="http://www.rebonds.net/images/UCL/Capture_du_2022-06-15_10-40-36.png" alt="Capture du 2022 06 15 10 40 36" width="357" height="239" style="display: block; margin-left: auto; margin-right: auto;" /></p> <p>&nbsp;</p> <p><span style="color: #ff615d;"><strong><span style="font-size: 14pt;">Des expériences encourageantes</span></strong></span></p> <p>Pour les membres des commissions travail et antipatriarcat de l’UCL, la syndicalisation des secteurs féminisés est un enjeu majeur pour parvenir pleinement à une lutte de masse. <em>«&nbsp;Par l’organisation de nombreuses rencontres de travailleuses, les féministes syndicalistes ont une responsabilité et un rôle déterminants pour que les obstacles à la sous-syndicalisation soient efficacement combattus&nbsp;»</em>, écrivent-iels.</p> <p>Des expériences encourageantes sont relatées dans la brochure, comme la syndicalisation des salariées des ADMR (Associations d’Aide à Domicile en Milieu Rural) dans les Vosges à partir de 2012. Elle a permis à des dizaines de femmes de s’appuyer sur une organisation syndicale pour s’auto-organiser, et obtenir des avancées sur le respect de leurs jours de repos, la prise en charge de leurs déplacements, l’amélioration de leurs conditions de travail…<br />Parce que le syndicat (la CGT) était prêt et parce qu’il a vite donné les moyens d’agir aux femmes, les Prud’hommes ont pu être saisis et un rapport de force avec le financeur principal, le Conseil départemental, engagé.</p> <p>Autre exemple&nbsp;: en septembre 2021, ce sont les personnels de ménage d’Arc-en-Ciel à Sorbonne Université, soutenus par la CGT et des syndicats de l’arrondissement, qui l’ont emporté après huit jours de grève. Elles ont obtenu l’arrêt des changements de postes et le maintien de leurs horaires de travail, le paiement des heures complémentaires et la régularisation de leurs contrats, le départ du responsable d’exploitation autoritaire et brutal, ainsi que le paiement de la moitié des jours de grève. Une grève totale, puisque 100&nbsp;% des 130 agent·es ont joué le jeu, et ont décidé elleux-mêmes de la poursuite de leur mouvement et de leurs revendications.</p> <p><strong><span style="font-size: 14pt; color: #ff615d;">Se relier aux autres organisations féministes</span></strong></p> <p>Mais les membres de l’UCL le soulignent&nbsp;: <em>«&nbsp;Il y a des périodes «&nbsp;fastes&nbsp;» et des périodes plus dures.&nbsp;»</em> Après une forte mobilisation, les militantes peinent parfois à maintenir la dynamique, en particulier si les freins à leur engagement (cités plus haut) n’ont pas été entièrement levés. Des moyens doivent leur être alloués pour éviter la disparition de tout ce qui a été construit&nbsp;: <em>«&nbsp;Ces moyens doivent être financiers (rembourser des déplacements pour l’action syndicale, payer du temps militant syndical à une ou deux salariées à temps partiel, [créer une] caisse de grève), militants (aider aux tâches militantes chronophages non politiques, avoir un·e référent·e juridique dédié·e au secteur pour ne rien laisser aux employeurs). C’est ce cadre qui permettra alors de faire apparaître régulièrement de nouvelles militantes au sein du syndicat, seule garantie de voir perdurer l’action et la lutte.&nbsp;»</em></p> <p>Un chapitre de la brochure est consacré aux autres outils permettant la syndicalisation des femmes&nbsp;: par exemple, établir des questionnaires pour identifier les problématiques spécifiques des secteurs féminisés, multiplier les états des lieux et diagnostics&nbsp;; intervenir dans les instances de représentations du personnel&nbsp;; développer les formations&nbsp;; dans les syndicats, créer ou renforcer les commissions femmes, adopter les règles de parité dans les délégations, diffuser l’histoire des luttes féminines, organiser des gardes collectives d’enfants lors des instances décisionnelles…</p> <p>Mais aussi faire tomber les barrières avec les autres luttes féministes. Ces dernières ne s’intéressent pas toujours à la question du travail et la lutte syndicale, quant à elle, ne prend pas toujours en compte les problèmes des femmes de manière globale. <em>«&nbsp;Cette distance syndicalisme de lutte - organisations féministes nuit à chacune des deux parties, ainsi qu’au projet de société qu’elles défendent. Alors qu’une large part des courants féministes est issue des mouvements révolutionnaires,</em> a rappelé Louise, membre de l’UCL qui présentait la brochure à Montreuil. <em>C’est le cas du féminisme libertaire, notre courant politique, qui puise à deux sources : l’auto-organisation des travailleuses&nbsp;; l’expérience et les revendications des femmes dans les grands mouvements révolutionnaires.&nbsp;»</em> Les anarchistes disent donc : «&nbsp;tout est lié, relions-nous&nbsp;!&nbsp;»</p> <p>Le sujet sera à nouveau abordé lors des Journées d’été rouge et noir qui se dérouleront dans quelques semaines en Aveyron, notamment lors d’un atelier le jeudi 11 août.</p> <p><span style="font-size: 8pt;">(1) Lesbiennes, Gays, Bisexuel·les, Trans, Intersexes.</span></p> <p>&nbsp;</p> <div class="panel panel-primary"> <div class="panel-heading"> <h3 class="panel-title">Plus</h3> </div> <ul> <li>L’intégralité de la brochure est consultable et téléchargeable gratuitement ici&nbsp;: <a href="http://docplayer.fr/227454290-Quand-les-femmes-se-levent-le-peuple-avance.html">http://docplayer.fr/227454290-Quand-les-femmes-se-levent-le-peuple-avance.html</a><a href="https://www.legrandbarbichonprod.com/"><br /></a></li> <li>Retrouvez aussi tracts, argumentaires, documentaires sur les conceptions féministes des communistes libertaires sur le site de l’UCL&nbsp;: <a href="https://www.unioncommunistelibertaire.org/?Feminisme-6027">https://www.unioncommunistelibertaire.org/?Feminisme-6027</a></li> </ul> </div> <p><strong>Malgré de nombreuses luttes menées depuis la Révolution industrielle, le travail réalisé par les femmes est aujourd’hui encore le plus précaire, le moins reconnu, le plus mal payé. Les communistes libertaires les encouragent à créer des réseaux, notamment syndicaux, pour lutter contre le patriarcat qui les étouffe. Comment&nbsp;? La brochure «&nbsp;Quand les femmes se lèvent, le peuple avance&nbsp;» apporte des éléments de réponse.</strong></p> <p>Publiée en février 2022, cette brochure est le fruit des réflexions des commissions travail et antipatriarcat de l’Union Communiste Libertaire. Elle a été présentée lors des rencontres des syndicats autogestionnaires et libertaires à Montreuil, en mai <em>(lire aussi la rubrique (Ré)acteur·ices</em>).</p> <p><strong><span style="color: #ff615d; font-size: 14pt;">Une division sexuée du travail imposée par le patriarcat</span></strong></p> <p>De quels constats partent-elles&nbsp;? Aujourd’hui en France, 14 millions de femmes travaillent, dont la moitié dans des secteurs où l’on sert ou s’occupe des autres&nbsp;: caissières, employées, vendeuses, assistantes maternelles, secrétaires, infirmières, agentes d’entretien, aides-soignantes, aides à domicile, enseignantes… Le résultat de la division sexuée imposée par le système capitaliste, fondamentalement patriarcal et sexiste, et selon lequel les femmes posséderaient des qualités innées comme celles de prendre soin.<br />A cela s’ajoutent d’autres discriminations&nbsp;: ainsi, les travailleuses racisées sont les plus exploitées. Elles se concentrent essentiellement dans quatre secteurs&nbsp;: aides soignantes, aides maternelles, aides à la personne, agentes d’entretien.</p> <p>Leurs conditions d’emploi et de salaires sont sujettes à l’exploitation et à l’oppression. En effet, la précarité et le temps partiel imposé organisent la dépendance des femmes vis-à-vis du conjoint dans une relation hétérosexuelle. Elles les vulnérabilisent lorsqu’elles sont à la tête de familles monoparentales. Conséquence : cela réduit leurs possibilités de refuser, leurs capacités à s’opposer.<br />Sur le lieu de travail, l’oppression spécifique prend la forme du harcèlement sexuel ou de la placardisation. Ces formes sont aussi infligées à celles et ceux qui refusent leur assignation de genre comme les personnes LGBTI <span style="font-size: 8pt;">(1).</span><br />Les femmes non blanches subissent, en plus, la division raciste du travail&nbsp;: elles sont les forçats des secteurs féminisés.</p> <p>Pourtant, leurs métiers sont indispensables à la société et notamment à l’économie. La crise sanitaire liée au Covid l’a montré&nbsp;: 80&nbsp;% des salarié·es des secteurs de la «&nbsp;première ligne&nbsp;» étaient des femmes.</p> <p><strong><span style="color: #ff615d; font-size: 14pt;">Le prolétarien féminin déconsidéré par le syndicalisme</span></strong></p> <p>Comme il est rappelé dans la brochure, l’histoire du mouvement ouvrier est marquée par les luttes des femmes&nbsp;: grève des fileuses de Troyes en 1791&nbsp;; des blanchisseuses de Chaillot, des ovalistes à Lyon, des couturières et lingères de Vouvray, de la laine d’Elbeuf au XIXe siècle&nbsp;; mouvement des sardinières à Douarnenez, des «&nbsp;midinettes&nbsp;» de la haute-couture à Paris, des institutrices, des employées des PTT, des grands magasins, des infirmières, des ouvrières de Moulinex au XXe siècle… Il y a quelques années seulement, les caissières, les travailleuses sans papiers des salons de coiffure, les employées des hôtels... Sans oublier leur rôle dans la Commune de Paris en 1871, dans les mouvements sociaux de Mai 68, dans la lutte contre les réformes des retraites en 2020…</p> <p>Pourtant, le prolétariat féminin est déconsidéré. Le mouvement ouvrier s’est construit autour de la figure de l’homme ouvrier cis blanc. Aujourd’hui encore, la formation syndicale de base tient peu compte de l’histoire des luttes des femmes au travail. Ce machisme à l’intérieur même des organisations militantes est l’une des difficultés de la syndicalisation des femmes.</p> <p>Mais d’autres freins existent&nbsp;: le syndicalisme ne tient pas compte des réalités des métiers féminisés et du travail gratuit que les femmes réalisent au foyer, ce qui rend très difficile pour elles de participer aux activités syndicales. Le travail domestique est encore à la charge des femmes à 80&nbsp;%. <em>«&nbsp;Le syndicalisme ne prend pas de mesures internes pour supprimer ces obstacles&nbsp;»</em>, regrettent les rédacteur·ices de la brochure. <em>«&nbsp;Dans les couples hétérosexuels, tout comme pour la carrière professionnelle, le militantisme syndical du conjoint est favorisé au détriment de celui de la femme syndiquée.&nbsp;»</em><br />De plus, les modes d’action syndicale qui sont les plus valorisés sont encore ceux qui ont une représentation très viriliste de la lutte : barricades, affrontements physiques, etc. <br />Enfin, la bureaucratie syndicale entretient un mode de fonctionnement qui favorise les enjeux de pouvoir, dimension très prégnante chez les hommes, car créée et entretenue par la société patriarcale.</p> <p>&nbsp;</p> <p><img src="http://www.rebonds.net/images/UCL/Capture_du_2022-06-15_10-40-36.png" alt="Capture du 2022 06 15 10 40 36" width="357" height="239" style="display: block; margin-left: auto; margin-right: auto;" /></p> <p>&nbsp;</p> <p><span style="color: #ff615d;"><strong><span style="font-size: 14pt;">Des expériences encourageantes</span></strong></span></p> <p>Pour les membres des commissions travail et antipatriarcat de l’UCL, la syndicalisation des secteurs féminisés est un enjeu majeur pour parvenir pleinement à une lutte de masse. <em>«&nbsp;Par l’organisation de nombreuses rencontres de travailleuses, les féministes syndicalistes ont une responsabilité et un rôle déterminants pour que les obstacles à la sous-syndicalisation soient efficacement combattus&nbsp;»</em>, écrivent-iels.</p> <p>Des expériences encourageantes sont relatées dans la brochure, comme la syndicalisation des salariées des ADMR (Associations d’Aide à Domicile en Milieu Rural) dans les Vosges à partir de 2012. Elle a permis à des dizaines de femmes de s’appuyer sur une organisation syndicale pour s’auto-organiser, et obtenir des avancées sur le respect de leurs jours de repos, la prise en charge de leurs déplacements, l’amélioration de leurs conditions de travail…<br />Parce que le syndicat (la CGT) était prêt et parce qu’il a vite donné les moyens d’agir aux femmes, les Prud’hommes ont pu être saisis et un rapport de force avec le financeur principal, le Conseil départemental, engagé.</p> <p>Autre exemple&nbsp;: en septembre 2021, ce sont les personnels de ménage d’Arc-en-Ciel à Sorbonne Université, soutenus par la CGT et des syndicats de l’arrondissement, qui l’ont emporté après huit jours de grève. Elles ont obtenu l’arrêt des changements de postes et le maintien de leurs horaires de travail, le paiement des heures complémentaires et la régularisation de leurs contrats, le départ du responsable d’exploitation autoritaire et brutal, ainsi que le paiement de la moitié des jours de grève. Une grève totale, puisque 100&nbsp;% des 130 agent·es ont joué le jeu, et ont décidé elleux-mêmes de la poursuite de leur mouvement et de leurs revendications.</p> <p><strong><span style="font-size: 14pt; color: #ff615d;">Se relier aux autres organisations féministes</span></strong></p> <p>Mais les membres de l’UCL le soulignent&nbsp;: <em>«&nbsp;Il y a des périodes «&nbsp;fastes&nbsp;» et des périodes plus dures.&nbsp;»</em> Après une forte mobilisation, les militantes peinent parfois à maintenir la dynamique, en particulier si les freins à leur engagement (cités plus haut) n’ont pas été entièrement levés. Des moyens doivent leur être alloués pour éviter la disparition de tout ce qui a été construit&nbsp;: <em>«&nbsp;Ces moyens doivent être financiers (rembourser des déplacements pour l’action syndicale, payer du temps militant syndical à une ou deux salariées à temps partiel, [créer une] caisse de grève), militants (aider aux tâches militantes chronophages non politiques, avoir un·e référent·e juridique dédié·e au secteur pour ne rien laisser aux employeurs). C’est ce cadre qui permettra alors de faire apparaître régulièrement de nouvelles militantes au sein du syndicat, seule garantie de voir perdurer l’action et la lutte.