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Les Soulèvements de la Terre

« Arrêter la bétonisation, c'est un projet pour rendre notre pays plus humain, au fond plus beau. »
Emmanuel Macron,
devant la Convention citoyenne pour le climat,
lundi 29 juin 2020

Je ne reconnais plus ma ville.

Bien avant que je ne la quitte, des banderoles avaient fleuri sur les balcons des pavillons de briques de la rue de l'Alma : les habitant·es refusaient de partir pour laisser place aux immeubles, aux bureaux, aux avenues sans âme qui poussent en surface des trajectoires du métro.
Des artistes squattaient les friches industrielles pour en faire des lieux de répétition et de spectacles vivants, créatifs, militants, pour tou·tes et à prix libre.
Les jeudis soirs étaient festifs, les étudiant·es se déversaient dans les bars et les rues du centre-ville dans un joyeux dawa (quoique très alcoolisé ).
La Maison du peuple offrait un espace d'expression et de liberté à tou·tes ceux·les qui voulaient changer le monde…

Rennes était une ville dynamique, en mouvement. On l'appelait la rockeuse. Nul doute qu'elle le soit encore.
Mais les bulldozers ont rasé les maisons de l'Alma (parmi tant d'autres) et les immeubles ont poussé comme les champignons en forêt de Brocéliande. Les squats se sont institutionnalisés, le centre gentrifié, les fêtes excentrées, la Maison du peuple a été détruite… La couronne urbaine s'étend de plus en plus loin aux villages alentour. Le prix du foncier flambe.
Il faut construire, bâtir, bétonner, pour cette population qui arrive de partout, de plus en plus aisée, en empruntant notamment la Ligne à Très Grande Vitesse depuis Paris. La gare a fait peau neuve avec force boutiques parmi lesquelles celle du Stade rennais… La deuxième ligne du métro-boulot-dodo est en cours d'achèvement.

Je ne suis pas partie par hasard. Il fallait retrouver les forêts, les champs, les liens qui unissent les êtres humains aux autres vivant·es.
Je ne suis pas revenue par hasard non plus : dans la capitale bretonne, ce 10 avril 2021 – soit près de dix ans après mon départ – il s'agit de défendre des espaces menacés de bétonisation. Le cas de Rennes est loin d'être isolé : partout en France, l'artificialisation est un vrai danger pour les espaces agricoles et naturels.
C'est pourquoi, l'appel des Soulèvements de la Terre a été lancé : des actions de (re)prises de terres et de blocages des industries qui les dévorent sont organisées tout au long de l'année dans l'hexagone. La saison 1 vient de démarrer.

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Agir ensemble contre la bétonisation des terres

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« Nous sommes des habitant·es en lutte attaché·es à leur territoire (…). Nous sommes des jeunes révolté·es qui ont grandi avec la catastrophe écologique en fond d'écran et la précarité comme seul horizon (…). Nous sommes des paysan·nes (…). Parce que tout porte à croire que c'est maintenant ou jamais, nous avons décidé d'agir ensemble. » (1) Le dimanche 24 janvier, sur la ZAD (2) de Notre-Dame-des-Landes, après un week-end de réflexions et d'échanges, une centaine de personnes issues de collectifs, syndicats, fermes et espaces occupés, décident de lancer un programme d'actions autour de la question des terres. Si elles sont de sensibilités, de parcours et d'horizons très variés, elles se retrouvent autour d'un constat commun : aujourd'hui, pour espérer un monde différent, la question foncière est incontournable. En tant qu'habitant·es, dans quels espaces souhaitons-nous vivre ? Selon quels types de rapports ?

 

rennes banderoles 1

Comment nous nourrir et être nourri·es ? Dans les dix ans à venir, un·e agriculteur·ice sur trois partira à la retraite (3). Qui prendra le relais ? Que deviendront les terres ? Comment les protéger de l'artificialisation qui gagne du terrain ?

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Chaque année, 60.000 hectares disparaissent

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Le terme « artificialisation » désigne le fait de « transformer un sol naturel, agricole ou forestier, par des opérations d’aménagement pouvant entraîner une imperméabilisation partielle ou totale, afin de les affecter notamment à des fonctions urbaines ou de transport (habitat, activités, commerces, infrastructures, équipements publics…) ». (4)

En France, depuis le 4 juillet 2019, il existe un Observatoire de l'artificialisation. Son rôle : compulser toutes les données existantes et émettre un rapport, accessible à tou·tes sur son site Internet. Les chiffres consultables actuellement concernent la période du 1er janvier 2009 au 1er janvier 2018. Pour avoir une vue antérieure, il faut aller sur le site de l'Agreste, le service de la statistique et de la prospective du ministère de l'Agriculture.
Qu'y apprend-on ?
Que les sols artificialisés représentent 9,58 % du territoire métropolitain. Depuis les années 1960, le phénomène s'accélère. Chaque année, ce sont en moyenne 60.000 hectares qui disparaissent sous le béton et le bitume, soit l'équivalent d'un département tous les cinq ans.
« Cette extension s'est effectuée pour deux tiers aux dépens des espaces agricoles », souligne l'Agreste (5).

