Sous-titré « Les images qui ont façonné le combat pour l'égalité, 1857-2017 », cet ouvrage est le premier à présenter la diversité des interventions féministes dans l'art, du XIXe siècle à nos jours, des banderoles des suffragettes aux créations numériques. Passionnant et esthétiquement très réussi.
Comme l'écrit Helena Reckitt dans l'introduction, ce livre montre « comment les femmes se sont déplacées des marges du monde de l'art vers ses centres ». D'abord objets, elles sont progressivement devenues des sujets de la production artistique : aujourd'hui, elles ne sont plus seulement représentées, mais elles représentent et construisent elles-mêmes leurs représentations.
Les artistes féministes se servent de leur pratique pour faire passer leur message. Celui-ci prend de multiples formes et de multiples directions.
Ainsi, certaines œuvres critiquent les représentations dégradantes des femmes (dans la publicité, par exemple) ou les rôles que les sociétés patriarcales leur imposent. D'autres ont pour objectif de visibiliser les activités assurées au quotidien par les femmes, y compris dans la sphère domestique.
De la même manière, alors que des artistes consacrent le corps de la femme comme lieu absolu de désir et de jouissance, d'autres estompent les frontières entre l'esprit et la matière.
Des expériences tirent leur force de l'arrivée d'Internet, tandis que d'autres remettent en question la toute puissance des technologies numériques.
Enfin, certaines artistes s'interrogent : le « business » inhérent au marché de l'art est-il réellement compatible avec la lutte contre les dominations et les discriminations, donc le combat contre le capitalisme ?
Mais l'intérêt de l'ouvrage est précisément là : revisiter l'histoire féministe, à travers ces multiples courants artistiques. Y sont abordés aussi bien les questions de « féminisme citoyen » et de « féminisme militant », que de « féminisme de l'intime ». Les différents chapitres traitent de la liberté, de la guerre, du travail, de la résistance, des sens, du rapport au public, de politique, des formes de performances…
Les textes, écrits par Lucinda Gosling, Hilary Robinson et Amy Tobin (traduits de l'anglais par Caroline de Hugo) sont accompagnés de nombreux tableaux, photographies, collages, captations de vidéos qui offrent à voir toute la diversité du travail des artistes mises en valeur. Pour n'en citer que quelques-unes, Bertha Newcombe (caricaturiste) au XIXe siècle, Lobiov Popova (du courant des avant-gardistes) dans les années 1920, Tamara de Lempicka une décennie plus tard, Yoko Ono (performer) dans les années 1960, Theresa Hak Kyung Cha dans les années 1970, Linder (autrice de photomontages) dans les années 1980, Varsha Nair dans les années 2000, Zanele Muholi (queer noire) de nos jours…
Et tant d'autres, au fil des 270 pages !
L'ouvrage est paru en 2019 chez Hugo Image. Plus d'informations sur www.hugoetcie.fr