&nbsp;»</em></p> <p>Un chapitre de la brochure est consacré aux autres outils permettant la syndicalisation des femmes&nbsp;: par exemple, établir des questionnaires pour identifier les problématiques spécifiques des secteurs féminisés, multiplier les états des lieux et diagnostics&nbsp;; intervenir dans les instances de représentations du personnel&nbsp;; développer les formations&nbsp;; dans les syndicats, créer ou renforcer les commissions femmes, adopter les règles de parité dans les délégations, diffuser l’histoire des luttes féminines, organiser des gardes collectives d’enfants lors des instances décisionnelles…</p> <p>Mais aussi faire tomber les barrières avec les autres luttes féministes. Ces dernières ne s’intéressent pas toujours à la question du travail et la lutte syndicale, quant à elle, ne prend pas toujours en compte les problèmes des femmes de manière globale. <em>«&nbsp;Cette distance syndicalisme de lutte - organisations féministes nuit à chacune des deux parties, ainsi qu’au projet de société qu’elles défendent. Alors qu’une large part des courants féministes est issue des mouvements révolutionnaires,</em> a rappelé Louise, membre de l’UCL qui présentait la brochure à Montreuil. <em>C’est le cas du féminisme libertaire, notre courant politique, qui puise à deux sources : l’auto-organisation des travailleuses&nbsp;; l’expérience et les revendications des femmes dans les grands mouvements révolutionnaires.&nbsp;»</em> Les anarchistes disent donc : «&nbsp;tout est lié, relions-nous&nbsp;!&nbsp;»</p> <p>Le sujet sera à nouveau abordé lors des Journées d’été rouge et noir qui se dérouleront dans quelques semaines en Aveyron, notamment lors d’un atelier le jeudi 11 août.</p> <p><span style="font-size: 8pt;">(1) Lesbiennes, Gays, Bisexuel·les, Trans, Intersexes.</span></p> <p>&nbsp;</p> <div class="panel panel-primary"> <div class="panel-heading"> <h3 class="panel-title">Plus</h3> </div> <ul> <li>L’intégralité de la brochure est consultable et téléchargeable gratuitement ici&nbsp;: <a href="http://docplayer.fr/227454290-Quand-les-femmes-se-levent-le-peuple-avance.html">http://docplayer.fr/227454290-Quand-les-femmes-se-levent-le-peuple-avance.html</a><a href="https://www.legrandbarbichonprod.com/"><br /></a></li> <li>Retrouvez aussi tracts, argumentaires, documentaires sur les conceptions féministes des communistes libertaires sur le site de l’UCL&nbsp;: <a href="https://www.unioncommunistelibertaire.org/?Feminisme-6027">https://www.unioncommunistelibertaire.org/?Feminisme-6027</a></li> </ul> </div> L’écosyndicalisme 2017-03-21T13:37:42+01:00 2017-03-21T13:37:42+01:00 http://www.rebonds.net/59lavoieducommunismelibertaire/784-lecosyndicalisme Super User <p><strong><em>«&nbsp;La lutte écologiste est vitale&nbsp;; elle n’est cohérente qu’en étant anticapitaliste et antiproductiviste.&nbsp;»</em><span style="font-size: 8pt;"> (1)</span> Par cette affirmation, les communistes libertaires veulent contrer l’idée reçue selon laquelle l’écologie ne serait que l’affaire des bourgeois·es, et serait l’ennemie du monde ouvrier et paysan. Partout, les mouvements sociaux et écologistes se rapprochent. Il y a quelques mois, un réseau écosyndicaliste a même été créé en France.</strong><span style="color: #ff615d;"> </span></p> <p>Parce qu’il repose sur une croissance continue, le système capitaliste surexploite les ressources naturelles au point de les épuiser. Aux déséquilibres des écosystèmes et à l’appauvrissement de la biodiversité, s’ajoutent les pollutions liées à la production.<br />Pour y remédier, le capitalisme vert mise sur des solutions technologiques, qui ouvrent de nouveaux marchés, sans jamais remettre en question le principe même de surproduction et de surconsommation.</p> <p>Parmi les victimes&nbsp;: les salarié·es, les paysan·nes, les travailleur·ses pauvres, les privé·es d’emplois, les retraité·es… D’une part, parce qu’iels ne possèdent pas les moyens de production et ne peuvent donc pas décider de ce qui est produit, selon quels besoins et comment&nbsp;; d’autre part, parce que les capitalistes leur imposent leur cadre de vie (métropolisation, transport, modes de consommation). <em>«&nbsp;Ils les contraignent donc à participer à la destruction de l’environnement.&nbsp;» <span style="font-size: 8pt;">(1)</span></em></p> <p><strong><span style="font-size: 14pt; color: #ff615d;">Un mouvement ouvrier écologiste dès l’origine</span></strong></p> <p>Pour autant, les classes populaires ont une conscience écologique. Patrick Farbiaz, militant de PEPS (Pour une Ecologie Populaire et Sociale <span style="font-size: 8pt;">(2)</span>) et l’un des initiateurs de l’appel pour un réseau écosyndicaliste, l’a rappelé lors des rencontres des syndicalistes autogestionnaires et libertaires qui se sont tenues à Montreuil en mai <span style="font-size: 8pt;">(3)</span>&nbsp;: <em>«&nbsp;Les ouvrier·es doivent se réapproprier leur histoire, parce que l’écologie est présente dès le XIXe siècle dans leur mouvement. Iels savent intuitivement que leur survie est en jeu.&nbsp;»</em><br />Comme Patrick Farbiaz le rappelle dans un article paru dans la revue Contretemps <span style="font-size: 8pt;">(4)</span>, les maladies professionnelles telles que la silicose ou celles liées au plomb, l’amiante, le phosphore, ont très vite alerté les travailleur·ses. Rapidement aussi, iels ont vu les conséquences de la production sur l’écosystème urbain qui entourait les usines et les mines. Patrick Farbiaz cite en exemple les luttes en Andalousie autour des mines de Rio Tinto ou les grèves des femmes contre la céruse en Angleterre.</p> <p>Ces luttes ont malheureusement été effacées au profit d’une autre histoire écrite notamment par les communistes productivistes. Plus tard, les Trente Glorieuses conforteront l’idée que sans croissance, pas de salut&nbsp;! L’écologie remettant en cause le productivisme, elle devenait <em>«&nbsp;l’ennemie de l’emploi et du salaire ouvrier&nbsp;»</em>.<br />Mais dans les années 1970, les catastrophes industrielles notamment ont ouvert la voie à de nouvelles contestations. <em>«&nbsp;Une insubordination ouvrière se manifestait contre les «&nbsp;dégâts du progrès&nbsp;» et remit en cause la modernisation productiviste dans plusieurs secteurs&nbsp;»</em>, souligne Patrick Farbiaz. Les catégories les plus exploitées se soulevèrent et aux Etats-Unis, elles parvinrent même à inventer les notions clés de justice environnementale et d’écologie de la libération <span style="font-size: 8pt;">(4)</span>.</p> <p>Aujourd’hui, partout sur la planète, y compris en France, des résistances au système productiviste et extractiviste se multiplient. Par exemple, contre l’accaparement et la bétonisation des terres agricoles (Soulèvements de la Terre et de la Mer, ZAD - Zone A Défendre, JAD - Jardins A Défendre…), pour les luttes éco-féministes, pour la justice sociale et environnementale (Plus Jamais Ça, Youth For Climate, Extinction Rebellion…).</p> <p>&nbsp;</p> <p><a href="http://www.rebonds.net/images/UCL/manif_lycéens.JPG" class="jcepopup" data-mediabox="1" data-mediabox-title="Mouvements écologiste et syndical doivent se rejoindre. Ici, une manifestation de Youth For Climate à Bourges en 2019 (photo : archives (Re)bonds)."><img src="http://www.rebonds.net/images/UCL/manif_lycéens.JPG" alt="manif lycéens" width="607" height="430" style="display: block; margin-left: auto; margin-right: auto;" /></a></p> <p>&nbsp;</p> <p><strong><span style="font-size: 14pt; color: #ff615d;">Un champ de bataille&nbsp;: l’entreprise</span></strong></p> <p>Mais concrètement, comment faire converger à nouveau les mouvements sociaux et écologistes&nbsp;?<br />L’écosyndicalisme se présente comme une des réponses à cette question&nbsp;: il s’agit pour le syndicalisme de prendre en charge l’écologie et, inversement, pour le mouvement écologiste de prendre en charge la défense des intérêts des travailleur·ses.</p> <p>Le champ de bataille serait donc notamment celui de l’entreprise parce que, comme le souligne Patrick Farbiaz, <em>«&nbsp;c’est dans les entreprises que nous affrontons les conséquences du productivisme : amiante, pollution chimique, air pollué, ondes électromagnétiques, énergie nucléaire… Ce sont d’abord les ouvrier·es qui meurent des cancers professionnels liés aux produits chimiques… C’est dans les entreprises de services que les nouvelles maladies liées au stress et à l’intensification du travail, au harcèlement psychique et à la course à la rentabilité se traduisent par la souffrance au travail qui va jusqu’aux suicides (...) Ce sont les salarié·es du commerce qui subissent les effets de temps partiels imposés, d’univers sonores abrutissants, celleux de l’agriculture qui sont les premières victimes des dangereux produits phytosanitaires ou des nitrates&nbsp;»</em> <span style="font-size: 8pt;">(5)</span>.</p> <p><strong><span style="font-size: 14pt; color: #ff615d;">Aborder les questions clivantes</span></strong></p> <p>En novembre 2021, Patrick Farbiaz a appelé à la création d'un réseau écosyndicaliste en France. Il émanait d’Emancipation <span style="font-size: 8pt;">(6)</span> (une tendance intersyndicale qui regroupe des personnels de l’Education nationale, des étudiant·es, des lycéen·nes) reliée au mouvement PEPS (un mouvement d’écologie populaire anticapitaliste, œuvrant justement à la convergence entre les luttes sociales et environnementales).<br />Au total, 130 membres syndicaux et syndicales, et quelques unités provenant de la CGT, FSU et Solidaires ont signé cet appel. <em>«&nbsp;Il y a maintenant une équipe d’animation et trois groupes d’actions : éducation, énergie et déchets&nbsp;»</em>, a précisé Patrick Farbiaz à Montreuil.</p> <p>L’objectif du réseau&nbsp;: informer les travailleur·ses&nbsp;; les soutenir dans leurs luttes&nbsp;; mutualiser leurs expériences&nbsp;; ouvrir le débat sur les questions d’écologie dans le travail&nbsp;: le nucléaire, la croissance, la reconversion écologique, la taxe carbone, les nouvelles formes de luttes issues de la désobéissance civile, le revenu garanti, le protectionnisme et les normes sociales et environnementales à imposer... <em>«&nbsp;Il faut oser le faire, même si ces questions sont clivantes&nbsp;»</em>, a assuré Patrick Farbiaz. Pourquoi le sont-elles&nbsp;? Parce que simplement pointer du doigt une industrie polluante peut mettre en cause la pérennité d’un site de production et ainsi, les emplois. A moins que les travailleur·ses s’emparent elleux-mêmes de ces questions et œuvrent ensemble à leur reconversion.</p> <p><strong><span style="font-size: 14pt; color: #ff615d;">Vers une reconversion des emplois</span></strong></p> <p>C’est ce qu’encouragent les écosyndicalistes à l’intérieur des entreprises dans lesquelles iels militent. Mais selon le principe de l’auto-organisation chère aux libertaires, les travailleur·ses doivent décider elleux-mêmes du chemin à prendre. Des actions sont déjà en cours dans des secteurs comme l’énergie (par exemple chez Total à Grandpuits), les déchets (Séché à Toulouse, ville de Marseille, Sépur dans l’Essonne), l’aéronautique (Airbus)…</p> <p>A Montreuil, Solène, salariée de l’UNIA en Suisse, a témoigné&nbsp;: <em>«&nbsp;Nous avons créé une plateforme qui regroupe militant·es du climat, féministes et syndicats. Nous avons rédigé un manifeste qui reprend des revendications transversales, notamment celle de la reconversion professionnelle, et des cahiers de revendications plus spécifiques aux branches.&nbsp;»</em> Elle a également participé à la mise en place d’un outil démocratique baptisé «&nbsp;L’initiative&nbsp;». <em>«&nbsp;L’objectif est de reconvertir 1.000 emplois industriels vers les métiers du soin notamment.&nbsp;»</em> Dans sa région, la production de montres de luxe domine. <em>«&nbsp;Il ne s’agit pas de désindustrialiser puisque l’outil est là, mais juste d’arrêter de produire des trucs qui ne servent à rien et de produire de l’essentiel&nbsp;!&nbsp;»</em></p> <p>&nbsp;</p> <p><a href="http://www.rebonds.net/images/UCL/power-station-374097_960_720.jpg" class="jcepopup" data-mediabox="1" data-mediabox-title="Les pollutions liées au productivisme inquiètent les ouvrier.es elleux-mêmes (photo : stevepb)."><img src="http://www.rebonds.net/images/UCL/power-station-374097_960_720.jpg" alt="power station 374097 960 720" width="500" height="333" style="display: block; margin-left: auto; margin-right: auto;" /></a></p> <p>&nbsp;</p> <p><span style="color: #ff615d;"><strong><span style="font-size: 14pt;">Protéger les lanceur·ses d’alerte</span></strong></span></p> <p>Autre but du réseau écosyndicaliste&nbsp;: protéger juridiquement les lanceur·ses d’alerte. L’actualité le prouve avec l’affaire de la centrale nucléaire de Tricastin <span style="font-size: 8pt;">(7)</span>, celleux qui s’expriment pour dénoncer les atteintes à l’environnement ont besoin de soutien. <em>«&nbsp;Les salarié·es savent des choses, iels se posent beaucoup de questions voire sont complètement dégoûté·es. Iels ont besoin de parler&nbsp;»</em>, a témoigné Yann, de la CGT Sud Loire, à Montreuil. Il avait eu l'occasion d'échanger avec des travailleur·ses de l’aéroport de Nantes. Là-bas, durant la lutte à Notre-Dame-des-Landes, des rapprochements avaient déjà eu lieu avec des zadistes. Des journées d’études prolongent actuellement ce type de liens.</p> <p><strong><span style="font-size: 14pt; color: #ff615d;">Un levier révolutionnaire</span></strong></p> <p>Le collectif «&nbsp;Plus Jamais Ça&nbsp;» est un autre exemple de rapprochement. Créé en janvier 2020, il réunit les Amis de la Terre, Attac France, Greenpeace France, Oxfam France et la CGT, la Confédération paysanne, la FSU, l’Union syndicale Solidaires.<br />Ensemble, iels proposent «&nbsp;un plan de rupture&nbsp;» où revendications sociales et écologiques sont entremêlées.<em> «&nbsp;Entre toutes ces organisations, les divergences existent, elles peuvent être importantes. Mais nous avons décidé de lister tout ce qui nous rassemble et de mettre de côté tout ce qui nous divise&nbsp;»</em>, a expliqué Jean-Yves Le Sage, membre de la CGT et du collectif «&nbsp;Plus Jamais Ça&nbsp;», lors des rencontres à Montreuil.<br />Il ne cache pas qu’au sein de la CGT, syndicat encore marqué par le productivisme, le débat pour rejoindre le collectif a été <em>«&nbsp;violent&nbsp;»</em>. <em>«&nbsp;Martinez l’a imposé en force. Ça a aussi été le cas chez Greenpeace… Vous imaginez&nbsp;? S’allier aux nucléocrates de la CGT&nbsp;!