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« Petite fille », Sébastien Lifshitz

C’est un film bouleversant, notamment parce qu’il prend une posture rare : celle de laisser la parole à un enfant, sans interprétation, sans jugement. Avec beaucoup de délicatesse et de sincérité, le réalisateur suit Sacha, petite fille née dans un corps de garçon, qui se bat avec sa famille pour faire reconnaître son droit à être qui elle est réellement.

« Quand je serai grand, je serai une fille. » Non, ce n’était pas possible. Il fallait bien que sa maman lui explique : non, ce n’est pas possible, tu es un garçon, tu resteras un garçon toute ta vie. La souffrance que la mère de Sacha perçoit alors dans le regard et le corps de son enfant lui ouvre les yeux. Elle vient de briser tout espoir pour Sacha d’être libre.

Le désir de l’enfant, exprimé depuis le plus jeune âge, n’avait rien d’un caprice. Sa famille l’apprendra progressivement, notamment grâce à une formidable pédo-psychiatre de l’hôpital Robert-Debré à Paris. Non pas que la situation de Sasha soit une maladie, mais son désir de transformation suppose une prise en charge attentive et médicale, notamment pour bloquer les caractéristiques physiques masculines qui se développeront à la puberté.
Cette attention est fondamentale pour Sacha, ses parents, ses frères et sœurs pour cheminer sur le long parcours qu’iels ont emprunté tous·tes ensemble : celui de l’affirmation du droit à la différence. Iels se heurtent à l’école (qui refuse que Sacha vienne en robe par exemple) ou au conservatoire de danse, pour qui le genre inscrit sur une carte d’identité est la seule norme qui vaille. Et qu’importe la douleur qui s’écoule dans les larmes silencieuses de cette enfant, que l’on perçoit pourtant sans filtre même à travers l’écran…

« Petite fille » est un documentaire tournée à la manière d’un film, sans commentaire, avec une distance bienveillante qui touche au cœur. Les images sont belles. Sacha est belle dans sa dignité. Une vraie leçon de vie et de courage !