Les constructions se développent dans les plaines et en zones péri-urbaines, où domine pourtant l'agriculture. Là, « l'habitat individuel, les chantiers, les services publics et les activités industrielles se développent à plus de 70 % sur les terrains agricoles, tandis que les réseaux routiers ou les infrastructures de sport et de loisir s'étendent à part égale sur les espaces naturels et agricoles ».
Certaines régions sont plus touchées que d'autres, comme le quart sud-est (Bouches-du-Rhône, Var et Vaucluse), l'ouest (région nantaise, Rennes, Bordeaux), l'Ile-de-France. Deux forces majeures sont à l'œuvre : la métropolisation, et l'attraction du littoral, près de l'Atlantique comme du bassin méditerranéen.

Première cause d'artificialisation : l'habitat. « Sur les 491.000 hectares de terres artificialisées [entre 2006 et 2014], 46 % ont été consommées par des maisons individuelles », précise l'Agreste. Le critère démographique l'explique en partie (entre 2007 et 2012, la population française a augmenté de 1,6 million d'habitant·es), mais aussi certains choix de vie (vouloir avoir une maison neuve plutôt que restaurer ; habiter seul plutôt qu'en collectif ; aspirer à de grands terrains isolés qui engendrent la multiplication des routes plutôt que dans les villages…).
Le réseau routier est la deuxième cause d'artificialisation. Viennent ensuite, dans l'ordre : l'agriculture elle-même avec la construction de bâtis ou d'aires de stockage ; les chantiers et activités du bâtiment et du génie civil ; les commerces ; les services ; les industries.
Actuellement, l'artificialisation pour les activités économiques augmente plus vite que pour l'habitat.

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Le Zéro Artificialisation Nette : un leurre

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Quelles leçons l’Etat français en tire-t-il ? Rassurons-nous en lisant le site du ministère de l'Ecologie et de la Transition Energétique : l'artificialisation y est présentée comme un facteur aggravant de la perte de la biodiversité, du réchauffement climatique, des inondations, de la réduction de la capacité des terres agricoles à nous nourrir… La solution est toute trouvée : le « Zéro Artificialisation Nette » ou ZAN. « Il s’agit de limiter autant que possible la consommation de nouveaux espaces et, lorsque c’est impossible, de « rendre à la nature » l’équivalent des superficies consommées. » (4)
Tout est dans le « lorsque c'est impossible »
Officiellement, donc, l’Etat souhaite favoriser la restauration des espaces déjà urbanisés (maisons, friches industrielles) et augmenter la densité des opérations (construire dans les dents creuses plutôt que d'étaler les zones urbaines, construire des immeubles plutôt que de l'habitat individuel). Il va devoir donner un sacré coup d'accélérateur parce qu'au rythme où les choses se passent, la ZAN ne sera atteinte qu'en 2070, selon l'Observatoire de l'artificialisation (6).
« Lorsque c'est impossible ? » Compensons ! Cent arbres coupés par-ci, cent arbres replantés par-là et le tour est joué. Mais l'espèce en voie de disparition qui ne pouvait vivre que dans l'environnement des cent premiers arbres ? Euh… Passons ! Et les habitant·es privé·es des mêmes cent premiers arbres ? Passons, passons…

L’Etat émet de faux vœux pieux qui n'engagent que lui. En accord avec sa logique néo-libérale capitaliste, il soutient voire imagine lui-même des projets extractivistes : ici, une plate-forme logistique, là une carrière de sable pour un cimentier, là-bas une piscine olympique, un peu plus loin un nouvel axe autoroutier… Il faut nourrir et faire vivre la machine économique, peu importe qu'elle appauvrisse et asphyxie les vivant·es.
Mais des habitant·es se révoltent. Pour eux·les, il faut établir un rapport de forces avec l’Etat et les industries qu'il encourage.