&nbsp;»</em></p> <p>Ces alliances tiendront-elles&nbsp;? Beaucoup en doutent, y compris parmi les militant·es elleux-mêmes. Mais leur existence a le mérite de provoquer des rencontres entre des entités qui s’ignoraient, de faire advenir publiquement les débats et ainsi, d’ouvrir les consciences. Elles participent d’un mouvement dans lequel les plus exploité·es détiennent enfin les conditions de leur existence, et répondent à l’urgence sociale et climatique que l’époque leur imposent. Un formidable levier révolutionnaire pour, enfin, transformer la société en profondeur.</p> <p><strong>Fanny Lancelin</strong></p> <p><span style="font-size: 8pt;">(1) Extrait du manifeste de l’Union Communiste Libertaire (UCL) écrit en 2019. Lire aussi la rubrique (Ré)acteur·ices.</span><br /><span style="font-size: 8pt;">(2) <a href="https://confpeps.org">https://confpeps.org</a></span><br /><span style="font-size: 8pt;">(3) «&nbsp;Au taf&nbsp;!&nbsp;», rencontres des syndicalistes autogestionnaires et libertaires à Montreuil organisée par l’Union Communiste Libertaire (UCL). Lire aussi la rubrique (Ré)acteur·ices.</span><br /><span style="font-size: 8pt;">(4) Justice environnementale&nbsp;: <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Justice_environnementale">https://fr.wikipedia.org/wiki/Justice_environnementale</a></span><br /><span style="font-size: 8pt;">Ecologie de la libération&nbsp;: <a href="https://www.letempsdescerises.net/?product=lecologie-de-la-liberation">https://www.letempsdescerises.net/?product=lecologie-de-la-liberation</a></span><br /><span style="font-size: 8pt;">(5) <a href="https://www.infolibertaire.net/construire-leco-syndicalisme/">https://www.infolibertaire.net/construire-leco-syndicalisme/</a></span><br /><span style="font-size: 8pt;">(6) <a href="https://www.emancipation.fr">https://www.emancipation.fr</a></span><br /><span style="font-size: 8pt;">(7) <a href="https://www.francetvinfo.fr/societe/nucleaire/centrale-nucleaire-du-tricastin-l-ouverture-d-une-enquete-est-un-soulagement-selon-l-avocat-d-un-ancien-cadre-d-edf_5186893.html">https://www.francetvinfo.fr/societe/nucleaire/centrale-nucleaire-du-tricastin-l-ouverture-d-une-enquete-est-un-soulagement-selon-l-avocat-d-un-ancien-cadre-d-edf_5186893.html</a></span></p> <p>&nbsp;</p> <div class="panel panel-primary"> <div class="panel-heading"> <h3 class="panel-title">Plus</h3> </div> <ul> <li>L’appel du réseau écosyndicaliste est lisible ici&nbsp;: <a href="https://syndicollectif.fr/un-appel-pour-un-reseau-eco-syndicaliste/">https://syndicollectif.fr/un-appel-pour-un-reseau-eco-syndicaliste/</a></li> </ul> </div> <p><strong><em>«&nbsp;La lutte écologiste est vitale&nbsp;; elle n’est cohérente qu’en étant anticapitaliste et antiproductiviste.&nbsp;»</em><span style="font-size: 8pt;"> (1)</span> Par cette affirmation, les communistes libertaires veulent contrer l’idée reçue selon laquelle l’écologie ne serait que l’affaire des bourgeois·es, et serait l’ennemie du monde ouvrier et paysan. Partout, les mouvements sociaux et écologistes se rapprochent. Il y a quelques mois, un réseau écosyndicaliste a même été créé en France.</strong><span style="color: #ff615d;"> </span></p> <p>Parce qu’il repose sur une croissance continue, le système capitaliste surexploite les ressources naturelles au point de les épuiser. Aux déséquilibres des écosystèmes et à l’appauvrissement de la biodiversité, s’ajoutent les pollutions liées à la production.<br />Pour y remédier, le capitalisme vert mise sur des solutions technologiques, qui ouvrent de nouveaux marchés, sans jamais remettre en question le principe même de surproduction et de surconsommation.</p> <p>Parmi les victimes&nbsp;: les salarié·es, les paysan·nes, les travailleur·ses pauvres, les privé·es d’emplois, les retraité·es… D’une part, parce qu’iels ne possèdent pas les moyens de production et ne peuvent donc pas décider de ce qui est produit, selon quels besoins et comment&nbsp;; d’autre part, parce que les capitalistes leur imposent leur cadre de vie (métropolisation, transport, modes de consommation). <em>«&nbsp;Ils les contraignent donc à participer à la destruction de l’environnement.&nbsp;» <span style="font-size: 8pt;">(1)</span></em></p> <p><strong><span style="font-size: 14pt; color: #ff615d;">Un mouvement ouvrier écologiste dès l’origine</span></strong></p> <p>Pour autant, les classes populaires ont une conscience écologique. Patrick Farbiaz, militant de PEPS (Pour une Ecologie Populaire et Sociale <span style="font-size: 8pt;">(2)</span>) et l’un des initiateurs de l’appel pour un réseau écosyndicaliste, l’a rappelé lors des rencontres des syndicalistes autogestionnaires et libertaires qui se sont tenues à Montreuil en mai <span style="font-size: 8pt;">(3)</span>&nbsp;: <em>«&nbsp;Les ouvrier·es doivent se réapproprier leur histoire, parce que l’écologie est présente dès le XIXe siècle dans leur mouvement. Iels savent intuitivement que leur survie est en jeu.&nbsp;»</em><br />Comme Patrick Farbiaz le rappelle dans un article paru dans la revue Contretemps <span style="font-size: 8pt;">(4)</span>, les maladies professionnelles telles que la silicose ou celles liées au plomb, l’amiante, le phosphore, ont très vite alerté les travailleur·ses. Rapidement aussi, iels ont vu les conséquences de la production sur l’écosystème urbain qui entourait les usines et les mines. Patrick Farbiaz cite en exemple les luttes en Andalousie autour des mines de Rio Tinto ou les grèves des femmes contre la céruse en Angleterre.</p> <p>Ces luttes ont malheureusement été effacées au profit d’une autre histoire écrite notamment par les communistes productivistes. Plus tard, les Trente Glorieuses conforteront l’idée que sans croissance, pas de salut&nbsp;! L’écologie remettant en cause le productivisme, elle devenait <em>«&nbsp;l’ennemie de l’emploi et du salaire ouvrier&nbsp;»</em>.<br />Mais dans les années 1970, les catastrophes industrielles notamment ont ouvert la voie à de nouvelles contestations. <em>«&nbsp;Une insubordination ouvrière se manifestait contre les «&nbsp;dégâts du progrès&nbsp;» et remit en cause la modernisation productiviste dans plusieurs secteurs&nbsp;»</em>, souligne Patrick Farbiaz. Les catégories les plus exploitées se soulevèrent et aux Etats-Unis, elles parvinrent même à inventer les notions clés de justice environnementale et d’écologie de la libération <span style="font-size: 8pt;">(4)</span>.</p> <p>Aujourd’hui, partout sur la planète, y compris en France, des résistances au système productiviste et extractiviste se multiplient. Par exemple, contre l’accaparement et la bétonisation des terres agricoles (Soulèvements de la Terre et de la Mer, ZAD - Zone A Défendre, JAD - Jardins A Défendre…), pour les luttes éco-féministes, pour la justice sociale et environnementale (Plus Jamais Ça, Youth For Climate, Extinction Rebellion…).</p> <p>&nbsp;</p> <p><a href="http://www.rebonds.net/images/UCL/manif_lycéens.JPG" class="jcepopup" data-mediabox="1" data-mediabox-title="Mouvements écologiste et syndical doivent se rejoindre. Ici, une manifestation de Youth For Climate à Bourges en 2019 (photo : archives (Re)bonds)."><img src="http://www.rebonds.net/images/UCL/manif_lycéens.JPG" alt="manif lycéens" width="607" height="430" style="display: block; margin-left: auto; margin-right: auto;" /></a></p> <p>&nbsp;</p> <p><strong><span style="font-size: 14pt; color: #ff615d;">Un champ de bataille&nbsp;: l’entreprise</span></strong></p> <p>Mais concrètement, comment faire converger à nouveau les mouvements sociaux et écologistes&nbsp;?<br />L’écosyndicalisme se présente comme une des réponses à cette question&nbsp;: il s’agit pour le syndicalisme de prendre en charge l’écologie et, inversement, pour le mouvement écologiste de prendre en charge la défense des intérêts des travailleur·ses.</p> <p>Le champ de bataille serait donc notamment celui de l’entreprise parce que, comme le souligne Patrick Farbiaz, <em>«&nbsp;c’est dans les entreprises que nous affrontons les conséquences du productivisme : amiante, pollution chimique, air pollué, ondes électromagnétiques, énergie nucléaire… Ce sont d’abord les ouvrier·es qui meurent des cancers professionnels liés aux produits chimiques… C’est dans les entreprises de services que les nouvelles maladies liées au stress et à l’intensification du travail, au harcèlement psychique et à la course à la rentabilité se traduisent par la souffrance au travail qui va jusqu’aux suicides (...) Ce sont les salarié·es du commerce qui subissent les effets de temps partiels imposés, d’univers sonores abrutissants, celleux de l’agriculture qui sont les premières victimes des dangereux produits phytosanitaires ou des nitrates&nbsp;»</em> <span style="font-size: 8pt;">(5)</span>.</p> <p><strong><span style="font-size: 14pt; color: #ff615d;">Aborder les questions clivantes</span></strong></p> <p>En novembre 2021, Patrick Farbiaz a appelé à la création d'un réseau écosyndicaliste en France. Il émanait d’Emancipation <span style="font-size: 8pt;">(6)</span> (une tendance intersyndicale qui regroupe des personnels de l’Education nationale, des étudiant·es, des lycéen·nes) reliée au mouvement PEPS (un mouvement d’écologie populaire anticapitaliste, œuvrant justement à la convergence entre les luttes sociales et environnementales).<br />Au total, 130 membres syndicaux et syndicales, et quelques unités provenant de la CGT, FSU et Solidaires ont signé cet appel. <em>«&nbsp;Il y a maintenant une équipe d’animation et trois groupes d’actions : éducation, énergie et déchets&nbsp;»</em>, a précisé Patrick Farbiaz à Montreuil.</p> <p>L’objectif du réseau&nbsp;: informer les travailleur·ses&nbsp;; les soutenir dans leurs luttes&nbsp;; mutualiser leurs expériences&nbsp;; ouvrir le débat sur les questions d’écologie dans le travail&nbsp;: le nucléaire, la croissance, la reconversion écologique, la taxe carbone, les nouvelles formes de luttes issues de la désobéissance civile, le revenu garanti, le protectionnisme et les normes sociales et environnementales à imposer... <em>«&nbsp;Il faut oser le faire, même si ces questions sont clivantes&nbsp;»</em>, a assuré Patrick Farbiaz. Pourquoi le sont-elles&nbsp;? Parce que simplement pointer du doigt une industrie polluante peut mettre en cause la pérennité d’un site de production et ainsi, les emplois. A moins que les travailleur·ses s’emparent elleux-mêmes de ces questions et œuvrent ensemble à leur reconversion.</p> <p><strong><span style="font-size: 14pt; color: #ff615d;">Vers une reconversion des emplois</span></strong></p> <p>C’est ce qu’encouragent les écosyndicalistes à l’intérieur des entreprises dans lesquelles iels militent. Mais selon le principe de l’auto-organisation chère aux libertaires, les travailleur·ses doivent décider elleux-mêmes du chemin à prendre. Des actions sont déjà en cours dans des secteurs comme l’énergie (par exemple chez Total à Grandpuits), les déchets (Séché à Toulouse, ville de Marseille, Sépur dans l’Essonne), l’aéronautique (Airbus)…</p> <p>A Montreuil, Solène, salariée de l’UNIA en Suisse, a témoigné&nbsp;: <em>«&nbsp;Nous avons créé une plateforme qui regroupe militant·es du climat, féministes et syndicats. Nous avons rédigé un manifeste qui reprend des revendications transversales, notamment celle de la reconversion professionnelle, et des cahiers de revendications plus spécifiques aux branches.&nbsp;»</em> Elle a également participé à la mise en place d’un outil démocratique baptisé «&nbsp;L’initiative&nbsp;». <em>«&nbsp;L’objectif est de reconvertir 1.000 emplois industriels vers les métiers du soin notamment.&nbsp;»</em> Dans sa région, la production de montres de luxe domine. <em>«&nbsp;Il ne s’agit pas de désindustrialiser puisque l’outil est là, mais juste d’arrêter de produire des trucs qui ne servent à rien et de produire de l’essentiel&nbsp;!&nbsp;»</em></p> <p>&nbsp;</p> <p><a href="http://www.rebonds.net/images/UCL/power-station-374097_960_720.jpg" class="jcepopup" data-mediabox="1" data-mediabox-title="Les pollutions liées au productivisme inquiètent les ouvrier.es elleux-mêmes (photo : stevepb)."><img src="http://www.rebonds.net/images/UCL/power-station-374097_960_720.jpg" alt="power station 374097 960 720" width="500" height="333" style="display: block; margin-left: auto; margin-right: auto;" /></a></p> <p>&nbsp;</p> <p><span style="color: #ff615d;"><strong><span style="font-size: 14pt;">Protéger les lanceur·ses d’alerte</span></strong></span></p> <p>Autre but du réseau écosyndicaliste&nbsp;: protéger juridiquement les lanceur·ses d’alerte. L’actualité le prouve avec l’affaire de la centrale nucléaire de Tricastin <span style="font-size: 8pt;">(7)</span>, celleux qui s’expriment pour dénoncer les atteintes à l’environnement ont besoin de soutien. <em>«&nbsp;Les salarié·es savent des choses, iels se posent beaucoup de questions voire sont complètement dégoûté·es. Iels ont besoin de parler&nbsp;»</em>, a témoigné Yann, de la CGT Sud Loire, à Montreuil. Il avait eu l'occasion d'échanger avec des travailleur·ses de l’aéroport de Nantes. Là-bas, durant la lutte à Notre-Dame-des-Landes, des rapprochements avaient déjà eu lieu avec des zadistes. Des journées d’études prolongent actuellement ce type de liens.</p> <p><strong><span style="font-size: 14pt; color: #ff615d;">Un levier révolutionnaire</span></strong></p> <p>Le collectif «&nbsp;Plus Jamais Ça&nbsp;» est un autre exemple de rapprochement. Créé en janvier 2020, il réunit les Amis de la Terre, Attac France, Greenpeace France, Oxfam France et la CGT, la Confédération paysanne, la FSU, l’Union syndicale Solidaires.<br />Ensemble, iels proposent «&nbsp;un plan de rupture&nbsp;» où revendications sociales et écologiques sont entremêlées.<em> «&nbsp;Entre toutes ces organisations, les divergences existent, elles peuvent être importantes. Mais nous avons décidé de lister tout ce qui nous rassemble et de mettre de côté tout ce qui nous divise&nbsp;»</em>, a expliqué Jean-Yves Le Sage, membre de la CGT et du collectif «&nbsp;Plus Jamais Ça&nbsp;», lors des rencontres à Montreuil.