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« Douce France », Geoffrey Couanon

A Villepinte, en Ile-de-France, trois enseignant·es d’un lycée proposent à leurs élèves de travailler sur EuropaCity, un projet pharaonique visant à urbaniser 280 hectares de terres agricoles pour un complexe commercial et de loisirs. En leur demandant d’enquêter sur le terrain et de rencontrer les différentes parties (pour et contre le projet), les enseignant·es éveillent leur esprit critique. Leur regard sur leur territoire et leur avenir s’en trouve modifié...

Alors qu’il était animateur en banlieue parisienne, Geoffrey Couanon, le réalisateur de « Douce France », a lui-même organisé des ateliers sur EuropaCity dans une vingtaine de classes. Premier constat surprenant : la plupart des élèves n’avaient jamais entendu parler de ce projet, qui allait pourtant transformer en profondeur leur environnement : 230.000 m² de commerces, de bureaux, d’hôtels, de gares autour d’un parc aquatique et d’une piste de ski, en plein cœur du Triangle de Gonesse, où s’étendent des terres agricoles qui comptent parmi les plus fertiles de la région.

Deuxième constat, qu’il saisit avec sa caméra : quand les élèves découvrent le spot publicitaire d’EuropaCity, iels sont séduit·es. Pourtant, autour de Villepinte, les centres commerciaux ont déjà poussé comme des champignons : chaque année, l’Ile-de-France perd 1.400 hectares de terres agricoles.
Pourquoi continuer à urbaniser et jusqu’où ? Les emplois promis par ce genre de projet n’en détruisent-ils pas d’autres ? Comment se nourrir localement lorsque les champs disparaissent de notre horizon ? Ce sont quelques-unes des questions que les trois enseignant·es du film posent à leurs élèves de Première du lycée Descartes à Villepinte. Geoffrey Couanon précise (1) : « Marie, professeure de géographie, essaye de sortir d’un « tout-théorique » en faisant découvrir des espaces urbains et ruraux directement sur le terrain. Thomas, professeur de Sciences Economiques et Sociales, ancre son programme dans le cas concret d’EuropaCity en posant la question de l’emploi, de la consommation, de la production, et en les initiant à l’économie sociale et solidaire. Pour Hanane, professeur de Sciences et Vie de la Terre, il s’agit d’interroger les lycéen·nes sur les enjeux de leur propre alimentation, de leur santé en faisant le lien avec l’agriculture, les sols et les éco-systèmes. »

Durant le film, on suit plus particulièrement Amina, Sami et Jennyfer. Avec leurs camarades de classe, iels se rendent sur le Triangle de Gonesse, assistent aux débats publics organisés par la mairie, rencontrent les députées qui défendent le projet ou s’y opposent, interviewent les promoteurs, passent une journée avec des maraîcher·es… Progressivement, leur monde s’élargit, leurs lignes bougent. Amina, adepte du shopping et des centres commerciaux, découvrent les friperies et l’économie circulaire. Sami s’interroge : pourquoi ne pas devenir agriculteur ? Jennyfer ,qui tient à travailler dans la finance, apprend que certain·es l’utilisent pour mettre à disposition des paysan·nes des terres à cultiver autrement…

« Douce France » est sorti en salle en 2020 et est aujourd’hui disponible en DVD. Des outils pédagogiques l’accompagnent, notamment un kit pour les collèges, lycées et universités, et un autre pour les collectivités afin d’animer des débats, des formations…

Vous pouvez visionner la bande annonce du film là : https://www.youtube.com/watch?v=Gag54kUrZh4

(1) Extrait du livret qui accompagne le DVD.