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Défendre des jardins en milieu urbain

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Samedi 27 mars 2021 – 11 heures – Besançon

Le premier acte des Soulèvements de la Terre a lieu aux Vaîtes : 34 hectares de jardins familiaux autogérés, d'espaces boisés, de zones humides, de terres maraîchères… Situés au milieu des immeubles, ils sont menacés par un projet d'éco-quartier porté par une municipalité pourtant d'union socialiste-communiste-écologiste.
Sur la place de la Révolution ce matin-là, 650 personnes viennent exprimer leur désaccord. Elles ont répondu à l'invitation conjointe de l'association des Jardins des Vaîtes à Besançon et des Lentillères à Dijon. Les luttes de ces habitant·es sont en effet sœurs : dans les deux cas, il s'agit de préserver des espaces naturels et agricoles au cœur de zones urbaines, face à des investisseurs et des collectivités qui construisent des éco-quartiers qui n'ont d'écologique que le nom.

 

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La journée débute par une marche, des rues du centre-ville jusqu'aux jardins. Le tracteur rose des Lentillères, mascotte des luttes à Dijon, accompagne les manifestant·es. L'ambiance est détendue, la police discrète. Les militant·es d'Extinction Rébellion démontent avec précaution, sans casse, les affiches des abri-bus pour les remplacer par les leurs, véritables manifestes pour la biodiversité. Des tracts sont distribués aux passant·es qui se promènent ou font les magasins. Sur la remorque d'un camion, un groupe joue de la musique. Le soleil brille.
Une fois aux jardins, les organisateur·ices prennent la parole, le public pique-nique, des visites sont proposées, une conférence, un spectacle, de la danse au son de l'accordéon…

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Des espèces protégées menacées

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Marie-Hélène Parreaux a accepté de jouer les guides. Elle vit aux Vaîtes depuis 2012. « Dans une maison qui devait disparaître selon la première carte du projet présentée aux habitants », sourit-elle. Un projet appris par voie de tract glissé dans les boîtes aux lettres, en 2005. « Vous imaginez ? Ça a été d'une violence incroyable ! » A l'époque, l'éco-quartier devait occuper 23 hectares, dont sept pour les habitations, sept pour la voirie et six pour une zone végétalisée. « Sauf que sur le plan, cette bande est un espace déjà urbanisé, donc il n'y aura pas vraiment d'espaces verts ! »
La majorité des jardiniers ne sont pas propriétaires et louent leurs parcelles. La ville les rachète progressivement via la Société Publique Locale « Territoires 25 » dont elle est actionnaire majoritaire.

 

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Dès le départ, des habitant·es s'organisent pour s'opposer au projet. Fin 2018, à l'annonce du début des travaux, l'association des Jardins des Vaîtes est créée. Quelques mois plus tard, dans une procédure d'urgence devant le Conseil d’Etat, elle parvient à faire suspendre les travaux. Mais il reste le procès sur le fond, dont la date n'a pas encore été définie. « Le problème, c'est que le jugement portera sur l'ancien dossier alors que la Ville est en train de le modifier. » En effet, la municipalité a fini par s'apercevoir que Besançon perd des habitant·es, que 10 % des logements sont vacants et que les Vaîtes n'ont sans doute pas besoin des 1.100 appartements annoncés. Elle a réduit sa feuille de route, mais pour la faire accepter, elle y a ajouté un argument de poids : une nouvelle école. Marie-Hélène Parreaux hausse les épaules : « C'est bien joué : comment s'opposer à la construction d'une école ? Mais Besançon n'en a pas besoin non plus : la population vieillit et actuellement, des classes ferment ! »

Dans la logique « Zéro Artificialisation Nette », la municipalité devrait plutôt réhabiliter l'ancienne école et réfléchir à une alternative à son éco-quartier. Mais, apparemment, nous sommes dans le cas du « lorsque c'est impossible » car elle a plutôt proposé des compensations : des bouts de terrains à droite et à gauche pour les jardiniers, d'autres habitats pour les espèces animales… « Mais c'est ridicule, ça ne veut rien dire ! s'insurge Marie-Hélène. Les chauve-souris devraient aller au Fort-Benoît, là où il y en a plein d'autres. Autant dire qu'elles n'iront pas ! Pour les crapauds et les tritons, ils voulaient construire de nouvelles mares. Mais dans la seule qu'ils ont creusée, il n'y a jamais eu d'eau ! » Parmi les espèces protégées recensées par les naturalistes, l'alyte accoucheur, le triton alpestre et le triton palmé, ou encore le Milan royal, qui ne vit pas dans les jardins mais y chasse. « Le groupe d'experts mandaté par la municipalité a reconnu que les inventaires réalisés pendant les études préalables étaient incomplets en ce qui concerne la faune et la flore. C'est pourtant très important car on sait aujourd'hui que ça peut faire basculer un projet. »