<br />Il ne cache pas qu’au sein de la CGT, syndicat encore marqué par le productivisme, le débat pour rejoindre le collectif a été <em>«&nbsp;violent&nbsp;»</em>. <em>«&nbsp;Martinez l’a imposé en force. Ça a aussi été le cas chez Greenpeace… Vous imaginez&nbsp;? S’allier aux nucléocrates de la CGT&nbsp;!&nbsp;»</em></p> <p>Ces alliances tiendront-elles&nbsp;? Beaucoup en doutent, y compris parmi les militant·es elleux-mêmes. Mais leur existence a le mérite de provoquer des rencontres entre des entités qui s’ignoraient, de faire advenir publiquement les débats et ainsi, d’ouvrir les consciences. Elles participent d’un mouvement dans lequel les plus exploité·es détiennent enfin les conditions de leur existence, et répondent à l’urgence sociale et climatique que l’époque leur imposent. Un formidable levier révolutionnaire pour, enfin, transformer la société en profondeur.</p> <p><strong>Fanny Lancelin</strong></p> <p><span style="font-size: 8pt;">(1) Extrait du manifeste de l’Union Communiste Libertaire (UCL) écrit en 2019. Lire aussi la rubrique (Ré)acteur·ices.</span><br /><span style="font-size: 8pt;">(2) <a href="https://confpeps.org">https://confpeps.org</a></span><br /><span style="font-size: 8pt;">(3) «&nbsp;Au taf&nbsp;!&nbsp;», rencontres des syndicalistes autogestionnaires et libertaires à Montreuil organisée par l’Union Communiste Libertaire (UCL). Lire aussi la rubrique (Ré)acteur·ices.</span><br /><span style="font-size: 8pt;">(4) Justice environnementale&nbsp;: <a href="https://fr.wikipedia.org/wiki/Justice_environnementale">https://fr.wikipedia.org/wiki/Justice_environnementale</a></span><br /><span style="font-size: 8pt;">Ecologie de la libération&nbsp;: <a href="https://www.letempsdescerises.net/?product=lecologie-de-la-liberation">https://www.letempsdescerises.net/?product=lecologie-de-la-liberation</a></span><br /><span style="font-size: 8pt;">(5) <a href="https://www.infolibertaire.net/construire-leco-syndicalisme/">https://www.infolibertaire.net/construire-leco-syndicalisme/</a></span><br /><span style="font-size: 8pt;">(6) <a href="https://www.emancipation.fr">https://www.emancipation.fr</a></span><br /><span style="font-size: 8pt;">(7) <a href="https://www.francetvinfo.fr/societe/nucleaire/centrale-nucleaire-du-tricastin-l-ouverture-d-une-enquete-est-un-soulagement-selon-l-avocat-d-un-ancien-cadre-d-edf_5186893.html">https://www.francetvinfo.fr/societe/nucleaire/centrale-nucleaire-du-tricastin-l-ouverture-d-une-enquete-est-un-soulagement-selon-l-avocat-d-un-ancien-cadre-d-edf_5186893.html</a></span></p> <p>&nbsp;</p> <div class="panel panel-primary"> <div class="panel-heading"> <h3 class="panel-title">Plus</h3> </div> <ul> <li>L’appel du réseau écosyndicaliste est lisible ici&nbsp;: <a href="https://syndicollectif.fr/un-appel-pour-un-reseau-eco-syndicaliste/">https://syndicollectif.fr/un-appel-pour-un-reseau-eco-syndicaliste/</a></li> </ul> </div> Communisme libertaire : un projet de transformation radicale de la société 2017-03-21T12:54:42+01:00 2017-03-21T12:54:42+01:00 http://www.rebonds.net/59lavoieducommunismelibertaire/785-communismelibertaireunprojetdetransformationradicaledelasociete Super User <p style="text-align: right;"><strong><em>«&nbsp;Il n’y a aucune raison pour que l’Histoire ait atteint son stade ultime&nbsp;:<br />le capitalisme ne sera pas la dernière forme de la société humaine.&nbsp;»<br />Manifeste de l’UCL</em></strong></p> <p><span style="font-size: 18pt;">C'</span>est un mouvement politique qui ne cherche à gagner aucune élection. Mieux&nbsp;: en pleine campagne des présidentielles, il organisait une contre-campagne, anti-électoraliste, en expliquant pourquoi voter aujourd’hui, même pour un parti de gauche, ne changerait rien à la vie de la majorité des Français·es.</p> <p>Pour l’Union Communiste Libertaire (UCL), la transformation radicale de la société ne peut venir que de luttes menées par la base. D’un mouvement massif qui fait naître et vivre partout des contre-pouvoirs&nbsp;: des syndicats dans les entreprises et les lieux d’études, des coopératives et des bourses de travail, des comités pour dénoncer le mal-logement, des collectifs féministes, écologistes et anti-racistes, des fronts anti-fascistes...</p> <p>Le but&nbsp;: contrer le capitalisme. Vaste programme&nbsp;? Sans doute. Mais qui porte en son sein des formes d’émancipation enthousiasmantes.</p> <p>A l’heure où le «&nbsp;Peuple de Gauche&nbsp;» est enjoint à se rallier derrière une énième union de façade pour faire face au néo-libéralisme, quel autre projet de société est possible&nbsp;? Quels sont les contre-pouvoirs que l’UCL encourage et comment s’organisent-ils&nbsp;? Quelles sont leurs revendications et pour quels résultats&nbsp;?</p> <p>Ces questions ont été débattues lors des rencontres des syndicalistes autogestionnaires et&nbsp;libertaires organisées par l’UCL en mai à Montreuil et baptisées «&nbsp;Au taf&nbsp;!&nbsp;». Parmi les participant·es, Adrien, venu de Bourges.</p> <p><strong><span style="color: #fc615d;">_________________________________________________</span></strong></p> <h3>«&nbsp;Se rapprocher, faire ensemble&nbsp;»</h3> <p><span style="font-size: 12pt; color: #ff615d;"><span style="font-size: 10pt;">__</span><strong>______________________________________</strong></span><span style="font-family: georgia, palatino;"><span style="color: #fc615d;"><br /></span></span></p> <p>Né dans la Sarthe il y a 30 ans, d’un père tuyauteur et d’une mère bibliothécaire, Adrien n’a pas été biberonné à l’engagement politique et social. Les contestations de la société capitaliste, c’est dans des chansons punk qu’il les entend d’abord. Et puis un jour, dans une rue du Mans, alors qu’il porte un t-shirt avec le A symbolique de l’anarchie, quelqu’un l’aborde&nbsp;: <em>«&nbsp;C’était Bernard Touchais, un militant de la fédération anarchiste</em>, se souvient-il. <em>On a discuté et il m’a invité à des cafés libertaires. C’étaient des discussions plutôt philosophiques qui appelaient à une forme de société plus juste.&nbsp;»</em><br />A partir de 19 ans, il se concentre sur ses études. A l’université du Mans, il croise la CGA, la Coordination des Groupes Anarchistes, et manifeste lorsque l’occasion se présente. En 2018, il passe son CAPES en histoire-géographie et travaille comme assistant d’éducation. <em>«&nbsp;Je me suis pris l’exploitation en pleine face ! C’est à ce moment-là que j’ai commencé à militer vraiment.&nbsp;»</em> Il se syndique à la CNT (Confédération Nationale du Travail) du Mans. C’est dans ses rangs qu’il apprend l’existence de l’Alternative Libertaire, qui s’apprête alors à fusionner avec la CGA pour former l’Union Communiste Libertaire, l’UCL. <em>«&nbsp;Théoriquement, ces organisations étaient sur des bases très proches. Il était inutile de poursuivre séparément. C’est aussi ce qui m’a attiré à l’UCL&nbsp;: souvent, les organisations politiques naissent de scissions&nbsp;; là, il s’agissait de se rapprocher, de faire ensemble.&nbsp;»</em></p> <p>Il intègre ainsi l’UCL dès sa création en 2019, alors qu’il prend un poste d’enseignant en histoire-géographie à Bourges. Il constitue aujourd’hui une «&nbsp;liaison&nbsp;» rattachée au groupe d’Orléans.</p> <p><strong><span style="color: #fc615d;">________________________________________________________</span></strong></p> <h3>Un principe fondamental&nbsp;: l’autogestion</h3> <p><span style="font-size: 12pt; color: #ff615d;"><span style="font-size: 10pt;"></span><strong>______________________________________________</strong></span><span style="font-family: georgia, palatino;"><span style="color: #fc615d;"><br /></span></span></p> <p>Mais qu’est-ce que le communisme libertaire&nbsp;? Un mouvement politique qui puise ses racines dans les courants anarchistes <span style="font-size: 8pt;">(1)</span>. Ainsi, le mot «&nbsp;communisme&nbsp;» ne fait pas référence au marxisme-léninisme.</p> <p>Les libertaires sont opposé·es aux socialismes d’Etat dont le léninisme est un exemple. Iels leur reprochent notamment l’institution d’un parti unique dirigeant, l’étatisation de l’économie et des moyens de production, la perpétuation des rapports de hiérarchie… et un bilan <em>«&nbsp;terrible&nbsp;»</em>&nbsp;: <em>«&nbsp;des dictatures sanglantes ont entaché le mot même de «&nbsp;communisme&nbsp;» »</em>, écrivent-iels dans le manifeste de l’UCL <span style="font-size: 8pt;">(2)</span>. <em>«&nbsp;La forme centralisée et hiérarchisée du parti léniniste (…) conduit à la tyrannie à l’intérieur de l’organisation, à l’écrasement de la contestation à l’extérieur, à la coupure entre le parti et les travailleurs et travailleuses, entre le parti et la société.&nbsp;»</em><br />Iels dénoncent les nationalismes de gauche comme le nassérisme en Egypte, le péronisme en Argentine ou le chavisme au Vénézuela qui n’ont fait que <em>«&nbsp;façonner un capitalisme national, associé à un Etat fort dirigé par un leader charismatique, main dans la main avec le patronat patriote, et en mettant les mouvements sociaux sous tutelle&nbsp;»</em>.</p> <p>Alors, qu’entendent les libertaires par «&nbsp;communisme&nbsp;»&nbsp;? <em>«&nbsp;La mise en commun des moyens de production, sans appropriation privée ni privative, décentralisée c’est-à-dire sans classes et sans Etat, et la répartition des richesses créées en fonction des besoins de chacune et chacun.&nbsp;»</em><br />Dans ce projet de société, les moyens de production et d’échanges sont considérés comme «&nbsp;biens communs&nbsp;» et sont gérés sous la double responsabilité de fédérations professionnelles et d’échelons territoriaux (communes, régions…).<br />La production est guidée par <em>«&nbsp;la planification démocratique&nbsp;»</em>, qui recense les besoins de la population en termes de logement, d’alimentation, de déplacements, de santé, de formation…</p> <p><strong><span style="color: #fc615d;">______________________________________________</span></strong></p> <h3>Transformer la nature du travail</h3> <p><span style="font-size: 12pt; color: #ff615d;"><span style="font-size: 10pt;">_</span><strong>_____________________________________</strong></span></p> <p>Mais qui planifie&nbsp;? Les travailleurs et travailleuses elleux-mêmes, organisé·es selon le principe de l’autogestion. <em>«&nbsp;Dans l’autogestion, les responsables, délégué·es, coordinateurs et coordinatrices, sont élu·es et révocables par les assemblées de base. [Iels sont] tenu·es de mettre en œuvre les grands choix dans l’organisation du travail selon un mandat impératif.&nbsp;»</em> <span style="font-size: 8pt;">(2)</span> Le mandat impératif est un document rédigé collectivement (par exemple, par un groupe de travail, une commission) qui définit précisément les tâches, les missions à réaliser. Des délégué·es sont choisi·es pour les mener à bien. Iels peuvent être révoqué·es s’iels ne remplissent pas leur rôle.</p> <p>Tout cela passe par une transformation de la nature du travail. Plus question de séparer les fonctions manuelles et intellectuelles&nbsp;: chacun·e doit pouvoir participer à la conception, à la décision, à l’exécution, au processus de production…<em> «&nbsp;La nature même du travail est aujourd’hui interpellée, beaucoup plus que dans les années 1950 ou 1960,</em> a expliqué Jean-Marie Pernot, chercheur à l’IRES<span style="font-size: 8pt;"> (3)</span>, présent aux rencontres de Montreuil, «&nbsp;Au taf&nbsp;!&nbsp;». <em>Il existe un nouveau paradigme&nbsp;: la lutte pour la reconnaissance. Autrefois, on acceptait la subordination dans le travail contre des avantages sociaux mais le néo-libéralisme a rompu ce pacte. Dès lors, les travailleur·ses s’insurgent de l’organisation du travail mais aussi du contenu, de ce qu’on leur fait faire. C’est un point de conflictualité et de radicalité dont nous devons nous saisir.&nbsp;»</em></p> <p><strong><span style="color: #fc615d;">__________________________________________</span></strong></p> <h3>Pour une démocratie directe</h3> <p><span style="font-size: 12pt; color: #ff615d;"><span style="font-size: 10pt;"></span><strong><span style="font-size: 10pt;">_</span>_________________________________</strong></span></p> <p>Parce qu’il a pour objectif et pour condition l’émancipation des individus, ce communisme est dit libertaire. Il veut substituer à l’Etat parlementaire, et donc à une démocratie indirecte, une fédération autogestionnaire fondée sur une démocratie directe.<br />L’échelon essentiel sont les communes, fédérées dans des régions autonomes au niveau agricole et industriel notamment, pour permettre un maximum d’échanges en circuits courts.<br />Les assemblées populaires, qui réunissent une fraction de la population selon les thèmes à débattre, sont la cellule démocratique de référence. Ce sont elles qui mandatent et éventuellement révoquent les délégué·es qui forment les conseils des communes, des régions et de la fédération. Ce qui n’exclut pas de consulter régulièrement l’ensemble de la population sur les grandes orientations que doivent prendre ces communes, ces régions, cette fédération.<br /><em>«&nbsp;Le peuple souverain auto-institue la société, autogouverne sa politique, autogère sa production et plus globalement, détermine ses besoins collectifs et les façons d’y répondre&nbsp;»</em>, souligne le manifeste de l’UCL.</p> <p>Pour autant, pas question d’uniformiser les modes d’organisation ou de pensée&nbsp;: <em>«&nbsp;La démocratie directe implique la liberté d’expression et d’organisation, la liberté de culte, la liberté de la presse. Des courants de pensée organisés peuvent défendre leur point de vue et nourrir le débat (…).&nbsp;»</em></p> <p>Au sein des associations auxquelles il participe, comme l’association militante Ki-6-Col à Bourges, Adrien tente de faire vivre ces principes&nbsp;: <em>«&nbsp;Par exemple, par la refonte des statuts. J’aspire à faire entrer la culture du mandat et à le dépersonnaliser. L’important, c’est la mission, il faut donc que le mandat soit cadré collectivement, contrôlable et révocable.&nbsp;»</em></p> <p><em>&nbsp;</em></p> <p><a href="http://www.rebonds.net/images/UCL/au_taf.JPG" class="jcepopup" data-mediabox="1" data-mediabox-title="Les intervenant·es de la première table-ronde &quot;Au taf !&quot; : Adèle, Kaou, Jean-Marie Pernot, Louise et Jean-Yves Le Sage (photo : F. Lancelin)."