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« Notre pain quotidien », Nikolaus Geyrhalter

Dans ce documentaire, le réalisateur présente les grands groupes européens agricoles, les processus de fabrication, les machines. Il a pu s'introduire là où nous ne sommes pas autorisé·es à entrer habituellement.

Nikolaus Geyrhalter a réalisé de nombreux documentaires dont « Pripyat » (1999), sur les personnes qui sont restées dans la zone de la ville de Pripyat après la catastrophe nucléaire de Tchernobyl. Depuis 2005, il a réalisé de nombreux autres documentaires. Son dernier,  « Terre » (2019), observe les carrières d’extraction de charbon ou de cuivre ainsi que des champs de forage pétrolier.

Dans « Notre pain quotidien », il présente les grands groupes européens agricoles, les processus de fabrication, les machines. Il a pu s'introduire là où nous ne sommes pas autorisé·es à entrer habituellement.

Le rythme des machines, c'est cela qui ponctue le montage et nous entraîne dans le quotidien des ouvrier·es agricoles ou d'abattoir.
Les machines qui déploient leurs ailes pour asperger de produits chimiques des centaines de mètres de terre en un seul passage. Les machines qui découpent les corps des animaux consommés par les humain·es, qui les suspendent, qui les brûlent dans des procédés gigantesques à la chaîne. Des sacs d'engrais artificiels dans lesquels poussent des tomates dans des serres géantes.
L'usine, où nous voyons les ouvrier·es prendre leur pause, dans un silence pesant, le silence de leur vécu, de la répétition de leurs tâches robotisées, de leur sandwich journalier.

Le réalisateur choisit des captations. Il n'y a pas de voix off qui nous dit quoi penser, seulement des personnes conduisant des machines et les subissant. Il nous faut rentrer dans le rythme du montage qui laisse de la place pour nos réflexions et nos idées dans une suite de plans séquences.

J'apprécie beaucoup le fait qu'il n'y ait pas d'indications de ce que nous devons penser du film, si ce n'est les choix des sujets que filme l'auteur indique, je suppose, un regard critique sur ce que font les industries aux terres et aux humain·es qu'elles exploitent. Je perçois de l'empathie dans les plans fixes qui filment les pauses des ouvrier·es. Sur le plan fixe où nous voyons un bus plein d'employé·es (d'Almeria peut-être ?) et leurs conditions de vie dans des habitats précaires proche des parcelles dont iels s'occupent, par exemple.

Le film fait l’état des lieux de 2005. Il nous laisse à la fois stupéfait·es et désolé·es, et alerte sur la nécessité d'agir sans attendre pour faire cesser ces industries.

Léonard