Les habitant·es ne veulent pas que l'on « compense » la perte de leur mode de vie, la convivialité qui règne entre usager·es des jardins, leur relation aux êtres non-humains. « Nous voulons l'abandon complet du projet », répète Marie-Hélène avec détermination. La journée avait pour but de montrer qu'il·les n'étaient pas seul·es. « C'est positif dans le rapport de forces et ça nous donne de l'énergie pour continuer la lutte. »

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Sécuriser l'accès aux terres

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Dans le cortège et les jardins, de petits drapeaux jaunes et noirs flottent au vent : la Confédération paysanne marque sa présence. Signataire de l'appel des Soulèvements de la Terre, elle entend alerter sur les dangers que l'artificialisation fait porter sur l'agriculture. Directement, parce qu'une terre agricole artificialisée l'est à jamais ; indirectement, par la pression foncière qu'elle exerce sur les zones à forte demande. Résultat : alors que le métier attire de moins en moins et que le nombre d'exploitant·es diminue après les départs en retraite, des jeunes peinent à s'installer. Les prix des terres et prés libres non bâtis ne cessent d'augmenter : la moyenne nationale était de 6.000 euros à l'hectare en 2019, mais de fortes disparités existent selon les régions puisque le prix monte jusqu'à 8.500 euros à l'hectare dans le Nord, à l'est, dans le bassin parisien, au sud-ouest, sur les bords de la Méditerranée… (7)

 

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Autre évolution inquiétante dénoncée par le syndicat : la financiarisation des terres. Les prix empêchant les jeunes de devenir propriétaires, les terres sont achetées par des investisseurs. En 1993, 60 % des surfaces appartenaient aux agriculteur·ices contre 47 % seulement aujourd'hui (7). Le foncier agricole devient un enjeu de spéculation.
Pour résister, certain·es choisissent de se regrouper, ce qui a tendance à augmenter la taille des fermes et à accentuer le phénomène de l'agriculture productiviste, au détriment des petites unités.
Dès lors, la question de la sécurisation de l'accès au foncier agricole par les paysan·nes eux·les-mêmes devient primordiale. Les Soulèvements de la Terre seront l'occasion de défendre un autre modèle : à Saint-Colomban et sur le plateau de Saclay en Ile-de-France, par exemple, la défense de champs et de fermes est enclenchée.

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« Remettre du sens dans les priorités »

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Samedi 10 avril 2021 – 13 heures – Rennes

Changement d'ambiance.
Des cars de CRS forment le comité d'accueil sur le mail François-Mitterrand, lieu du rendez-vous pour le deuxième acte des Soulèvements de la Terre. En plein confinement, les organisateur·ices avaient réussi un tour de force : faire accepter par la Préfecture d'Ille-et-Vilaine la manifestation du matin. Mais pas question pour elle de valider les réjouissances du reste du week-end : plantations, tournoi de football…
La pluie tombe drue. La manifestation est finalement reportée au début d'après-midi. Elle est donc illégale. Près de 500 personnes sont tout de même venues, de tous âges et, réunies derrière des banderoles, prennent la direction de La Prévalaye.

Ce quartier, qui s'étend sur 450 hectares à l'ouest de la ville de Rennes, a toujours eu une vocation agricole, notamment maraîchère. Des surfaces boisées et des zones humides sont particulièrement appréciées des habitant·es qui s'y promènent souvent le dimanche.
Refusant l'installation de nouveaux agriculteur·ices, la métropole rennaise préfère les sites touristiques et récréatifs, ou laisser le Stade rennais étendre ses infrastructures. Trois hectares doivent ainsi prochainement être transformés en parking et servir le centre d'entraînement de football.
C'est sur ces parcelles que sont prévus symboliquement les Soulèvements de la Terre.

« La Prévalaye incarne un non-sens, explique une des membres de l'organisation, paysanne en Bretagne. La municipalité socialo-écolo de Rennes prône le « Zéro Artificialisation », alors qu'elle permet ce type de projets. Nous avons besoin d'une ceinture verte autour de la ville pour nourrir la population. Nous devons remettre du sens dans les priorités : nous ne sommes pas contre le football, mais nous considérons qu'il est prioritaire de nourrir les gens sainement. »

 

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En septembre et en janvier, des rassemblements avaient déjà eu lieu sur place, pour informer la population. Un collectif d'habitant·es et d'usager·es s'est monté. « Il faut que nous puissions réduire la fracture entre urbains et ruraux, que nous tissions de nouveaux liens pour faire prendre conscience des réalités de l'agriculture d'aujourd'hui. »
Trouve-t-elle que l'écho est favorable ? « Oui, depuis les Gilets Jaunes et avec la crise sanitaire et les confinements, les gens réfléchissent. Ils réalisent l'importance de manger local. »