><img src="http://www.rebonds.net/images/UCL/au_taf.JPG" alt="Eco délégués CE" width="500" height="375" style="display: block; margin-left: auto; margin-right: auto;" /></a></p> <p>&nbsp;</p> <p><strong><span style="color: #fc615d;">________________________________</span></strong></p> <h3>Contre le capitalisme</h3> <p><span style="font-size: 12pt; color: #ff615d;"><span style="font-size: 10pt;"></span><strong>__________________________</strong></span></p> <p>Pour transformer en profondeur la société, le communisme libertaire s’oppose radicalement au capitalisme et à ses fondements comme l’exploitation du travail humain au profit de minorités dirigeantes et privilégiées, l’exploitation des ressources naturelles menant à leur destruction, la domination étatique et patronale sur la société, un développement mondial inégal...</p> <p>La société reste divisée en classes sociales.<br />Ainsi, la classe capitaliste est constituée des propriétaires et des gestionnaires qui s’accaparent la plus-value de la production.<br />La classe prolétaire se compose de groupes sociaux privés de toute propriété ou moyens de production, donc contraints à vendre leur force de travail manuel et / ou intellectuel sans pouvoir réel sur les prises de décision.<br />Loin d’être uniforme, elle englobe aujourd’hui des travailleur·ses tel·les que les ouvrier·es, paysan·nes mais aussi cadres, ingénieur·es, technicien·nes, les indépendant·es, les sous-traitant·es, les micro-entrepreneur·ses, les privé·es d’emploi…<br />Cet éclatement du prolétariat en plusieurs sous-classes est une stratégie du capitalisme pour empêcher le regroupement des travailleur·ses en organisations efficaces. Conséquence&nbsp;: une grande difficulté à transmettre et à faire vivre la conscience de classes.</p> <p><strong><span style="color: #fc615d;">___________________________</span></strong></p> <h3>Abolir le patriarcat</h3> <p><span style="font-size: 12pt; color: #ff615d;"><span style="font-size: 10pt;"></span><strong>______________________</strong></span></p> <p>Parmi les travailleur·ses les plus exploité·es par le capitalisme&nbsp;: les femmes et les LGBT. L’un des thèmes essentiels du combat libertaire est ainsi la lutte antipatriarcal.<br />Le patriarcat est un système politique et économique basé sur la division sexuée du travail.<br />D’un côté, le patriarcat tire parti du travail gratuit en majorité encore effectué par des femmes dans la reproduction de la force de travail&nbsp;: enfanter, éduquer les enfants, accomplir le travail domestique et les soins... De l’autre, il surexploite les femmes dans des métiers largement déconsidérés et sous-payés. Ainsi, les femmes sont souvent astreintes aux temps partiels imposés, au chômage, à la précarité.<br />Le patriarcat s’appuie sur une construction sociale, le genre, et véhicule un ensemble de préjugés qui leur attribuent des qualités ou des défauts «&nbsp;innés&nbsp;». Il justifie ainsi une domination à la fois idéologique, culturelle, sociale, économique et politique.</p> <p>Aux rencontres de Montreuil, une partie des débats se sont concentrés sur les enjeux de la syndicalisation des secteurs féminisés (<em>lire aussi la rubrique (Re)découvrir</em>).<br />Les objectifs des communistes libertaires sont d’abolir le patriarcat en tant que système de domination, de faire advenir une réelle égalité civile entre hommes et femmes, ainsi que la liberté des femmes de disposer de leur corps et de leur capacité reproductrice dans l’espace intime comme dans l’espace public.</p> <p><strong><span style="color: #fc615d;">_______________________________________</span></strong></p> <h3>« Instruire pour émanciper »</h3> <p><span style="font-size: 12pt; color: #ff615d;"><span style="font-size: 10pt;"></span><strong>________________________________</strong></span></p> <p>Comment&nbsp;? Par l’éducation et la formation qui permettent à tous·tes de conscientiser les discriminations sociales, sexistes, racistes, validistes. Mais pas seulement. <em>«&nbsp;La Révolution repose sur une dimension éducative</em>, souligne Adrien. <em>En effet, sans éducation comment auto-organiser la société&nbsp;? Les libertaires réfléchissent depuis longtemps aux questions de l'éducation et de l'école. Au XIXe et XXe siècles, iels sont partie prenante des réflexions sur les pédagogies nouvelles ou actives avec des pédagogues comme Francisco Ferrer, Freinet ou Paulo Freire...&nbsp;»</em><br />Enseignant en lycée, Adrien s’interroge&nbsp;: <em>«&nbsp;En tant que libertaire et enseignant libertaire, comment instruire pour émanciper, comment produire de l'autonomie plutôt que de la soumission ? Comme le rappelle notre manifeste, le système éducatif prend une part considérable dans l'aliénation de l'individu en reproduisant l'ordre social établi et en le lui faisant accepter dès son plus jeune âge. C'est d'autant plus vrai ces dernières années avec les différentes réformes Blanquer et ses paniques morales réactionnaires. Des collègues mettant en place des pratiques plus émancipatrices subissent une répression comme à l'école Pasteur de Saint-Denis ou Sud Educ 93, dont la dissolution était demandée par des élus Les Républicains <span style="font-size: 8pt;">(4)</span>.&nbsp;»</em></p> <p>Est-ce contradictoire d’enseigner au sein de l’Education nationale, un ministère d’Etat, et d’être libertaire&nbsp;? Pas si on considère que les contre-feux doivent être allumés dans tous les secteurs de la société. <em>«&nbsp;Il y a une tension entre l'éducation telle qu’elle est actuellement et contre laquelle nous luttons (notamment avec nos syndicats), et celle à laquelle nous aspirons,</em> reconnaît Adrien. <em>L'UCL défend des pratiques pédagogiques fondées sur le rationalisme, la coopération, la créativité, le respect de la spécificité de chacune et de chacun pour forger des individus libres et responsables, en capacité de comprendre et d'agir sur le monde qui les entoure. Les libertaires prônent une éducation qui vise à développer, sans les hiérarchiser, les capacités physiques, intellectuelles et artistiques et donc une éducation polytechnique.&nbsp;»</em></p> <p><strong><span style="color: #fc615d;">_____________________________________________</span></strong></p> <h3>Pas de salut dans les élections</h3> <p><span style="font-size: 12pt; color: #ff615d;"><span style="font-size: 10pt;"></span><strong>_____________________________________</strong></span></p> <p><em></em>Pas de capitalisme sans collaboration de l’Etat. Si le principe étatique existe depuis plusieurs milliers d’années, l’Etat moderne tel que nous le connaissons dans nos sociétés occidentales est récent&nbsp;: il concentre force militaire, policière, judiciaire et fiscale. Il entretient le mythe d’une unité nationale par-delà les classes sociales pour, au final, imposer une uniformisation culturelle.</p> <p>Le gouvernement est un instrument des intérêts du capital, notamment en défendant les grandes entreprises privées et en tissant des liens de plus en plus étroits avec la sphère marchande. L’avènement de la social-démocratie n’y a rien changé, bien au contraire&nbsp;! Lorsque la gauche est au pouvoir, on constate un affaiblissement des mouvements sociaux sous couvert de «&nbsp;paix sociale&nbsp;», et une certaine soumission des organisations syndicales au calendrier électoral ou à celui du gouvernement.<br />Si l’accession au pouvoir de la social-démocratie a amené certaines avancées au XXe siècle, c’est parce qu’il y a eu durant ces périodes de véritables luttes menées à la base. C’est pourquoi, l’UCL encourage les contre-pouvoirs qui marquent une véritable rupture avec l’Etat.</p> <p>Pour les libertaires, il n’y a donc pas de salut dans les élections. L’UCL milite pour un boycott des institutions de l’Etat et des élections représentatives, puisqu’elle souhaite une démocratie directe et le fédéralisme. <br />Que pense Adrien de l’Union populaire&nbsp;? <em>«&nbsp;Ça ne change pas grand-chose pour nous. Même si avoir une gauche réformiste au pouvoir, ce n’est pas pareil que l’extrême droite, ça ne changera rien pour notre classe sociale. Quand il y a des avancées sous un gouvernement de gauche, c’est grâce à la pression de la rue.&nbsp;»</em></p> <p><strong><span style="color: #fc615d;">_____________________________________________</span></strong></p> <h3>Expérimenter dès aujourd’hui</h3> <p><span style="font-size: 12pt; color: #ff615d;"><span style="font-size: 10pt;"></span><strong>_____________________________________</strong></span></p> <p><em></em>Dès lors, sur quel terrain se battre&nbsp;? Dans les entreprises, sur les lieux d’études, dans les instances qui régissent le cadre de vie, dans le mouvement pour l’écologie, le droit des femmes, contre le racisme… Pour les communistes libertaires, seules les luttes directes conduites à la base peuvent imposer de véritables transformations. La révolution ne peut être que massive. Mais pas question d’attendre «&nbsp;le grand soir&nbsp;»&nbsp;! Il s’agit d’expérimenter dès aujourd’hui un projet de société alternatif par des actions et des engagements, dans les espaces de vie et de luttes. Participer aux initiatives qui permettent de se réapproprier la production, la distribution, l’éducation… en y apportant des combats anticapitalistes, et des pratiques autogérées et émancipatrices.</p> <p>Ainsi, localement, Adrien essaie de prendre part à ce qui fait sens pour lui&nbsp;: <em>«&nbsp;En étant seul ici à Bourges, c’est compliqué pour moi d’initier des actions. Le but est donc plutôt de soutenir des luttes locales et d’encourager des inter-orgas.&nbsp;»</em> Par exemple, l’UCL fait partie du front antifasciste de Bourges et du collectif Bassines Non Merci Berry <span style="font-size: 8pt;">(5)</span> qui compte aussi Urgence Uni·es pour le climat, ATTAC, la Confédération paysanne, la Coopération Intégrale du Haut Berry...</p> <p><a href="http://www.rebonds.net/images/UCL/affiche-au-taf-image-b47bd.jpg"><img src="http://www.rebonds.net/images/UCL/affiche-au-taf-image-b47bd.jpg" alt="affiche au taf image b47bd" width="359" height="508" style="display: block; margin-left: auto; margin-right: auto;" /></a></p> <p><strong><span style="color: #fc615d;">________________________________________________________________</span></strong></p> <h3>L’importance du syndicalisme révolutionnaire</h3> <p><span style="font-size: 12pt; color: #ff615d;"><span style="font-size: 10pt;"></span><strong>____________________________________________________</strong></span></p> <p><em></em>Parmi les contre-pouvoirs que l’UCL encourage&nbsp;: le syndicalisme révolutionnaire.<br />Selon les réalités des terrains où se trouvent ses membres, iels peuvent adhérer à des syndicats différents, par exemple la CGT, Solidaires, la CNT… Adrien adhère aujourd’hui à Sud-Education. <em>«&nbsp;Lorsque j’y suis entré, j’ai suivi des journées de formation. Il y en a sur l’inter-professionnelle ou sur la manière de militer syndicalement contre l’extrême droite, par exemple. Ça m’a fait beaucoup évoluer sur des choses que je ne connaissais pas forcément. Ça me permet d’être plus fort dans mon engagement politique.&nbsp;»</em></p> <p>«&nbsp;Au taf&nbsp;!&nbsp;», les participant·es ont évoqué l’efficacité des actions syndicales traditionnelles. <em>«&nbsp;Les manifestations, aujourd’hui, le pouvoir politique s’en fout,</em> a assuré le chercheur Jean-Marie Pernot. <em>Chaque matin, ce sont les cours de la bourse que les politiques regardent, pas le nombre de manifestant·es dans la rue. Le problème des grands rassemblements, c’est que ça ne bloque pas le patronat. Ça peut permettre une forme d’unité, mais ça n’est plus assez efficace.&nbsp;»</em><br />Dès lors, des actions telles que la grève générale, le boycott, le sabotage ouvrier, le blocage peuvent être envisagées, ainsi que de nouvelles formes qui restent à inventer, à condition qu’elles viennent des travailleur·ses elleux-mêmes.<br />Jean-Marie Pernot a identifié les revendications qui peuvent nourrir le répertoire syndical actuel&nbsp;: la question des salaires, notamment les plus bas&nbsp;; le temps de travail au long de la vie&nbsp;; les conditions de travail&nbsp;; les dégâts de l’économie sur la vie des travailleur·ses et sur l’environnement&nbsp;; la défense des secteurs hyper féminisés <em>(lire aussi la rubrique (Re)découvrir</em>)…</p> <p><strong><span style="color: #fc615d;">________________________________________________________</span></strong></p> <h3>La perspective de l'interprofessionnelle</h3> <p><span style="font-size: 12pt; color: #ff615d;"><span style="font-size: 10pt;"></span><strong>_______________________________________________</strong></span></p> <p><em></em>Créer des structures locales inter-professionnelles est une piste. Membre de la commission travail de l’UCL et syndiqué à Rennes, Kaou a rappelé aux rencontres de Montreuil comment le capitalisme divise les communautés de travail et par conséquent, les forces syndicales&nbsp;: <em>«&nbsp;éclatement des collectifs de travail, éclatement des lieux de travail (favorisé notamment par le développement des outils numériques), éclatement des statuts d'emploi...&nbsp;Certes, ça a toujours existé. Mais le syndicalisme que nous connaissons, celui dans lequel nous militons, est encore en grande partie celui des Trente glorieuses… Depuis 40 ans, cette réalité n'est plus et notre syndicalisme est comme en «&nbsp;PLS&nbsp;». Et lors de ses moments de lucidité, il tente de courir derrière les évolutions imposées par le capital qui a réussi à modifier le rapport de forces entre les classes en sa faveur.&nbsp;»</em></p> <p>Récemment, des victoires ont été remportées par des travailleur·ses qui ont su se ré-organiser. Kaou a ainsi cité le collectif parisien CGT du nettoyage, qui regroupe des syndicats des entreprises et administrations donneuses d’ordre, ainsi que des syndiqué·es de sociétés de nettoyage qui adhèrent individuellement à des unions locales. Alors qu’iels ne travaillent pas pour les mêmes employeur·ses et qu’iels n’ont pas forcément les mêmes statuts, iels parviennent à créer un cadre de discussions et d’actions commun. <em>«&nbsp;Cela donne lieu à de l'entraide lors des grèves, à des pressions sur les entreprises donneuses d'ordre, qui ont la main sur les contrats de sous-traitance&nbsp;»</em>, a souligné Kaou.