A chaque mouvement social, la plus célèbre de ses chansons passe en boucle dans les hauts-parleurs des cortèges. Depuis « Antisocial » qu’il jouait sur scène avec le groupe Trust, Bernie Bonvoisin n’a jamais cessé de s’exprimer contre les injustices. Cette fois, il est derrière la caméra pour un documentaire sur une partie de la population touchée de plein fouet par la précarité.
C’est durant la crise sanitaire provoquée par le Covid-19 que le pays a semblé découvrir, mi-surpris mi-horrifié, la situation dramatique dans laquelle se trouve la jeunesse. Difficultés financières, épuisement, solitude, fragilité mentale… Au point, pour le gouvernement, de devoir mettre en place des solutions spécifiques d’aide alimentaire d’urgence et de soutien psychologique.
Bernie Bonvoisin a tourné en 2021, à Nancy et sa proche banlieue, alors que la période des confinements-déconfinements n’était pas tout à fait terminée.
Il y a d’abord rencontré Pierre, en 2e année d’études de Biologie, qui a dû quitter ses parents parce qu’iels vivaient en zone blanche et qu’il avait besoin de suivre les cours en visio. Il a vécu enfermé dans 9 m² pendant un mois avant de « péter un plomb » et de recourir au « Happsy hours », des consultations mises en place par des étudiant·es en psychologie pour soulager leurs camarades.
Vient ensuite Sébastien, en 3e année de Droit, qui a déjà contracté deux emprunts pour financer ses études parce que ses parents ne peuvent plus l’aider. « Est-ce normal de devoir payer pour apprendre ? », interroge-t-il. Impossible de traverser la rue pour trouver du travail, comme le suggérait Emmanuel Macron : plus d’embauche en période de crise. Il a accepté de suspendre ses études pour faire un Service civique, payé au rabais pour une mission qui est en fait un vrai poste. Dans la bouche du gouvernement, c’est une belle expérience. Dans celle de Sébastien, de l’exploitation et du mépris.
Margot et Laura, étudiantes en Histoire, parlent du système injuste des bourses. Logan, étudiant en Lettres, des 7 euros par mois qui lui restent pour manger une fois qu’il a payé toutes ses charges et de sa « honte » d’être « vulnérable » au point de ne pas arriver à passer la porte des Restos du Coeur.
Il y a aussi Alfa, qui a traversé une partie de la planète à pied, en voiture et en bateau pour quitter sa Guinée natale où il risque la mort. Il étudie la cuisine en France mais l’administration ne lui simplifie pas la vie. « On peut être ensemble, dit-il des autres jeunes, mais on n’a pas le même sourire. »
Il y a aussi tous·tes celleux qui les soutiennent : de l’enseignant au maire en passant par l’infirmier psychiatrique. Et les étudiant·es elleux-mêmes, comme Camélia et Zaccaria, qui s’organisent pour s’entraider. Une belle énergie, de l’espoir... non pas d’un changement qui viendrait des institutions, mais bien des jeunes elleux-mêmes. Sûrement inattendu, peut-être violent. Car Bernie Bonvoisin le rappelle en forme de conclusion : « Quand on n’aura plus rien, on n’aura plus rien à perdre. »
« Mort sociale, jeunesse de France » est à (re)voir gratuitement en replay sur la chaîne parlementaire LCP : https://lcp.fr/programmes/mort-sociale-jeunesse-de-france-82194
F.L.