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(Re)prise de terres en bonne et due forme

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Le cortège a traversé sans encombre une petite partie de la ville, s'arrangeant avec les automobilistes qui, parfois, klaxonnent gaiement en signe de soutien. Quelques graffs sur les murs. Un arrêt pour dérouler la banderole au-dessus de la rocade et bientôt, les infrastructures du Stade rennais sont en vue. L'atmosphère se crispe un peu : les CRS sont là et barrent l'accès au centre d'entraînement et la seconde parcelle.

 

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La première est bientôt investie par les manifestant·es qui ont apporté pelles, pioches et fourches-bêches et entreprennent de planter, semer. Une (re)prise de terres en bonne et due forme. Malgré la pluie qui ne cesse que par intermittence, le sourire est sur tous les visages. Une petite restauration avec des tourtes véganes, des cookies, des tartines et un thé chaud réchauffe aussi les cœurs.

 

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Mais bientôt, il faut partir. Les CRS perdent patience. Le retour sera néanmoins joyeux, au rythme d'un système-son diffusant des chansons entraînantes. La manifestation prend fin là où elle a démarré, place des Lices, où de nouveau les CRS ont été postés pour empêcher l'accès au centre-ville.

 

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Le petit groupe de manifestant·es restant entonne le « Fuck You » de la chanteuse Lili Allen, le doigt levé bien haut en direction des uniformes bleus… A Rennes, les mauvais rapports entre la police et une partie de sa population ne datent pas d'hier. La répression des luttes sociales a laissé des traces, notamment celles des dernières en date, les Gilets jaunes et la loi Travail.

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Un choix politique

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Sur la route qui me ramène dans mon Berry d'adoption, je pense aux actes qui se préparent.
Les 22 et 23 mai, dans la Haute-Loire, le collectif « La lutte des Sucs » appelle à des manifestations et des semis pour dénoncer le tracé de la RN88, le chantier routier le plus important actuellement en France. Une trentaine de fermes et plus de 140 hectares de forêts, zones humides, prés, sources, haies seraient impactés.
Du 19 au 21 juin, au sud de Nantes, les paysan·nes et habitant·es de Saint-Colomban attendent du renfort pour monter un camp contre l'extension des sablières du cimentier Lafarge.

 

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Sur le plateau du Saclay, des occupations devraient freiner le projet du Grand Paris, qui artificialise les dernières terres agricoles de la région, jugées pourtant extrêmement fertiles.
A l'été, un grand rassemblement devrait marquer la fin de la saison 1. Car il y en aura une seconde ! Une grande marche vers le ministère de l'Agriculture est déjà annoncée pour l'automne…

Ce mouvement est inéluctable et rien ne l'arrêtera. Sans doute est-il encore considéré comme marginal. Mais il est rejoint par de plus en plus d'habitant·es qui voient bien que le mode de vie qu'on leur vend depuis des décennies n'est plus tenable, que les crises sanitaires sont directement liées aux choix catastrophiques des politiques et industries qui n'entendent que la raison du profit. Alors, que faire ?

« Faire date. Agir ensemble au fil des saisons. Jeter toutes nos forces dans la bataille. Remuer ciel et terre. Entre la fin du monde et la fin de leur monde, il n'y a pas d'alternative. Rejoignez les Soulèvements de la Terre. » (1)

Textes et photos : Fanny Lancelin

(1) Extrait de l'appel des Soulèvements de la Terre : https://lessoulevementsdelaterre.org/
(2) ZAD : Zone A Défendre.
(3) Données : Mutualité Sociale Agricole. https://statistiques.msa.fr/publication/les-installations-de-chefs-dexploitation-agricole-en-2019-infostat/
(4) https://www.ecologie.gouv.fr/artificialisation-des-sols
(5) https://agreste.agriculture.gouv.fr/agreste-web/download/publication/publie/Pri326/primeur326.pdf
(6) https://artificialisation.biodiversitetousvivants.fr/sites/artificialisation/files/fichiers/2020/06/rapport%20V3%20complet.pdf
(7) https://www.pleinchamp.com/les-guides/trouver-des-terres-pour-s-installer~les-terres-agricoles-un-enjeu-majeur-panorama-du-foncier-en-france
(8) https://www.france-insoumise-rennes-metropole.fr/viasilva-cesson-sevigne-halte-a-la-politique-beton/

 

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