<br />Autre exemple&nbsp;: <em>«&nbsp;la fédération Sud Rail s'est construite dès sa création avec l'objectif de syndiquer tous·tes les travailleur·ses qui permettent le fonctionnement du transport ferroviaire. Ce syndicalisme de branche rassemble bien sûr des conducteur·ices de train, contrôleur·ses, agent·es des gares mais aussi les salarié·es des entreprises sous-traitantes qui réalisent le nettoyage, la maintenance, les services en gare comme le gardiennage, l'assistance aux handicapé·es...&nbsp;»</em></p> <p>Mais des blocages perdurent&nbsp;: <em>«&nbsp;Récemment les salarié·es d'une nouvelle entreprise coopérative du secteur de l'énergie, Enercoop, basée à Paris, ont décidé de s'organiser,</em> a raconté Kaou. <em>Le syndicat CGT Energie Paris ne les a pas accueilli·es au motif qu'il ne syndique pas les travailleur·ses des entreprises concurrentes de l'ancien opérateur public de l'Energie (EDF/GDF). C'est l'union locale CGT qui les a soutenu·es pour créer leur équipe syndicale. Même si des liens se créeront et que des échanges auront lieu, il est dommageable que ces travailleur·ses, qui appartiennent au même secteur et font des métiers très similaires, ne puissent pas être réuni·es au sein d'une même structure syndicale pérenne.&nbsp;»</em></p> <p>Pour faire advenir une interprofessionnelle, il ne s’agit donc pas simplement de défendre une profession, mais de réveiller une conscience de classes. <em>«&nbsp;Il faut aussi faire sortir le syndicalisme de la simple question du travail, a affirmé Guillaume, membre du syndicat général du Livre. Autrefois, le syndicalisme de classes était dans les clubs de ciné, de sport, de lecture…&nbsp;»</em><br />D’où l’importance pour les communistes libertaires d’intégrer différents contre-pouvoirs pour contribuer à la formation, diffuser leur projet et mettre de l’huile dans le moteur des luttes.</p> <p><strong><span style="color: #fc615d;">______________________________________________________</span></strong></p> <h3>Une lutte écologiste antiproductiviste</h3> <p><span style="font-size: 12pt; color: #ff615d;"><span style="font-size: 10pt;"></span><strong>____________________________________________</strong></span></p> <p>Parmi les courants syndicalistes qui se développent&nbsp;: l’éco-syndicalisme. Ou comment faire converger deux luttes. <em>«&nbsp;La lutte écologiste est vitale&nbsp;; elle n’est cohérente qu’en étant anticapitaliste et antiproductiviste&nbsp;»</em>, affirme le manifeste de l’UCL.</p> <p>Parce que le capitalisme vert&nbsp;prône des solutions techniques qui ouvrent simplement de nouveaux marchés plutôt que de remettre en cause l’accumulation indéfinie du capital, les communistes libertaires n’attendent rien des réponses institutionnelles à la crise environnementale. Iels entendent combattre à la base, au sein d’associations ou du mouvement syndical. C’est le cas du collectif «&nbsp;Plus jamais ça&nbsp;» dont font partie la CGT et Solidaires ou le réseau écosyndicaliste. Au coeur de ces luttes&nbsp;: la question de la reconversion des emplois dans les secteurs les plus polluants, l’écologie sociale ou encore la révolution par le mouvement climatique… (<em>lire aussi la rubrique (Re)visiter</em>).</p> <p><strong><span style="color: #fc615d;">____________________________________________________________________</span></strong></p> <h3>Quel espace pour prolonger les mobilisations ?</h3> <p><span style="font-size: 12pt; color: #ff615d;"><span style="font-size: 10pt;"></span><strong>_______________________________________________________</strong></span></p> <p>Ces questions intéressent particulièrement les jeunes générations. <em>«&nbsp;A la CGT, j’entends que les jeunes sont sous-politisé·es et qu’iels ne se mobilisent pas, mais il y a bien des contre-exemples&nbsp;! Les marches pour le climat, les luttes féministes, le mouvement contre les violences policières…</em> a rappelé Adèle, membre de l'UCL, à Montreuil. <em>La question, c’est plutôt&nbsp;: qu’est-ce qu’on leur propose comme espace d’organisation de masse&nbsp;pour prolonger leurs mobilisations&nbsp;?&nbsp;»</em></p> <p>A l'UCL, la question du recrutement se pose en permanence. Actuellement, le mouvement compte environ 600 adhérent·es actif·ves réparti·es dans des groupes locaux à travers toute la France. Un congrès est organisé tous les deux ans avec bilan et perspectives. Tous les trois mois, une coordination fédérale gère les questions de court terme. Et tous les quinze jours, c’est l’instance permanente, le secrétariat fédéral et les délégué·es des commissions thématiques, qui se réunissent. Chaque membre de l’UCL peut ainsi s’investir aux différents échelons de l’organisation.</p> <p>Certains groupes locaux, comme à Montreuil, ont des processus d’intégration. <em>«&nbsp;Nous ne voulons pas être une organisation «&nbsp;passoire&nbsp;» avec des gens qui entrent et sortent en permanence,</em> explique Guillaume Davranche, de l’UCL de Montreuil. <em>La base minimum, c’est que tu aies lu le manifeste et que tu t’y reconnaisses. On organise généralement une rencontre informelle puis on invite à participer à une action et enfin, aux réunions. Si tout se passe bien, la personne adhère. Elle règle une cotisation mensuelle selon ses revenus ; notre organisation s’auto-finance.&nbsp;»</em><br />Les membres de l’UCL sont invité·es à se retrouver chaque été aux Journées d’été rouge et noir en Aveyron pour des formations, débats et moments de convivialité.</p> <p><strong><span style="color: #fc615d;">__________________________________________________________</span></strong></p> <h3>Les dominations ne sont pas une fatalité</h3> <p><span style="font-size: 12pt; color: #ff615d;"><span style="font-size: 10pt;"></span><strong>_______________________________________________</strong></span></p> <p>Le projet de société auquel aspirent les communistes libertaires est-il possible&nbsp;? Il vit déjà dans bien des collectifs, qui ne se réfèrent pas forcément à l’UCL. <em>«&nbsp;L’histoire contemporaine est marquée par la volonté des peuples à chercher des voies vers l’égalité sociale et politique&nbsp;»</em>, rappelle le manifeste du mouvement. Les communistes libertaires s’inspirent d’exemples tels que la Commune de Paris, les révolutions au Mexique, en Russie et en Ukraine, en Corée, en Espagne, et aujourd’hui au Chiapas chez les Zapatistes et au Rojava avec la lutte des Kurdes… Des exemples qui donnent de l’espoir et nourrissent tous·tes celleux qui cherchent à abolir les dominations. Et comme le souligne le manifeste de l’UCL&nbsp;: <em>«&nbsp;Il n’y a aucune raison pour que l’Histoire ait atteint son stade ultime&nbsp;: le capitalisme ne sera pas la dernière forme de la société humaine. Les systèmes de domination (…) ne sont pas une fatalité.&nbsp;»</em></p> <p><strong>Fanny Lancelin</strong></p> <p><span style="font-size: 8pt;">(1) Lire l’article de Guillaume Davranche paru dans L’Alternative Libertaire du 22 novembre 2020&nbsp;: «&nbsp;1880&nbsp;: le «&nbsp;parti&nbsp;» communiste anarchiste affirme son existence&nbsp;»&nbsp;: <a href="https://www.unioncommunistelibertaire.org/?1880-le-parti-communiste-anarchiste-affirme-son-existence">https://www.unioncommunistelibertaire.org/?1880-le-parti-communiste-anarchiste-affirme-son-existence</a></span><br /><span style="font-size: 8pt;">(2) Le manifeste est disponible sur le site Internet de l’UCL&nbsp;: <a href="https://unioncommunistelibertaire.org/?-Manifeste-union-communiste-libertaire-">https://unioncommunistelibertaire.org/?-Manifeste-union-communiste-libertaire-</a></span><br /><span style="font-size: 8pt;">(3) IRES&nbsp;: Institut de Recherches Economiques et Sociales. <a href="http://www.ires.fr/">http://www.ires.fr/</a></span><br /><span style="font-size: 8pt;">(4) <a href="https://www.revolutionpermanente.fr/Victoire-face-aux-parlementaires-Les-Republicains-Sud-Education-93-pas-dissout">https://www.revolutionpermanente.fr/Victoire-face-aux-parlementaires-Les-Republicains-Sud-Education-93-pas-dissout</a></span><br /><span style="font-size: 8pt;">(5) Bassines Non Merci Berry&nbsp;: collectif qui milite contre les retenues d’eau pour l’irrigation agricole, reliées directement aux nappes phréatiques.</span></p> <p>&nbsp;</p> <div class="panel panel-primary"> <div class="panel-heading"> <h3 class="panel-title">Plus</h3> </div> <ul> <li><span style="color: #000000;">Pour en savoir plus sur l’histoire du courant communiste libertaire&nbsp;: <a href="https://unioncommunistelibertaire.org/?Histoire-du-courant-communiste-libertaire" style="color: #000000;">https://unioncommunistelibertaire.org/?Histoire-du-courant-communiste-libertaire</a></span></li> </ul> </div> <p style="text-align: right;"><strong><em>«&nbsp;Il n’y a aucune raison pour que l’Histoire ait atteint son stade ultime&nbsp;:<br />le capitalisme ne sera pas la dernière forme de la société humaine.&nbsp;»<br />Manifeste de l’UCL</em></strong></p> <p><span style="font-size: 18pt;">C'</span>est un mouvement politique qui ne cherche à gagner aucune élection. Mieux&nbsp;: en pleine campagne des présidentielles, il organisait une contre-campagne, anti-électoraliste, en expliquant pourquoi voter aujourd’hui, même pour un parti de gauche, ne changerait rien à la vie de la majorité des Français·es.</p> <p>Pour l’Union Communiste Libertaire (UCL), la transformation radicale de la société ne peut venir que de luttes menées par la base. D’un mouvement massif qui fait naître et vivre partout des contre-pouvoirs&nbsp;: des syndicats dans les entreprises et les lieux d’études, des coopératives et des bourses de travail, des comités pour dénoncer le mal-logement, des collectifs féministes, écologistes et anti-racistes, des fronts anti-fascistes...</p> <p>Le but&nbsp;: contrer le capitalisme. Vaste programme&nbsp;? Sans doute. Mais qui porte en son sein des formes d’émancipation enthousiasmantes.</p> <p>A l’heure où le «&nbsp;Peuple de Gauche&nbsp;» est enjoint à se rallier derrière une énième union de façade pour faire face au néo-libéralisme, quel autre projet de société est possible&nbsp;? Quels sont les contre-pouvoirs que l’UCL encourage et comment s’organisent-ils&nbsp;? Quelles sont leurs revendications et pour quels résultats&nbsp;?</p> <p>Ces questions ont été débattues lors des rencontres des syndicalistes autogestionnaires et&nbsp;libertaires organisées par l’UCL en mai à Montreuil et baptisées «&nbsp;Au taf&nbsp;!&nbsp;». Parmi les participant·es, Adrien, venu de Bourges.</p> <p><strong><span style="color: #fc615d;">_________________________________________________</span></strong></p> <h3>«&nbsp;Se rapprocher, faire ensemble&nbsp;»</h3> <p><span style="font-size: 12pt; color: #ff615d;"><span style="font-size: 10pt;">__</span><strong>______________________________________</strong></span><span style="font-family: georgia, palatino;"><span style="color: #fc615d;"><br /></span></span></p> <p>Né dans la Sarthe il y a 30 ans, d’un père tuyauteur et d’une mère bibliothécaire, Adrien n’a pas été biberonné à l’engagement politique et social. Les contestations de la société capitaliste, c’est dans des chansons punk qu’il les entend d’abord. Et puis un jour, dans une rue du Mans, alors qu’il porte un t-shirt avec le A symbolique de l’anarchie, quelqu’un l’aborde&nbsp;: <em>«&nbsp;C’était Bernard Touchais, un militant de la fédération anarchiste</em>, se souvient-il. <em>On a discuté et il m’a invité à des cafés libertaires. C’étaient des discussions plutôt philosophiques qui appelaient à une forme de société plus juste.&nbsp;»</em><br />A partir de 19 ans, il se concentre sur ses études. A l’université du Mans, il croise la CGA, la Coordination des Groupes Anarchistes, et manifeste lorsque l’occasion se présente. En 2018, il passe son CAPES en histoire-géographie et travaille comme assistant d’éducation. <em>«&nbsp;Je me suis pris l’exploitation en pleine face ! C’est à ce moment-là que j’ai commencé à militer vraiment.&nbsp;»</em> Il se syndique à la CNT (Confédération Nationale du Travail) du Mans. C’est dans ses rangs qu’il apprend l’existence de l’Alternative Libertaire, qui s’apprête alors à fusionner avec la CGA pour former l’Union Communiste Libertaire, l’UCL. <em>«&nbsp;Théoriquement, ces organisations étaient sur des bases très proches. Il était inutile de poursuivre séparément. C’est aussi ce qui m’a attiré à l’UCL&nbsp;: souvent, les organisations politiques naissent de scissions&nbsp;; là, il s’agissait de se rapprocher, de faire ensemble.&nbsp;»</em></p> <p>Il intègre ainsi l’UCL dès sa création en 2019, alors qu’il prend un poste d’enseignant en histoire-géographie à Bourges. Il constitue aujourd’hui une «&nbsp;liaison&nbsp;» rattachée au groupe d’Orléans.</p> <p><strong><span style="color: #fc615d;">________________________________________________________</span></strong></p> <h3>Un principe fondamental&nbsp;: l’autogestion</h3> <p><span style="font-size: 12pt; color: #ff615d;"><span style="font-size: 10pt;"></span><strong>______________________________________________</strong></span><span style="font-family: georgia, palatino;"><span style="color: #fc615d;"><br /></span></span></p> <p>Mais qu’est-ce que le communisme libertaire&nbsp;? Un mouvement politique qui puise ses racines dans les courants anarchistes <span style="font-size: 8pt;">(1)</span>. Ainsi, le mot «&nbsp;communisme&nbsp;» ne fait pas référence au marxisme-léninisme.</p> <p>Les libertaires sont opposé·es aux socialismes d’Etat dont le léninisme est un exemple. Iels leur reprochent notamment l’institution d’un parti unique dirigeant, l’étatisation de l’économie et des moyens de production, la perpétuation des rapports de hiérarchie… et un bilan <em>«&nbsp;terrible&nbsp;»</em>&nbsp;: <em>«&nbsp;des dictatures sanglantes ont entaché le mot même de «&nbsp;communisme&nbsp;» »</em>, écrivent-iels dans le manifeste de l’UCL <span style="font-size: 8pt;">(2)</span>. <em>«&nbsp;La forme centralisée et hiérarchisée du parti léniniste (…) conduit à la tyrannie à l’intérieur de l’organisation, à l’écrasement de la contestation à l’extérieur, à la coupure entre le parti et les travailleurs et travailleuses, entre le parti et la société.&nbsp;»</em><br />Iels dénoncent les nationalismes de gauche comme le nassérisme en Egypte, le péronisme en Argentine ou le chavisme au Vénézuela qui n’ont fait que <em>«&nbsp;façonner un capitalisme national, associé à un Etat fort dirigé par un leader charismatique, main dans la main avec le patronat patriote, et en mettant les mouvements sociaux sous tutelle&nbsp;»</em>.</p> <p>Alors, qu’entendent les libertaires par «&nbsp;communisme&nbsp;»&nbsp;? <em>«&nbsp;La mise en commun des moyens de production, sans appropriation privée ni privative, décentralisée c’est-à-dire sans classes et sans Etat, et la répartition des richesses créées en fonction des besoins de chacune et chacun.&nbsp;»</em><br />Dans ce projet de société, les moyens de production et d’échanges sont considérés comme «&nbsp;biens communs&nbsp;» et sont gérés sous la double responsabilité de fédérations professionnelles et d’échelons territoriaux (communes, régions…).<br />La production est guidée par <em>«&nbsp;la planification démocratique&nbsp;»</em>, qui recense les besoins de la population en termes de logement, d’alimentation, de déplacements, de santé, de formation…</p> <p><strong><span style="color: #fc615d;">______________________________________________</span></strong></p> <h3>Transformer la nature du travail</h3> <p><span style="font-size: 12pt; color: #ff615d;"><span style="font-size: 10pt;">_</span><strong>_____________________________________</strong></span></p> <p>Mais qui planifie&nbsp;? Les travailleurs et travailleuses elleux-mêmes, organisé·es selon le principe de l’autogestion. <em>«&nbsp;Dans l’autogestion, les responsables, délégué·es, coordinateurs et coordinatrices, sont élu·es et révocables par les assemblées de base. [Iels sont] tenu·es de mettre en œuvre les grands choix dans l’organisation du travail selon un mandat impératif.&nbsp;»</em> <span style="font-size: 8pt;">(2)</span> Le mandat impératif est un document rédigé collectivement (par exemple, par un groupe de travail, une commission) qui définit précisément les tâches, les missions à réaliser. Des délégué·es sont choisi·es pour les mener à bien. Iels peuvent être révoqué·es s’iels ne remplissent pas leur rôle.</p> <p>Tout cela passe par une transformation de la nature du travail. Plus question de séparer les fonctions manuelles et intellectuelles&nbsp;: chacun·e doit pouvoir participer à la conception, à la décision, à l’exécution, au processus de production…<em> «&nbsp;La nature même du travail est aujourd’hui interpellée, beaucoup plus que dans les années 1950 ou 1960,</em> a expliqué Jean-Marie Pernot, chercheur à l’IRES<span style="font-size: 8pt;"> (3)</span>, présent aux rencontres de Montreuil, «&nbsp;Au taf&nbsp;!&nbsp;». <em>Il existe un nouveau paradigme&nbsp;: la lutte pour la reconnaissance. Autrefois, on acceptait la subordination dans le travail contre des avantages sociaux mais le néo-libéralisme a rompu ce pacte. Dès lors, les travailleur·ses s’insurgent de l’organisation du travail mais aussi du contenu, de ce qu’on leur fait faire. C’est un point de conflictualité et de radicalité dont nous devons nous saisir.&nbsp;»</em></p> <p><strong><span style="color: #fc615d;">__________________________________________</span></strong></p> <h3>Pour une démocratie directe</h3> <p><span style="font-size: 12pt; color: #ff615d;"><span style="font-size: 10pt;"></span><strong><span style="font-size: 10pt;">_</span>_________________________________</strong></span></p> <p>Parce qu’il a pour objectif et pour condition l’émancipation des individus, ce communisme est dit libertaire. Il veut substituer à l’Etat parlementaire, et donc à une démocratie indirecte, une fédération autogestionnaire fondée sur une démocratie directe.<br />L’échelon essentiel sont les communes, fédérées dans des régions autonomes au niveau agricole et industriel notamment, pour permettre un maximum d’échanges en circuits courts.<br />Les assemblées populaires, qui réunissent une fraction de la population selon les thèmes à débattre, sont la cellule démocratique de référence. Ce sont elles qui mandatent et éventuellement révoquent les délégué·es qui forment les conseils des communes, des régions et de la fédération. Ce qui n’exclut pas de consulter régulièrement l’ensemble de la population sur les grandes orientations que doivent prendre ces communes, ces régions, cette fédération.<br /><em>«&nbsp;Le peuple souverain auto-institue la société, autogouverne sa politique, autogère sa production et plus globalement, détermine ses besoins collectifs et les façons d’y répondre&nbsp;»</em>, souligne le manifeste de l’UCL.</p> <p>Pour autant, pas question d’uniformiser les modes d’organisation ou de pensée&nbsp;: <em>«&nbsp;La démocratie directe implique la liberté d’expression et d’organisation, la liberté de culte, la liberté de la presse. Des courants de pensée organisés peuvent défendre leur point de vue et nourrir le débat (…).&nbsp;»</em></p> <p>Au sein des associations auxquelles il participe, comme l’association militante Ki-6-Col à Bourges, Adrien tente de faire vivre ces principes&nbsp;: <em>«&nbsp;Par exemple, par la refonte des statuts. J’aspire à faire entrer la culture du mandat et à le dépersonnaliser. L’important, c’est la mission, il faut donc que le mandat soit cadré collectivement, contrôlable et révocable.&nbsp;»</em></p> <p><em>&nbsp;</em></p> <p><a href="http://www.rebonds.net/images/UCL/au_taf.JPG" class="jcepopup" data-mediabox="1" data-mediabox-title="Les intervenant·es de la première table-ronde &quot;Au taf !&quot; : Adèle, Kaou, Jean-Marie Pernot, Louise et Jean-Yves Le Sage (photo : F. Lancelin)."><img src="http://www.rebonds.net/images/UCL/au_taf.JPG" alt="Eco délégués CE" width="500" height="375" style="display: block; margin-left: auto; margin-right: auto;" /></a></p> <p>&nbsp;</p> <p><strong><span style="color: #fc615d;">________________________________</span></strong></p> <h3>Contre le capitalisme</h3> <p><span style="font-size: 12pt; color: #ff615d;"><span style="font-size: 10pt;"></span><strong>__________________________</strong></span></p> <p>Pour transformer en profondeur la société, le communisme libertaire s’oppose radicalement au capitalisme et à ses fondements comme l’exploitation du travail humain au profit de minorités dirigeantes et privilégiées, l’exploitation des ressources naturelles menant à leur destruction, la domination étatique et patronale sur la société, un développement mondial inégal...</p> <p>La société reste divisée en classes sociales.<br />Ainsi, la classe capitaliste est constituée des propriétaires et des gestionnaires qui s’accaparent la plus-value de la production.<br />La classe prolétaire se compose de groupes sociaux privés de toute propriété ou moyens de production, donc contraints à vendre leur force de travail manuel et / ou intellectuel sans pouvoir réel sur les prises de décision.<br />Loin d’être uniforme, elle englobe aujourd’hui des travailleur·ses tel·les que les ouvrier·es, paysan·nes mais aussi cadres, ingénieur·es, technicien·nes, les indépendant·es, les sous-traitant·es, les micro-entrepreneur·ses, les privé·es d’emploi…<br />Cet éclatement du prolétariat en plusieurs sous-classes est une stratégie du capitalisme pour empêcher le regroupement des travailleur·ses en organisations efficaces. Conséquence&nbsp;: une grande difficulté à transmettre et à faire vivre la conscience de classes.</p> <p><strong><span style="color: #fc615d;">___________________________</span></strong></p> <h3>Abolir le patriarcat</h3> <p><span style="font-size: 12pt; color: #ff615d;"><span style="font-size: 10pt;"></span><strong>______________________</strong></span></p> <p>Parmi les travailleur·ses les plus exploité·es par le capitalisme&nbsp;: les femmes et les LGBT. L’un des thèmes essentiels du combat libertaire est ainsi la lutte antipatriarcal.<br />Le patriarcat est un système politique et économique basé sur la division sexuée du travail.<br />D’un côté, le patriarcat tire parti du travail gratuit en majorité encore effectué par des femmes dans la reproduction de la force de travail&nbsp;: enfanter, éduquer les enfants, accomplir le travail domestique et les soins... De l’autre, il surexploite les femmes dans des métiers largement déconsidérés et sous-payés. Ainsi, les femmes sont souvent astreintes aux temps partiels imposés, au chômage, à la précarité.<br />Le patriarcat s’appuie sur une construction sociale, le genre, et véhicule un ensemble de préjugés qui leur attribuent des qualités ou des défauts «&nbsp;innés&nbsp;». Il justifie ainsi une domination à la fois idéologique, culturelle, sociale, économique et politique.</p> <p>Aux rencontres de Montreuil, une partie des débats se sont concentrés sur les enjeux de la syndicalisation des secteurs féminisés (<em>lire aussi la rubrique (Re)découvrir</em>).<br />Les objectifs des communistes libertaires sont d’abolir le patriarcat en tant que système de domination, de faire advenir une réelle égalité civile entre hommes et femmes, ainsi que la liberté des femmes de disposer de leur corps et de leur capacité reproductrice dans l’espace intime comme dans l’espace public.</p> <p><strong><span style="color: #fc615d;">_______________________________________</span></strong></p> <h3>« Instruire pour émanciper »</h3> <p><span style="font-size: 12pt; color: #ff615d;"><span style="font-size: 10pt;"></span><strong>________________________________</strong></span></p> <p>Comment&nbsp;? Par l’éducation et la formation qui permettent à tous·tes de conscientiser les discriminations sociales, sexistes, racistes, validistes. Mais pas seulement. <em>«&nbsp;La Révolution repose sur une dimension éducative</em>, souligne Adrien. <em>En effet, sans éducation comment auto-organiser la société&nbsp;? Les libertaires réfléchissent depuis longtemps aux questions de l'éducation et de l'école. Au XIXe et XXe siècles, iels sont partie prenante des réflexions sur les pédagogies nouvelles ou actives avec des pédagogues comme Francisco Ferrer, Freinet ou Paulo Freire...&nbsp;»</em><br />Enseignant en lycée, Adrien s’interroge&nbsp;: <em>«&nbsp;En tant que libertaire et enseignant libertaire, comment instruire pour émanciper, comment produire de l'autonomie plutôt que de la soumission ? Comme le rappelle notre manifeste, le système éducatif prend une part considérable dans l'aliénation de l'individu en reproduisant l'ordre social établi et en le lui faisant accepter dès son plus jeune âge. C'est d'autant plus vrai ces dernières années avec les différentes réformes Blanquer et ses paniques morales réactionnaires. Des collègues mettant en place des pratiques plus émancipatrices subissent une répression comme à l'école Pasteur de Saint-Denis ou Sud Educ 93, dont la dissolution était demandée par des élus Les Républicains <span style="font-size: 8pt;">(4)</span>.&nbsp;»</em></p> <p>Est-ce contradictoire d’enseigner au sein de l’Education nationale, un ministère d’Etat, et d’être libertaire&nbsp;? Pas si on considère que les contre-feux doivent être allumés dans tous les secteurs de la société. <em>«&nbsp;Il y a une tension entre l'éducation telle qu’elle est actuellement et contre laquelle nous luttons (notamment avec nos syndicats), et celle à laquelle nous aspirons,</em> reconnaît Adrien. <em>L'UCL défend des pratiques pédagogiques fondées sur le rationalisme, la coopération, la créativité, le respect de la spécificité de chacune et de chacun pour forger des individus libres et responsables, en capacité de comprendre et d'agir sur le monde qui les entoure. Les libertaires prônent une éducation qui vise à développer, sans les hiérarchiser, les capacités physiques, intellectuelles et artistiques et donc une éducation polytechnique.&nbsp;»</em></p> <p><strong><span style="color: #fc615d;">_____________________________________________</span></strong></p> <h3>Pas de salut dans les élections</h3> <p><span style="font-size: 12pt; color: #ff615d;"><span style="font-size: 10pt;"></span><strong>_____________________________________</strong></span></p> <p><em></em>Pas de capitalisme sans collaboration de l’Etat. Si le principe étatique existe depuis plusieurs milliers d’années, l’Etat moderne tel que nous le connaissons dans nos sociétés occidentales est récent&nbsp;: il concentre force militaire, policière, judiciaire et fiscale. Il entretient le mythe d’une unité nationale par-delà les classes sociales pour, au final, imposer une uniformisation culturelle.</p> <p>Le gouvernement est un instrument des intérêts du capital, notamment en défendant les grandes entreprises privées et en tissant des liens de plus en plus étroits avec la sphère marchande. L’avènement de la social-démocratie n’y a rien changé, bien au contraire&nbsp;! Lorsque la gauche est au pouvoir, on constate un affaiblissement des mouvements sociaux sous couvert de «&nbsp;paix sociale&nbsp;», et une certaine soumission des organisations syndicales au calendrier électoral ou à celui du gouvernement.<br />Si l’accession au pouvoir de la social-démocratie a amené certaines avancées au XXe siècle, c’est parce qu’il y a eu durant ces périodes de véritables luttes menées à la base. C’est pourquoi, l’UCL encourage les contre-pouvoirs qui marquent une véritable rupture avec l’Etat.</p> <p>Pour les libertaires, il n’y a donc pas de salut dans les élections. L’UCL milite pour un boycott des institutions de l’Etat et des élections représentatives, puisqu’elle souhaite une démocratie directe et le fédéralisme. <br />Que pense Adrien de l’Union populaire&nbsp;? <em>«&nbsp;Ça ne change pas grand-chose pour nous. Même si avoir une gauche réformiste au pouvoir, ce n’est pas pareil que l’extrême droite, ça ne changera rien pour notre classe sociale. Quand il y a des avancées sous un gouvernement de gauche, c’est grâce à la pression de la rue.&nbsp;»</em></p> <p><strong><span style="color: #fc615d;">_____________________________________________</span></strong></p> <h3>Expérimenter dès aujourd’hui</h3> <p><span style="font-size: 12pt; color: #ff615d;"><span style="font-size: 10pt;"></span><strong>_____________________________________</strong></span></p> <p><em></em>Dès lors, sur quel terrain se battre&nbsp;? Dans les entreprises, sur les lieux d’études, dans les instances qui régissent le cadre de vie, dans le mouvement pour l’écologie, le droit des femmes, contre le racisme… Pour les communistes libertaires, seules les luttes directes conduites à la base peuvent imposer de véritables transformations. La révolution ne peut être que massive. Mais pas question d’attendre «&nbsp;le grand soir&nbsp;»&nbsp;! Il s’agit d’expérimenter dès aujourd’hui un projet de société alternatif par des actions et des engagements, dans les espaces de vie et de luttes. Participer aux initiatives qui permettent de se réapproprier la production, la distribution, l’éducation… en y apportant des combats anticapitalistes, et des pratiques autogérées et émancipatrices.</p> <p>Ainsi, localement, Adrien essaie de prendre part à ce qui fait sens pour lui&nbsp;: <em>«&nbsp;En étant seul ici à Bourges, c’est compliqué pour moi d’initier des actions. Le but est donc plutôt de soutenir des luttes locales et d’encourager des inter-orgas.&nbsp;»</em> Par exemple, l’UCL fait partie du front antifasciste de Bourges et du collectif Bassines Non Merci Berry <span style="font-size: 8pt;">(5)</span> qui compte aussi Urgence Uni·es pour le climat, ATTAC, la Confédération paysanne, la Coopération Intégrale du Haut Berry...</p> <p><a href="http://www.rebonds.net/images/UCL/affiche-au-taf-image-b47bd.jpg"><img src="http://www.rebonds.net/images/UCL/affiche-au-taf-image-b47bd.jpg" alt="affiche au taf image b47bd" width="359" height="508" style="display: block; margin-left: auto; margin-right: auto;" /></a></p> <p><strong><span style="color: #fc615d;">________________________________________________________________</span></strong></p> <h3>L’importance du syndicalisme révolutionnaire</h3> <p><span style="font-size: 12pt; color: #ff615d;"><span style="font-size: 10pt;"></span><strong>____________________________________________________</strong></span></p> <p><em></em>Parmi les contre-pouvoirs que l’UCL encourage&nbsp;: le syndicalisme révolutionnaire.<br />Selon les réalités des terrains où se trouvent ses membres, iels peuvent adhérer à des syndicats différents, par exemple la CGT, Solidaires, la CNT… Adrien adhère aujourd’hui à Sud-Education. <em>«&nbsp;Lorsque j’y suis entré, j’ai suivi des journées de formation. Il y en a sur l’inter-professionnelle ou sur la manière de militer syndicalement contre l’extrême droite, par exemple. Ça m’a fait beaucoup évoluer sur des choses que je ne connaissais pas forcément. Ça me permet d’être plus fort dans mon engagement politique.&nbsp;»</em></p> <p>«&nbsp;Au taf&nbsp;!&nbsp;», les participant·es ont évoqué l’efficacité des actions syndicales traditionnelles. <em>«&nbsp;Les manifestations, aujourd’hui, le pouvoir politique s’en fout,</em> a assuré le chercheur Jean-Marie Pernot. <em>Chaque matin, ce sont les cours de la bourse que les politiques regardent, pas le nombre de manifestant·es dans la rue. Le problème des grands rassemblements, c’est que ça ne bloque pas le patronat. Ça peut permettre une forme d’unité, mais ça n’est plus assez efficace.&nbsp;»</em><br />Dès lors, des actions telles que la grève générale, le boycott, le sabotage ouvrier, le blocage peuvent être envisagées, ainsi que de nouvelles formes qui restent à inventer, à condition qu’elles viennent des travailleur·ses elleux-mêmes.<br />Jean-Marie Pernot a identifié les revendications qui peuvent nourrir le répertoire syndical actuel&nbsp;: la question des salaires, notamment les plus bas&nbsp;; le temps de travail au long de la vie&nbsp;; les conditions de travail&nbsp;; les dégâts de l’économie sur la vie des travailleur·ses et sur l’environnement&nbsp;; la défense des secteurs hyper féminisés <em>(lire aussi la rubrique (Re)découvrir</em>)…</p> <p><strong><span style="color: #fc615d;">________________________________________________________</span></strong></p> <h3>La perspective de l'interprofessionnelle</h3> <p><span style="font-size: 12pt; color: #ff615d;"><span style="font-size: 10pt;"></span><strong>_______________________________________________</strong></span></p> <p><em></em>Créer des structures locales inter-professionnelles est une piste. Membre de la commission travail de l’UCL et syndiqué à Rennes, Kaou a rappelé aux rencontres de Montreuil comment le capitalisme divise les communautés de travail et par conséquent, les forces syndicales&nbsp;: <em>«&nbsp;éclatement des collectifs de travail, éclatement des lieux de travail (favorisé notamment par le développement des outils numériques), éclatement des statuts d'emploi...&nbsp;Certes, ça a toujours existé. Mais le syndicalisme que nous connaissons, celui dans lequel nous militons, est encore en grande partie celui des Trente glorieuses… Depuis 40 ans, cette réalité n'est plus et notre syndicalisme est comme en «&nbsp;PLS&nbsp;». Et lors de ses moments de lucidité, il tente de courir derrière les évolutions imposées par le capital qui a réussi à modifier le rapport de forces entre les classes en sa faveur.&nbsp;»</em></p> <p>Récemment, des victoires ont été remportées par des travailleur·ses qui ont su se ré-organiser. Kaou a ainsi cité le collectif parisien CGT du nettoyage, qui regroupe des syndicats des entreprises et administrations donneuses d’ordre, ainsi que des syndiqué·es de sociétés de nettoyage qui adhèrent individuellement à des unions locales. Alors qu’iels ne travaillent pas pour les mêmes employeur·ses et qu’iels n’ont pas forcément les mêmes statuts, iels parviennent à créer un cadre de discussions et d’actions commun. <em>«&nbsp;Cela donne lieu à de l'entraide lors des grèves, à des pressions sur les entreprises donneuses d'ordre, qui ont la main sur les contrats de sous-traitance&nbsp;»</em>, a souligné Kaou.<br />Autre exemple&nbsp;: <em>«&nbsp;la fédération Sud Rail s'est construite dès sa création avec l'objectif de syndiquer tous·tes les travailleur·ses qui permettent le fonctionnement du transport ferroviaire. Ce syndicalisme de branche rassemble bien sûr des conducteur·ices de train, contrôleur·ses, agent·es des gares mais aussi les salarié·es des entreprises sous-traitantes qui réalisent le nettoyage, la maintenance, les services en gare comme le gardiennage, l'assistance aux handicapé·es...&nbsp;»</em></p> <p>Mais des blocages perdurent&nbsp;: <em>«&nbsp;Récemment les salarié·es d'une nouvelle entreprise coopérative du secteur de l'énergie, Enercoop, basée à Paris, ont décidé de s'organiser,</em> a raconté Kaou. <em>Le syndicat CGT Energie Paris ne les a pas accueilli·es au motif qu'il ne syndique pas les travailleur·ses des entreprises concurrentes de l'ancien opérateur public de l'Energie (EDF/GDF). C'est l'union locale CGT qui les a soutenu·es pour créer leur équipe syndicale. Même si des liens se créeront et que des échanges auront lieu, il est dommageable que ces travailleur·ses, qui appartiennent au même secteur et font des métiers très similaires, ne puissent pas être réuni·es au sein d'une même structure syndicale pérenne.&nbsp;»</em></p> <p>Pour faire advenir une interprofessionnelle, il ne s’agit donc pas simplement de défendre une profession, mais de réveiller une conscience de classes. <em>«&nbsp;Il faut aussi faire sortir le syndicalisme de la simple question du travail, a affirmé Guillaume, membre du syndicat général du Livre. Autrefois, le syndicalisme de classes était dans les clubs de ciné, de sport, de lecture…&nbsp;»</em><br />D’où l’importance pour les communistes libertaires d’intégrer différents contre-pouvoirs pour contribuer à la formation, diffuser leur projet et mettre de l’huile dans le moteur des luttes.</p> <p><strong><span style="color: #fc615d;">______________________________________________________</span></strong></p> <h3>Une lutte écologiste antiproductiviste</h3> <p><span style="font-size: 12pt; color: #ff615d;"><span style="font-size: 10pt;"></span><strong>____________________________________________</strong></span></p> <p>Parmi les courants syndicalistes qui se développent&nbsp;: l’éco-syndicalisme. Ou comment faire converger deux luttes. <em>«&nbsp;La lutte écologiste est vitale&nbsp;; elle n’est cohérente qu’en étant anticapitaliste et antiproductiviste&nbsp;»</em>, affirme le manifeste de l’UCL.</p> <p>Parce que le capitalisme vert&nbsp;prône des solutions techniques qui ouvrent simplement de nouveaux marchés plutôt que de remettre en cause l’accumulation indéfinie du capital, les communistes libertaires n’attendent rien des réponses institutionnelles à la crise environnementale. Iels entendent combattre à la base, au sein d’associations ou du mouvement syndical. C’est le cas du collectif «&nbsp;Plus jamais ça&nbsp;» dont font partie la CGT et Solidaires ou le réseau écosyndicaliste. Au coeur de ces luttes&nbsp;: la question de la reconversion des emplois dans les secteurs les plus polluants, l’écologie sociale ou encore la révolution par le mouvement climatique… (<em>lire aussi la rubrique (Re)visiter</em>).</p> <p><strong><span style="color: #fc615d;">____________________________________________________________________</span></strong></p> <h3>Quel espace pour prolonger les mobilisations ?</h3> <p><span style="font-size: 12pt; color: #ff615d;"><span style="font-size: 10pt;"></span><strong>_______________________________________________________</strong></span></p> <p>Ces questions intéressent particulièrement les jeunes générations. <em>«&nbsp;A la CGT, j’entends que les jeunes sont sous-politisé·es et qu’iels ne se mobilisent pas, mais il y a bien des contre-exemples&nbsp;! Les marches pour le climat, les luttes féministes, le mouvement contre les violences policières…</em> a rappelé Adèle, membre de l'UCL, à Montreuil. <em>La question, c’est plutôt&nbsp;: qu’est-ce qu’on leur propose comme espace d’organisation de masse&nbsp;pour prolonger leurs mobilisations&nbsp;?&nbsp;»</em></p> <p>A l'UCL, la question du recrutement se pose en permanence. Actuellement, le mouvement compte environ 600 adhérent·es actif·ves réparti·es dans des groupes locaux à travers toute la France. Un congrès est organisé tous les deux ans avec bilan et perspectives. Tous les trois mois, une coordination fédérale gère les questions de court terme. Et tous les quinze jours, c’est l’instance permanente, le secrétariat fédéral et les délégué·es des commissions thématiques, qui se réunissent. Chaque membre de l’UCL peut ainsi s’investir aux différents échelons de l’organisation.</p> <p>Certains groupes locaux, comme à Montreuil, ont des processus d’intégration. <em>«&nbsp;Nous ne voulons pas être une organisation «&nbsp;passoire&nbsp;» avec des gens qui entrent et sortent en permanence,</em> explique Guillaume Davranche, de l’UCL de Montreuil. <em>La base minimum, c’est que tu aies lu le manifeste et que tu t’y reconnaisses. On organise généralement une rencontre informelle puis on invite à participer à une action et enfin, aux réunions. Si tout se passe bien, la personne adhère. Elle règle une cotisation mensuelle selon ses revenus ; notre organisation s’auto-finance.&nbsp;»</em><br />Les membres de l’UCL sont invité·es à se retrouver chaque été aux Journées d’été rouge et noir en Aveyron pour des formations, débats et moments de convivialité.</p> <p><strong><span style="color: #fc615d;">__________________________________________________________</span></strong></p> <h3>Les dominations ne sont pas une fatalité</h3> <p><span style="font-size: 12pt; color: #ff615d;"><span style="font-size: 10pt;"></span><strong>_______________________________________________</strong></span></p> <p>Le projet de société auquel aspirent les communistes libertaires est-il possible&nbsp;? Il vit déjà dans bien des collectifs, qui ne se réfèrent pas forcément à l’UCL. <em>«&nbsp;L’histoire contemporaine est marquée par la volonté des peuples à chercher des voies vers l’égalité sociale et politique&nbsp;»</em>, rappelle le manifeste du mouvement. Les communistes libertaires s’inspirent d’exemples tels que la Commune de Paris, les révolutions au Mexique, en Russie et en Ukraine, en Corée, en Espagne, et aujourd’hui au Chiapas chez les Zapatistes et au Rojava avec la lutte des Kurdes… Des exemples qui donnent de l’espoir et nourrissent tous·tes celleux qui cherchent à abolir les dominations. Et comme le souligne le manifeste de l’UCL&nbsp;: <em>«&nbsp;Il n’y a aucune raison pour que l’Histoire ait atteint son stade ultime&nbsp;: le capitalisme ne sera pas la dernière forme de la société humaine. Les systèmes de domination (…) ne sont pas une fatalité.&nbsp;»</em></p> <p><strong>Fanny Lancelin</strong></p> <p><span style="font-size: 8pt;">(1) Lire l’article de Guillaume Davranche paru dans L’Alternative Libertaire du 22 novembre 2020&nbsp;: «&nbsp;1880&nbsp;: le «&nbsp;parti&nbsp;» communiste anarchiste affirme son existence&nbsp;»&nbsp;: <a href="https://www.unioncommunistelibertaire.org/?1880-le-parti-communiste-anarchiste-affirme-son-existence">https://www.unioncommunistelibertaire.org/?1880-le-parti-communiste-anarchiste-affirme-son-existence</a></span><br /><span style="font-size: 8pt;">(2) Le manifeste est disponible sur le site Internet de l’UCL&nbsp;: <a href="https://unioncommunistelibertaire.org/?-Manifeste-union-communiste-libertaire-">https://unioncommunistelibertaire.org/?-Manifeste-union-communiste-libertaire-</a></span><br /><span style="font-size: 8pt;">(3) IRES&nbsp;: Institut de Recherches Economiques et Sociales. <a href="http://www.ires.fr/">http://www.ires.fr/</a></span><br /><span style="font-size: 8pt;">(4) <a href="https://www.revolutionpermanente.fr/Victoire-face-aux-parlementaires-Les-Republicains-Sud-Education-93-pas-dissout">https://www.revolutionpermanente.fr/Victoire-face-aux-parlementaires-Les-Republicains-Sud-Education-93-pas-dissout</a></span><br /><span style="font-size: 8pt;">(5) Bassines Non Merci Berry&nbsp;: collectif qui milite contre les retenues d’eau pour l’irrigation agricole, reliées directement aux nappes phréatiques.</span></p> <p>&nbsp;</p> <div class="panel panel-primary"> <div class="panel-heading"> <h3 class="panel-title">Plus</h3> </div> <ul> <li><span style="color: #000000;">Pour en savoir plus sur l’histoire du courant communiste libertaire&nbsp;: <a href="https://unioncommunistelibertaire.org/?Histoire-du-courant-communiste-libertaire" style="color: #000000;">https://unioncommunistelibertaire.org/?Histoire-du-courant-communiste-libertaire</a></span></li> </ul> </div>